Au Sénégal, le Port autonome de Dakar navigue toujours en eaux troubles

Pour limiter la congestion portuaire tout en maintenant le même dynamisme économique, le PAD, en plein cœur de la capitale, doit relever d’importants défis structurels, dont celui de la position géographique.

Le Port autonome de Dakar (PAD) voit passer plus de 70 % des importations du Sénégal. © Sylvain Cherkaoui pour Jeune Afrique

Le Port autonome de Dakar (PAD) voit passer plus de 70 % des importations du Sénégal. © Sylvain Cherkaoui pour Jeune Afrique

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Publié le 13 avril 2024 Lecture : 3 minutes.

La congestion portuaire est souvent la manifestation d’un certain dynamisme de l’économie. C’est le cas au Port autonome de Dakar (PAD), au Sénégal, où les volumes conteneurs à l’import augmentent en moyenne de 10 % par an (plus de 12 % entre 2023 et 2024). Mais cette congestion peut aussi se révéler pénalisante pour les différents acteurs, sur les plans opérationnel, économique et financier. En effet, elle est à l’origine de fortes tensions au sein de « la communauté portuaire ».

Si l’exaspération et la lassitude des différents protagonistes face à cette congestion sont compréhensibles, la grève et le boycott ne sont sûrement pas la panacée : ils contribuent à dégrader davantage la situation. Toute solution à cet étranglement progressif du principal point d’entrée des marchandises dans le pays ne peut être qu’inclusive, globale et interactive, ce qui condamne tous les acteurs du secteur à coopérer. Le PAD voit passer plus de 70 % des importations du Sénégal.

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Maersk, MSC et CMA CGM présents au Sénégal

Les trois plus grands acteurs maritimes mondiaux y sont représentés : Maersk, Mediterranean Shipping Company (MSC) et CMA CGM. Des logisticiens de premier plan aussi, comme Dakar Terminal, DP World et Africa Global Logistics. Pendant la crise du Covid-19, le PAD a travaillé sans relâche et les dockers ont déchargé des tonnages, jours et nuits, en shifts successifs, pour maintenir le pays en vie. Le dimanche 24 mars, après s’être rendu aux urnes pour la présidentielle, dockers, logisticiens, recruteurs et armateurs sont retournés au travail.

Pour limiter la congestion portuaire tout en maintenant le même dynamisme, le PAD doit relever d’importants défis structurels. Le premier d’entre eux est celui de la position géographique. Les flux du PAD, port urbain s’il en est, côtoient et cohabitent avec ceux de la cité urbaine. Viennent ensuite l’exiguïté et l’inadaptation des installations portuaires, en particulier celles du terminal à conteneurs, lequel est vite saturé. En tant que société nationale à vocation commerciale, le PAD ne peut traiter ses utilisateurs comme de simples usagers : il se doit de les considérer comme des clients auxquels une qualité de service de standard international est due.

De nombreux autres travers peuvent être relevés. Comme l’absence, jusqu’à une date récente, de bretelle ferroviaire, les lourdeurs administratives, le non-fonctionnement administratif du port 24 heures sur 24, la persistance de procédures fastidieuses et de mauvaises pratiques, l’incivisme des usagers, le manque de coordination intégrale de la chaîne logistique induisant la lenteur des opérations de déchargement des conteneurs. Surtout, le « port du futur » prévu à Ndayane, sur la Petite-Côte, à 70 km au sud de Dakar, tarde à voir le jour. Un exemple pour bien se rendre compte du chemin à parcourir, celui du principal concurrent du Sénégal sur le marché de l’hinterland : la Côte d’Ivoire, qui dispose déjà de trois terminaux à conteneurs…

Au PAD, le ralentissement voire la paralysie de l’ensemble de la chaîne logistique – avec comme corollaire des coûts additionnels qui contribuent à alimenter l’inflation générale – ne saurait donc être une option. En effet, ces pénalités sont la source de conflits récurrents entre les différents protagonistes. Et si l’on n’y prend garde, des métiers comme ceux de transitaire, de transporteur et d’armateur pourraient bien disparaître. Il est essentiel que la communauté portuaire prenne ses responsabilités.

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Des acteurs condamnés à coopérer

Cela suppose, à court terme, qu’elle réduise la pression sur le terminal et fluidifie davantage l’écosystème portuaire en trouvant des zones de stockage temporaires aux encablures du port, en simplifiant les procédures, en supprimant les inlassables opérations d’actualisation auxquelles sont astreints les usagers et en maintenant l’activité du port 24 heures sur 24. Et le benchmarking peut y contribuer.

Déjà, l’autorité portuaire prend des initiatives heureuses qui méritent d’être saluées, comme la digitalisation en cours des services, laquelle devrait conduire à la mise en place d’un guichet unique. Reste à concrétiser, le projet, salutaire, du « port du futur », qui devra s’accompagner d’une anticipation de la circulation des flux. Si le point de livraison principal demeure Dakar, nous risquons d’y ramener la difficile gestion des flux de centaines de camions par jour.

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Le PAD n’est pas une exception. Plusieurs ports de la sous-région ouest-africaine font face, peu ou prou, à ce phénomène de congestion dont la résolution passe par une action conjointe des acteurs. En s’arc-boutant sur des positions extrémistes, ils pourraient tous y perdre. Les transporteurs, qui effectueraient moins de rotations ; les transitaires, qui s’acquitteraient de frais supplémentaires prohibitifs ; les armateurs, dont les équipements seraient retenus ; les clients, qui se verraient imposer des charges additionnelles liées à la constitution de stocks trop importants. Et, au bout de la chaîne, le consommateur final devra supporter l’addition. D’une manière ou d’une autre.

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