Attaque iranienne sans précédent contre Israël
L’Iran a lancé dans la nuit de samedi à dimanche plus de 200 drones et missiles contre Israël, en réponse à une frappe contre son consulat à Damas. Une attaque directe iranienne inédite qui « a atteint tous ses objectifs », selon le chef des forces armées iraniennes, et que l’armée israélienne affirme avoir « déjouée ».
L’Iran a lancé dans la nuit du 13 au 14 avril plus de 200 drones et missiles contre Israël, en réponse à une frappe contre son consulat à Damas, le 1er avril. Une attaque directe iranienne inédite. Le Conseil de sécurité doit tenir une réunion d’urgence dimanche, le chef de l’ONU, António Guterres, ayant condamné « une grave escalade ».
« L’affaire peut être considérée comme close », a annoncé la mission iranienne à l’ONU dans un message posté trois heures après le début de son opération. Mais, a-t-elle prévenu, « si le régime israélien commettait une nouvelle erreur, la réponse de l’Iran serait considérablement plus sévère ».
Parallèlement à l’attaque iranienne, des alliés de Téhéran, le Hezbollah libanais et les rebelles yéménites houthis ont mené des attaques anti-israéliennes, le premier en tirant deux salves de roquettes en quelques heures sur le Golan occupé par Israël, et les seconds en lançant des drones en direction du territoire israélien.
Réunion du cabinet de guerre
« Avec les États-Unis et d’autres partenaires, nous avons réussi à défendre le territoire de l’État d’Israël », s’est félicité le ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant. « L’attaque iranienne a été déjouée », a affirmé le porte-parole de l’armée israélienne à propos de la première attaque directe jamais menée par la République islamique contre le territoire israélien.
« Nous avons intercepté 99 % des tirs vers Israël », a déclaré le contre-amiral Daniel Hagari dans une allocution télévisée. L’espace aérien israélien a rouvert dimanche matin, ont aussi annoncé les autorités aéroportuaires. La Jordanie et le Liban, pays voisins d’Israël, ainsi que l’Irak, frontalier de l’Iran, ont également annoncé la réouverture dimanche de leur espace aérien.
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Le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, dont l’armée est engagée dans une guerre dans la bande de Gaza contre le mouvement palestinien Hamas, également allié de l’Iran, a tenu une réunion du cabinet de guerre dans la nuit. Les services de renseignement israéliens ont affirmé dimanche que le Hamas avait refusé une proposition de trêve avec Israël présentée par les médiateurs égyptiens et qataris au Caire.
Le Hamas avait indiqué samedi avoir remis sa réponse aux médiateurs et, sans en rejeter explicitement le contenu, avait insisté sur son exigence d’un cessez-le-feu permanent à Gaza. Le Hamas « continue d’exploiter les tensions avec l’Iran » dans le dessein d’« obtenir une escalade » dans la région, écrit aussi le Mossad, les services de renseignement israéliens, dans un communiqué.
Soutien « inébranlable » américain
Le président américain Joe Biden a renouvelé son soutien « inébranlable » à Israël et annoncé que les dirigeants du G7 seront convoqués afin de coordonner une « réponse diplomatique unie » à l’attaque iranienne « éhontée ».
L’armée israélienne a indiqué que l’Iran avait « lancé un essaim de 200 drones tueurs, des missiles balistiques et des missiles de croisière ». Aucun drone ni missile « n’a pénétré le territoire d’Israël » tandis que seuls quelques missiles balistiques « sont entrés et ont touché légèrement » une base militaire, qui reste en activité, a ajouté Daniel Hagari.
De son côté, l’agence officielle iranienne Irna a fait état de « sérieux dégâts dans la plus importante base aérienne du Néguev (sud) ». L’attaque iranienne est une réponse à la frappe le 1er avril qui a détruit le consulat iranien à Damas et coûté la vie à deux hauts gradés des Gardiens, ont-ils précisé. L’Iran a accusé Israël de cette frappe, mais ce dernier n’a ni confirmé ni démenti.
Le chef des forces armées iraniennes a affirmé dimanche que l’attaque menée dans la nuit contre Israël avait « atteint tous ses objectifs », en précisant qu’aucun centre urbain ou économique n’avait été visé par les drones et missiles iraniens. « L’opération Promesse honnête a été menée avec succès entre hier soir et ce matin, et a atteint tous ses objectifs », a déclaré à la télévision le général Mohammad Bagheri.
Deux sites principalement ciblés
Il a affirmé que les deux sites principalement ciblés avaient été « le centre de renseignement qui a fourni aux sionistes les informations nécessaires » à la frappe ayant détruit le consulat iranien à Damas le 1er avril, ainsi que « la base aérienne de Novatim, d’où ont décollé les avions F-35 » qui l’ont bombardé. « Ces deux centres ont été considérablement endommagés et mis hors service », a-t-il assuré.
« Nous n’avons aucune intention de poursuivre cette opération, mais si le régime sioniste entreprend une action contre la République islamique d’Iran, que ce soit sur notre sol ou dans les centres nous appartenant en Syrie ou ailleurs, notre prochaine opération sera bien plus importante que celle-ci », a prévenu le haut-gradé.
Le général Bagheri a par ailleurs indiqué que les autorités iraniennes avaient « envoyé un message aux États-Unis avertissant que s’ils coopéraient avec Israël pour leurs prochaines actions éventuelles, leurs bases ne seront pas sûres ». Les États-Unis possèdent plusieurs bases militaires dans la région. Ce message a été transmis via l’ambassade de Suisse, qui représente les intérêts américains en Iran en l’absence de relations diplomatiques entre les deux pays.
Également interrogé à la télévision d’État, le commandant des Gardiens de la révolution, Hossein Salami, a indiqué que l’opération menée dans la nuit « aurait pu être de plus grande envergure ». « Nous avons limité cette opération aux services que le régime sioniste a utilisés pour attaquer notre ambassade » en Syrie.
« Régime voyou israélien »
Peu avant 2 heures dimanche matin (23 heures GMT samedi), une série de détonations a figé Jérusalem. Le ciel s’est piqué de lumières rouges et jaunes filmées par de nombreux habitants qui ont partagé les images sur les réseaux sociaux. Des images saisissantes de projectiles frôlant l’emblématique coupole dorée du dôme du rocher, sur l’un des sites les plus saints de l’Islam, au cœur de la vieille ville, font le tour des plateformes.
Une heure environ après l’annonce du lancement de l’opération iranienne, baptisée « Promesse honnête », l’agence Irna a indiqué qu’ »une première vague de missiles balistiques » avait été lancée « en profondeur » du territoire israélien. « L’armée de l’air des Gardiens de la révolution a tiré des dizaines de missiles et de drones sur des cibles spécifiques », selon la télévision d’État citant les Gardiens, l’armée idéologique de l’Iran.
En annonçant l’attaque iranienne peu après 23 heures samedi (20 heures GMT), Daniel Hagari a dénoncé comme une « escalade dangereuse » cette « attaque directe lancée depuis le sol iranien ». « Il s’agit d’un conflit entre l’Iran et le régime voyou israélien, dont les États-Unis DOIVENT RESTER À L’ÉCART ! », a déclaré la mission iranienne à l’ONU dans un message posté sur X.
Aux cris de « Mort à Israël », « Mort à l’Amérique », quelques milliers de personnes se sont rassemblées dans les principales villes d’Iran pour saluer l’attaque iranienne. Juste après le début de l’opération, le compte X du guide suprême d’Iran, l’ayatollah Ali Khamenei, avait publié un message affirmant : « Le régime diabolique va être puni ».
Appels internationaux à la désescalade
La crainte d’un embrasement régional est dans toutes les têtes. L’Égypte a mis en garde contre un « risque d’expansion régionale du conflit ». L’Arabie saoudite a pour sa part appelé toutes les parties à « la plus grande retenue », et l’Irak « à ne pas étendre la situation ». Même préoccupation hors du monde arabe. Pékin a dit sa « profonde préoccupation, la Russie a également appelé à la « retenue ». Le Premier ministre britannique Rishi Sunak a appelé au « calme », disant travailler avec les alliés britanniques à un « désamorçage » de la situation.
Paris a condamné l’attaque iranienne, tout comme l’Italie, l’Espagne, la Belgique, ou encore la Norvège, et Berlin a dit que celle-ci pourrait plonger la région « dans le chaos ». L’Iran a amené « en toute conscience » le Moyen-Orient « au bord du précipice », a accusé dimanche la ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, en référence à une éventuelle contre-attaque israélienne. Signe du climat inflammable dans la région, la France a annoncé dimanche recommander à ses ressortissants de quitter temporairement l’Iran.
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, « condamne fermement l’attaque flagrante et injustifiable de l’Iran » tout en appelant toutes les parties à « s’abstenir de toute nouvelle escalade et [à] œuvrer au rétablissement de la stabilité dans la région ».
Le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, qui a convoqué pour mardi une visioconférence d’urgence des ministres des Affaires étrangères de l’UE, a dit s’être entretenu avec le ministre iranien des Affaires étrangères, Hossein Amir Abdollahian, à qui il a fait part de la condamnation par l’UE des frappes « dans les termes les plus forts », appelant l’Iran à ne pas se livrer à une « nouvelle escalade ».
Depuis Rome, le pape François a lancé un « appel pressant » contre « une spirale de violence risquant d’entraîner le Moyen-Orient dans un conflit encore plus grand ». Face aux condamnations occidentales, l’Iran a convoqué les ambassadeurs du Royaume-Uni, de France et d’Allemagne.
« Pas d’accord humanitaire » à Gaza
Samedi, les forces spéciales maritimes des Gardiens de la Révolution ont saisi un navire accusé d’être « lié » à Israël, avec 25 membres d’équipage à bord, dans les eaux du Golfe. La République islamique d’Iran, qui ne reconnaît pas l’existence d’Israël, est un allié du Hamas.
Son rejet de la proposition de trêve soumise par les médiateurs montre que le chef du Hamas dans la bande de Gaza, Yahya « Sinouar ne veut pas d’accord humanitaire, ni le retour des otages », écrit le Mossad israélien, dans un communiqué dimanche. Sans opposer une fin de non-recevoir explicite à leur proposition, le Hamas avait réaffirmé ses principales exigences, sur lesquelles butte catégoriquement Israël : un cessez-le-feu permanent et le retrait de l’armée israélienne de toute la bande de Gaza.
Benyamin Netanyahou ne veut pas en entendre parler, déterminé à lancer une offensive terrestre à Rafah, dans l’extrême sud du territoire palestinien, qu’il présente comme le dernier grand bastion du Hamas dans la bande de Gaza. « Le gouvernement et les forces de sécurité sont unies dans leur opposition à ces demandes infondées », a-t-il déclaré au sujet des prétentions du Hamas, lequel s’est dit toujours disposé à « conclure un accord sérieux ».
A tour de rôle, Israël et le Hamas palestinien s’accusent de vouloir saboter les pourparlers en vue d’une trêve dans la bande de Gaza, mais le fil n’est pas (encore) rompu. « Les négociations ne sont pas à l’arrêt », assure Hasni Abidi, du Centre d’études et de recherche sur le monde arabe et méditerranéen à Genève, mais les médiateurs sont renvoyés à leurs études dans le but de rechercher un meilleur compromis.
(avec AFP)
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