Une arnaque « à la Madoff » dégénère à El-Facher

De Wall Street au Darfour, la spéculation financière n’a pas de frontières, mais la réaction des investisseurs floués est plus musclée dans l’ouest du Soudan. Dimanche, au Darfour, des heurts ont opposé les victimes d’une fraude pyramidale à la police.

Vue aérienne d’El-Facher dans le Darfour-Nord (23 juillet 2008). © AFP

Vue aérienne d’El-Facher dans le Darfour-Nord (23 juillet 2008). © AFP

Publié le 2 mai 2010 Lecture : 2 minutes.

Des centaines de petits épargnants ont manifesté dimanche 2 mai au matin à El-Facher, capitale historique du Darfour et de l’Etat du Darfour-Nord, pour obtenir une compensation après avoir perdu des sommes importantes en vendant leurs biens contre une promesse de remboursement important.

"Nous avons eu des indications qu’un certain nombre de personnes présumées victimes d’un système financier parallèle ont protesté à El-Facher", a dit Kemal Saïki, chef de la communication de la Mission de paix ONU-Union africaine au Darfour (Minuad) dont le siège est à El-Facher. "On a entendu des tirs sporadiques. Mais il ne s’agit pas de combats. Nous n’avons pas d’informations sur des gens ayant été atteints. On a demandé à notre personnel de rester sur leur lieu de travail et de limiter leurs déplacements", a-t-il ajouté.

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"À 08H00 (05H00 GMT), les gens d’El-Facher ont pris la rue pour manifester. Ils voulaient se rendre à la maison du wali (gouverneur) du Darfour-Nord, Mohammed Youssif Kibir, mais la police et les forces de sécurité ont bloqué la rue. La police a ouvert le feu", a dit par téléphone Dirar Abdallah Dirar, un des manifestants. "Il y a eu des victimes", a ajouté M. Dirar sans plus de précision. Les sirènes des ambulances étaient entendues dimanche dans la ville, ont indiqué à l’AFP des humanitaires. "Les coups de feu ont commencé vers 09H00 (06H00 GMT) et ils continuent. Nous restons dans nos bureaux", selon un humanitaire parlant sous le couvert de l’anonymat.

Chaîne de Ponzi

"La situation couvait depuis plusieurs semaines, je savais bien qu’un jour où l’autre, l’abcès finirait par crever", a raconté un autre humanitaire également basé à El-Facher, ville d’environ un demi-million d’habitants relativement épargnée par la guerre civile qui sévit au Darfour depuis 2003.

La situation est tendue depuis quelques semaines après que des milliers de personnes ont perdu des millions de dollars et des biens dans une "chaîne de Ponzi", où les premiers investisseurs sont rémunérés par les dépôts d’investisseurs ultérieurs. Les victimes de cette fraude ont vendu leurs biens contre une petite somme d’argent mais avec la promesse d’intérêts élevés.

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Le souk Al-rahmat, dans le centre d’El-Facher, a été rebaptisé "souk al-mawassir" (le marché de l’escroquerie, en arabe vernaculaire), par les habitants. Par ricochet, l’ensemble de cette escroquerie est appelée "al-mawassir" au Soudan.

Pas de compensation

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La révélation de cette escroquerie a mis dans l’embarras les autorités locales, qui ont annoncé l’arrestation de deux personnes impliquées dans ce réseau. Selon des habitants locaux, le gouverneur du Darfour-Nord avait promis, pendant la campagne des élections nationales du 11 au 15 avril dernier, une compensation aux épargnants volés, mais n’aurait pas tenu promesse.

Lors d’une rencontre vendredi avec des imams et des leaders de la région, M. Kibir avait affirmé que les autorités du Darfour-Nord n’étaient pas impliquées dans cette escroquerie et garanti que les investisseurs floués allaient recouvrer les sommes ou les biens perdus, a rapporté l’agence officielle Suna.

"Les manifestations de dimanche semblaient organisées, je ne pense pas que ce soit terminé", a souligné un humanitaire.

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