L’opposante Victoire Ingabire dans la ligne de mire

Elle réclamait depuis son retour d’exil que les massacres de Hutus perpetrés en 1994 soient poursuivis en justice. Elle a été empêchée de quitter le territoire rwandais ce mardi 23 mars par les autorités de Kigali qui lui reprochent une attitude « révisioniste ».

L’opposante rwandaise Victoire Ingabire. © D.R.

L’opposante rwandaise Victoire Ingabire. © D.R.

Publié le 23 mars 2010 Lecture : 2 minutes.

Une dirigeante de l’opposante rwandaise, Victoire Ingabire, a été empêchée de quitter le pays alors qu’elle prenait l’avion à l’aéroport de Kigali, a indiqué à l’AFP le porte-parole de la police rwandaise, démentant son arrestation annoncée auparavant par radio Rwanda. "La police a demandé à Mme Ingabire de ne pas quitter le territoire car elle doit répondre à une convocation de la police demain matin", a déclaré à l’AFP le porte-parole de la police rwandaise, Eric Kayiranga. "Mme Ingabire n’a pas été arrêtée, elle est libre de ses mouvements", a souligné M. Kayiranga.

Dans son journal du soir en langue rwandaise, Radio Rwanda avait pourtant annoncé l’arrestation par "les services de sécurité" de Victoire Ingabire "alors qu’elle tentait de fuir le pays". Mme Ingabire "a été empêchée de prendre l’avion" alors qu’elle s’apprêtait à embarquer à l’aéroport de Kigali, a corrigé par la suite Radio Rwanda, dans ses journaux en anglais et en français. "La police lui a demandé de ne pas prendre l’avion car il y encore des questions auquelles elle doit répondre", selon Radio Rwanda.

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Justice pour les Hutu

Le jour même de son retour au pays, le 16 janvier, l’opposante avait demandé, après avoir déposé des gerbes de fleurs à un mémorial du génocide contre les Tutsi à Kigali, que les auteurs de crimes commis contre les Hutu en 1994 soient également jugés. Le régime rwandais accuse depuis lors Mme Ingabire, une Hutu, d’avoir nié, par de tels propos, la réalité du génocide de 1994, au cours duquel au moins 800.000 personnes selon l’ONU, en majorité Tutsi, avaient été tuées.

Elle a été interrogée à plusieurs reprises par la police. L’un de ses collaborateurs, Joseph Ntawangundi, avec lequel elle était rentrée d’exil, a été interpellé en février, en exécution d’un jugement par contumace rendu en 2007 par un tribunal gacaca (populaire) pour son implication dans le génocide. Mme Ingabire est la présidente des Forces démocratiques unifiées (FDU), un parti créé en exil et pas encore enregistré par les autorités rwandaises.

Elle a été désignée par sa formation comme candidate à la présidentielle d’août prochain et avait annoncé à plusieurs reprises son intention de participer au scrutin. Ces dernières semaines, les FDU avaient dénoncé "un nombre croissant de menaces, d’agressions et de harcèlements subis par l’opposition à l’approche de la présidentielle". Ce parti avait également accusé les autorités rwandaises de bloquer délibérément son enregistrement, afin d’empêcher la participation de Mme Ingabire à l’élection.

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Début février, l’organisation américaine de défense des droits de l’Homme Human Rights Watch s’était inquiétée du "nombre croissant de menaces, d’agressions et d’actes de harcèlement" contre "les membres des partis de l’opposition". Le président sortant Paul Kagame, dont le Front patriotique rwandais (FPR, ex-rébellion) avait mis fin en 1994 au génocide, doit participer à la présidentielle prévue en août. Il avait été élu président du pays en 2003 lors de la première élection présidentielle post-génocide.
 

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