L’opposition togolaise tente de se mobiliser à quelques jours des législatives

Depuis l’adoption de la nouvelle Constitution qu’elle dénonce, l’opposition et la société civile togolaises sont déchirées entre désir de mobilisation et crainte de répression, à quelques jours des élections législatives.

Le président togolais, Faure Essozimna Gnassingbé, à Berlin le 20 novembre 2023. © Getty Images via AFP

Le président togolais, Faure Essozimna Gnassingbé, à Berlin le 20 novembre 2023. © Getty Images via AFP

Publié le 24 avril 2024 Lecture : 3 minutes.

« Il ne faut pas attendre grand-chose des élections » : Jean Yaovi Dégli, avocat et ancien ministre chargé des relations avec le Parlement de 1991 à 1992, n’a pas vraiment pris de gants pour qualifier les enjeux du double scrutin législatif et régional du 29 avril, ajoutant même que « le parti au pouvoir n’a rien à craindre ».

Si les partis d’opposition continuent de battre campagne, leurs espoirs d’une transition politique sont minces. « Une victoire de l’opposition serait très difficile, à moins d’une révolution », estime l’historien proche de l’opposition Michel Goeh-Akue, soulignant que « le découpage électoral est favorable au régime » et les risques de « bourrage d’urnes » importants.

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Le Parlement a adopté la nouvelle Constitution

La Commission électorale togolaise a refusé à la Conférence épiscopale du Togo de déployer des observateurs électoraux à travers le pays. Vendredi dernier, le Parlement a adopté une nouvelle Constitution qui a fait basculer le pays d’un régime présidentiel à un régime parlementaire. Le président sera élu par les députés, et non plus le peuple, et le pouvoir résidera désormais entre les mains d’une sorte de super-Premier ministre qui sera obligatoirement « le chef du parti majoritaire » à l’Assemblée nationale.

Or, le président du parti majoritaire à l’Assemblée, l’Union pour la République (UNIR), n’est autre que le président Faure Essozimna Gnassingbé. Et ce dernier n’a, dénonce l’opposition, d’autre objectif que se maintenir au pouvoir.

Le président de la Conférence épiscopale, Monseigneur Benoît Alowonou, a exprimé mercredi dans un entretien à Radio Vatican sa « grande tristesse » face à cette modification constitutionnelle qu’il voit comme une « source de division et d’incompréhension », et a appelé les autorités « à écouter le peuple ».

Mardi, une quinzaine d’organisations de la société civile ont signé une déclaration soulignant le caractère « illégitime » et « illégal » du changement constitutionnel et réclamé « une élection présidentielle en 2025 ». Ils appellent à un grand rassemblement populaire le 5 mai prochain à Lomé, une date symbolique qui se réfère au 5 mai 1963, jour du référendum constitutionnel qui a fait passer le pays d’un régime semi-présidentiel à un régime présidentiel à la suite du coup d’État de Gnassingbé Eyadéma, père de l’actuel président.

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« Nous avons décidé de résister mais il est clair qu’il n’y aura pas grand-chose car tout est fait pour réprimer toute velléité de protestation », a admis Michel Goeh-Akue. Au Togo, les manifestations de rues sont interdites depuis 2022, après une attaque au grand marché de Lomé au cours de laquelle un gendarme a été tué. Deux journées de manifestations, prévues les 12 et 13 avril par l’opposition et des groupes de la société civile, n’ont pu avoir lieu : elles ont été interdites par les autorités, et les membres de l’opposition empêchés de se regrouper.

Très peu de réactions internationales

La semaine dernière, un journaliste français, Thomas Dietrich, connu pour ses positions critiques envers les autorités, a été expulsé peu après son entrée au Togo, une mesure dénoncée comme « brutale et arbitraire » par l’ONG de défense de la liberté de la presse Reporters sans Frontières (RSF). Le 15 avril, la Haute autorité de l’audiovisuel et de la communication (HAAC) avait suspendu à titre provisoire toutes les accréditations pour la presse étrangère pour couvrir les élections.

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À l’étranger, seul le bureau des affaires africaines du State Department des États-Unis s’est dit « inquiet » de ce changement de Constitution et a demandé « au gouvernement de permettre un débat ouvert et informé, de garantir l’inclusivité et la transparence et de respecter le droit de réunion pacifique ».

La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) a de son côté dépêché la semaine dernière une mission à Lomé. Mais après avoir évoqué dans un premier temps la « gravité des réformes constitutionnelles controversées », elle a ensuite rétropédalé et expliqué qu’elle n’y effectuait qu’« une évaluation préélectorale » et ne s’engagerait « dans aucun autre processus ». Depuis, elle n’a pas communiqué sur les résultats de sa visite.

(Avec AFP)

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