BBC et Voice of America suspendues deux semaines au Burkina Faso

Le Conseil supérieur de la communication justifie cette décision par la « diffusion d’un article accusant l’armée burkinabè d’exactions sur des populations civiles ».

Manifestation contre les restrictions imposées à la diffusion en direct d’émissions radiophoniques politiques devant le Conseil Supérieur de la Communication à Ouagadougou, le 27 mai 2015. © AHMED OUOBA/AFP

Manifestation contre les restrictions imposées à la diffusion en direct d’émissions radiophoniques politiques devant le Conseil Supérieur de la Communication à Ouagadougou, le 27 mai 2015. © AHMED OUOBA/AFP

Publié le 26 avril 2024 Lecture : 3 minutes.

La junte au pouvoir à Ouagadougou a décidé de suspendre pour deux semaines la BBC et Voice of America (VOA) pour avoir relayé des accusations « d’exactions » commises par l’armée dans son combat contre les jihadistes. La suspension des radios britannique et américaine suit celles, temporaires ou définitives, prises à l’encontre de plusieurs autres médias étrangers – principalement français depuis l’arrivée au pouvoir par un coup d’État du capitaine Ibrahim Traoré en septembre 2022.

Le Conseil supérieur de la communication (CSC) « a décidé de la suspension des programmes des deux radios internationales (BBC et VOA) émettant à Ouagadougou pour une durée de deux semaines à compter de la notification de ladite décision », a-t-il indiqué dans un communiqué publié le 25 avril. Il justifie cette décision par la « diffusion [ce même 25 avril] sur les ondes et les plateformes numériques de BBC Afrique et de VOA d’un article accusant l’armée burkinabè d’exactions sur des populations civiles ».

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Le CSC affirme avoir « décelé dans le contenu dudit article d’énormes déclarations péremptoires et tendancieuses contre l’armée burkinabè sans éléments de preuve tangibles, d’autant plus que le même article invite à une enquête indépendante ».

« Désinformation de nature à porter le discrédit sur l’armée »

Dans son rapport publié le 25 avril, Human Rights Watch (HRW) a accusé l’armée burkinabè, aux prises avec les groupes armés jihadistes, d’avoir « exécuté au moins 223 civils » dont au moins 56 enfants lors de deux attaques dans le Nord du pays.

Le CSC indique également avoir « enjoint » aux fournisseurs d’accès à internet « de suspendre » l’accès aux sites et « autres plateformes numériques de la BBC, de la VOA et de l’ONG Human Rights Watch (HRW) à partir du territoire burkinabè ». Il estime que « l’approche » de la BBC et VOA « porte atteinte aux principes cardinaux du traitement de l’information, en ce qu’elle constitue une désinformation de nature à porter le discrédit sur l’armée burkinabè » et « est, en outre, susceptible de créer des troubles à l’ordre public ». L’autorité de la communication invite « l’ensemble des médias à s’abstenir de relayer, à travers leurs différents supports, cet article tendancieux (…) de nature subversive », rappelant que « tout contrevenant s’expose aux sanctions prévues par les textes en vigueur ».

Le Burkina Faso a déjà suspendu temporairement ou sine die la diffusion de plusieurs chaînes de télévision ou de radio françaises et expulsé des correspondants étrangers, en particulier Français. Les relations entre le Burkina et l’ancienne puissance coloniale française se sont considérablement dégradées depuis l’arrivée au pouvoir du capitaine Traoré et ce sont des médias français qui avaient jusqu’alors été les plus visés.

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En 2023, le Burkina a suspendu en septembre la diffusion sur son territoire de Jeune Afrique (journal papier et site internet) après la parution d’articles évoquant des tensions au sein de l’armée burkinabè. En juin, c’est la chaîne française LCI qui avait été suspendue pour trois mois. Fin mars, il avait ordonné la suspension sine die de la chaîne de télévision France 24, après avoir suspendu en décembre 2022 Radio France Internationale (RFI), deux médias publics accusés notamment d’avoir relayé des messages de chefs jihadistes. En avril, ce sont les correspondantes des quotidiens Libération et Le Monde qui avaient été expulsées. Libération venait de publier une enquête sur des exactions supposées de l’armée.

Les suspensions de la BBC et de VOA « sont abusives et constituent une violation flagrante du droit à l’information », a estimé Sadibou Marong, directeur de Reporters sans frontières (RSF) pour l’Afrique subsaharienne, dans un mail à l’AFP. Selon lui, ces médias n’ont fait que publier « des informations d’intérêt général pour les populations burkinabè ».

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(Avec AFP)

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