Nouvelle édition du « Petit Robert » : permis de tchiper

Le nom « tchip » et le verbe « tchiper » intègrent les colonnes du fameux dictionnaire de la langue française. Un signe de modernité et d’intégration continue de l’inventivité francophone africaine.

© Damien Glez

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Publié le 14 mai 2024 Lecture : 2 minutes.

Sujets de nombreux débats, à l’approche de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Paris, le phrasé et le vocabulaire de la chanteuse Aya Nakamura n’incarnent finalement pas tant qu’on le pense l’authenticité linguistique des nouvelles générations – pas plus celles des « quartiers » périphériques de France que celles des maquis de Bamako, la capitale du Mali à laquelle une certaine droite souhaite scotcher l’artiste. D’un côté ou de l’autre de la Méditerranée, on n’entend guère « tchouffer », « tchop, tchop, tchop » ou « en catchana »…

L’apport de l’Afrique à la langue française se trouve davantage dans l’édition 2025 du Petit Robert, à paraître le 16 mai prochain. Dans cette version abrégée du dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française – Le Grand Robert -, on trouve notamment les termes « tchip » et « tchiper », effectivement très employés par une certaine jeunesse de France… et du Mali.

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Un mot et un comportement

Plus qu’un mot, « tchip » consacre une onomatopée, ce qui constitue une nouvelle victoire de l’oralité, en droite ligne de la pop-culture issue des comics. Elle désigne également une attitude, dont le son est une expression non-verbale aux allures de couperet, héritage indiscutable de la communication africaine et antillaise, parente  des « tchourou » ivoiriens, « msourou » sénégalais ou encore « sourou » malien.

« Fait d’émettre un bruit de succion en signe de désapprobation ou de mépris », définit Le Petit Robert. Et les tenants de la « reconquête » franco-française par la traque des prénoms à consonance « étrangère » n’ont qu’à bien se tenir. Même sans « grand remplacement », l’Afrique infuse chez l’ancien colon. Elle infuse d’ailleurs bien au-delà, le « tchipage » existant aujourd’hui dans les sphères métissées francophones, anglophones et néerlandophones.

Pour désigner la pratique du tchip, les Afro-Américains utilisent l’expression « to suck one’s teeth », littéralement « sucer ses dents ». Et la technique s’identifie aussi bien au Brésil qu’au Bahamas, au Surnima ou à Trinité-et-Tobago.

Francophonies de tous les pays…

Pour peu que l’usage enfonce le clou de la curiosité militante, la langue française, singulièrement ses supports comme Le Petit Robert, intègre sans rechigner les apports d’une francophonie jadis considérée comme excentrée.

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Aux côtés des nouveaux mots venus d’Afrique fleurit le patrimoine linguistique québécois comme, cette année dans Le Petit Robert, l’expression « boss des bécosses » (« personne qui fait preuve d’une autorité prétentieuse ») ou l’impératif « Déguédine ! », qui signifie « Fais de l’air, je t’ai assez vu ». Les mots africains ne devraient pas déguédiner de sitôt des pages des dictionnaires français.

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