Crash d’Ethiopian Airlines : Boeing « passible de poursuites » au pénal
Les autorités fédérales américaines ont déterminé, mardi 14 mai, que le constructeur avait « violé ses obligations » dans le cadre d’un accord conclu en 2021 à la suite de deux crashs ayant causé la mort de 346 personnes, ce qui l’exposerait à des sanctions pénales.
Le ministère américain de la Justice a notifié à un juge fédéral, dans une lettre en date du mardi 14 mai, que Boeing n’avait pas respecté certaines conditions d’un accord qui lui évitait d’être poursuivi pénalement pour deux accidents de son 737 MAX ayant causé au total 346 morts, fin 2018 et début 2019.
Désormais, « Boeing est passible de poursuites » dans ce dossier, écrit le ministère, qui dit être en train d’étudier la possibilité de poursuivre, ou non, l’avionneur américain, en pleine tempête après plusieurs incidents récents. « Nous estimons avoir honoré les conditions de cet accord », a réagi Boeing dans un communiqué, disant se tenir prêt à « répondre » sur ce dossier géré par un juge fédéral au Texas.
Les autorités fédérales « ont déterminé que Boeing a violé ses obligations » de l’accord « faute d’avoir prévu, mis en place et fait respecter un programme » visant à se conformer aux lois américaines « sur l’ensemble de ses opérations », relève la lettre du ministère. « Pour avoir failli à suivre entièrement les termes et les obligations » de l’accord, « Boeing est passible de poursuites par [le gouvernement fédéral] pour toute infraction criminelle » connue de l’accusation, peut-on encore lire sur ce document judiciaire.
C’est « une immense victoire », a réagi Catherine Berthet, qui a perdu sa fille Camille dans l’accident d’Ethiopian Airlines. « Nous nous battrons pour un procès pour homicide involontaire de la part de Boeing et ses dirigeants ». C’est une « bonne première étape », mais « nous devons voir d’autres actions du ministère de la Justice pour faire rendre des comptes à Boeing », a déclaré dans un communiqué Paul Cassell, qui représente des familles de victimes.
Accord financier à 2,5 milliards de dollars
Boeing a conclu le 7 janvier 2021 un accord avec les autorités américaines pour un montant de 2,5 milliards de dollars. Par cet accord financier, le constructeur avait reconnu avoir commis une fraude, en échange de l’abandon par le ministère de la Justice de certaines des poursuites le visant depuis les deux accidents mortels qui avaient entraîné l’immobilisation du 737 MAX pendant 20 mois.
Dans le détail, le géant de l’aéronautique avait accepté de verser aux États-Unis une amende pénale de 243,6 millions, ainsi que 1,77 milliard d’indemnités aux compagnies aériennes ayant commandé le 737 MAX et 500 millions pour un fonds destiné à indemniser les proches des victimes des deux accidents.
Le 29 octobre 2018, un 737 MAX 8 de la compagnie Lion Air s’écrasait en mer une dizaine de minutes après son décollage de Jakarta, faisant 189 morts. Le 10 mars suivant, un même modèle d’Ethiopian Airlines s’écrasait six minutes après son décollage près d’Addis-Abeba, tuant 157 personnes. Différentes enquêtes avaient notamment mis en cause le logiciel anti-décrochage MCAS et dénoncé une formation inadaptée des pilotes.
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Effet domino chez Boeing
La remise en cause mardi de cet accord intervient dans un contexte compliqué pour Boeing. L’industriel cumule, depuis début 2023, des problèmes de production liés à un contrôle qualité déficient, affectant son avion vedette, le 737 MAX, et le 787 Dreamliner.
La perte en vol d’une porte-bouchon le 5 janvier sur un avion neuf d’Alaska Airlines a initié un jeu de dominos ayant déjà provoqué la chute de plusieurs responsables de Boeing – comme son patron Dave Calhoun, dont le départ est prévu fin 2024 – et la limitation de sa production de 737 MAX.
Plusieurs lanceurs d’alerte ont depuis témoigné devant le Congrès pour prévenir de « graves problèmes » de production. Ces derniers incidents ont renforcé l’attention des autorités sur la fiabilité de ses appareils et son respect des procédures de sécurité, et a même entraîné dans sa tourmente le régulateur américain de l’aviation civile, la FAA.
(Avec AFP)
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