Contre la précarité énergétique en Afrique, investissez !
La déclaration finale du forum Investing in African Energy 2024 (IAE), qui s’est tenu à Paris les 14 et 15 mai, souligne que l’Afrique doit faire partie du débat mondial sur la transition énergétique et la justice climatique.
-
NJ Ayuk
Ancien avocat et président exécutif de la Chambre africaine de l’énergie
Publié le 30 mai 2024 Lecture : 4 minutes.
La société civile, les groupes de défense des droits humains, les organisations environnementales, les gouvernements, ainsi que les dirigeants du secteur privé ont pris le ferme engagement de coordonner leurs efforts pour combattre la précarité énergétique et promouvoir l’industrialisation, tout en plaidant en faveur d’une transition énergétique qui garantirait la justice climatique. C’est ce qui ressort de la déclaration finale de l’Investing in African Energy 2024 (IAE), qui s’est tenu à Paris les 14 et 15 mai.
Équilibrer croissance économique et gestion de l’environnement
Pendant ces deux jours de réflexion et de débats, les principaux acteurs du continent ont envisagé la meilleure façon de relever les défis énergétiques urgents auxquels l’Afrique est confrontée. Les discussions se sont concentrées sur les stratégies visant à attirer les investissements, à promouvoir le développement énergétique durable et à stimuler la croissance économique tout en donnant la priorité à la responsabilité environnementale.
En effet, tous ont dressé le constat de l’entrave au progrès socio-économique que constitue la pauvreté énergétique qui frappe dans de nombreux pays africains. L’objectif est de libérer le vaste potentiel énergétique du continent et de permettre aux communautés d’accéder à des sources d’énergie fiables et abordables, en favorisant un environnement propice à l’investissement et à l’innovation.
À l’avenir, nous, investisseurs mondiaux et chefs d’entreprise, restons déterminés à défendre le programme énergétique de l’Afrique, à plaider en faveur de politiques qui équilibrent la croissance économique et la gestion de l’environnement, et à donner aux nations africaines les moyens de déployer leur potentiel énergétique tout en faisant progresser les objectifs en matière de climat.
Gaz naturel, GNL et GPL
Nous reconnaissons le droit souverain du continent à développer ses ressources énergétiques de manière équilibrée et durable. L’augmentation des investissements dans l’énergie, le déploiement d’un financement continu et l’avancement des projets énergétiques représentent des priorités essentielles pour l’Afrique quand 600 millions d’Africains n’ont pas accès à une source d’énergie fiable, et 900 millions d’autres n’ont pas accès à des combustibles de cuisson propres.
Des projets tels que le développement du GNL au Mozambique mené par TotalEnergies ou celui de l’oléoduc est-africain visent à maximiser les ressources de l’Afrique au profit des communautés locales. En Afrique de l’Ouest, le terminal GNL de Perenco au Cap Lopez et l’installation de GPL associée, le gazoduc Nigeria-Maroc et le projet GNL Congo mené par Eni catalyseront la croissance économique à long terme et la résilience énergétique. Il est évident que le gaz naturel, le GNL et le GPL joueront un rôle essentiel dans la stratégie de réduction de la précarité énergétique sur le continent.
L’Afrique australe commence à peine à réaliser le plein potentiel de ses ressources pétrolières et gazières avec les récentes découvertes faites dans le bassin de Cabora Bassa au Zimbabwe par Invictus Energy, et dans le prolifique bassin d’Orange en Namibie par Shell, TotalEnergies et Galp. Le pays abrite le plus grand projet d’hydrogène vert d’Afrique subsaharienne mené par Hyphen Hydrogen Energy, comme la Mauritanie, pionnière dans ce secteur grâce au projet Nour de Chariot et AMAN de CWP Global, associés au projet Greater Tortue Ahmeyim LNG exploité par BP.
Pour la dédiabolisation du pétrole et du gaz africains
Malgré les besoins énergétiques non satisfaits de l’Afrique, les prêts mondiaux en faveur de ce secteur n’ont fait que se resserrer, les grandes banques européennes et occidentales se retirant de l’industrie continentale des combustibles fossiles, tout en continuer d’abonder celle des pays occidentaux. Ces institutions n’ont pas été équitables lorsqu’il s’agissait de faciliter un financement adéquat pour des pays africains, où les populations locales sont affectées de manière disproportionnée par les risques climatiques et les restrictions sur l’exploitation des combustibles fossiles.
L’Europe a lancé des appels répétés en faveur du gaz naturel et du financement vert, mais le financement de l’énergie pour les pays africains est considérablement bloqué. Cet étouffement continue d’entraver la croissance industrielle du continent parce qu’il freine le développement d’industries essentielles comme la pétrochimie, les engrais ou l’exploitation minière, qui entrave lourdement la croissance des pays concernés.
Nous, Africains, déplorons la polarisation continue du dialogue sur l’énergie dans les pays occidentaux, et demandons que cesse la diabolisation du pétrole et du gaz africains. Nous préconisons des solutions de marché libre pour l’Afrique, et non pas une aide uniquement destinée à ce que les Africains s’engagent à laisser leurs ressources dans le sol. L’augmentation de l’aide n’est pas la solution. L’investissement est essentiel.
Du Cap au Caire, de Nairobi à Dakar, nous sommes unis pour remplir nos obligations communes en matière de lutte contre le changement climatique, en notant que les nations riches doivent décarboner et que l’Afrique doit s’industrialiser. La société civile, les groupes de défense des droits humains, les organisations environnementales, les gouvernements, ainsi que les dirigeants du secteur privé estiment que les pays africains doivent diversifier leurs réserves de capitaux disponibles et créer des instruments financiers en dehors des institutions traditionnelles. Le capital-investissement et les obligations non conventionnelles peuvent être mobilisés pour soutenir de nouvelles initiatives en matière d’exploration et d’énergie.
En outre, les pays africains doivent adopter des conditions réglementaires et fiscales attrayantes et en finir avec la réglementation incohérente, la bureaucratie excessive ou les politiques nationalistes qui sont autant d’obstacles à l’investissement. Avec des conditions compétitives et incitatives, qui intègrent les principes ESG [environnement, social, gouvernance, NDLR] et les exigences en matière de renforcement des capacités, les projets énergétiques africains seront en mesure de rivaliser efficacement pour attirer des capitaux du monde entier et œuvrer ainsi à ce que la pauvreté énergétique appartienne bientôt à l’histoire ancienne du continent.
L'éco du jour.
Chaque jour, recevez par e-mail l'essentiel de l'actualité économique.
Consultez notre politique de gestion des données personnelles
Les plus lus – Économie & Entreprises
- La Côte d’Ivoire, plus gros importateur de vin d’Afrique et cible des producteurs ...
- Au Maroc, l’UM6P se voit déjà en MIT
- Aérien : pourquoi se déplacer en Afrique coûte-t-il si cher ?
- Côte d’Ivoire : pour booster ses réseaux de transports, Abidjan a un plan
- La stratégie de Teyliom pour redessiner Abidjan