Juntes sahéliennes : silence, on verrouille !
En fin de semaine dernière, de la Guinée au Burkina Faso en passant par le Tchad, les régimes militaires issus de putschs ont assis leur pouvoir, chacun avec leur méthode : censure, grand-messe ou investiture.
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 27 mai 2024 Lecture : 2 minutes.
Arrivés au pouvoir par le renversement d’un président élu, par celui d’un autre putschiste ou à la faveur d’un flou institutionnel, à la mort inattendue d’un paternel maréchal, les néo-souverainistes qui pullulent en Afrique francophone mettent à profit le printemps pour s’inscrire dans le temps long. Chacun ayant son calendrier spécifique et une stratégie plus ou moins originale.
Putschiste à l’ancienne, dans une Guinée qui en connut des fantasques, Mamadi Doumbouya muselle la presse, en même temps qu’il observe le déchu Moussa Dadis Camara s’acheminer vers un séjour en prison à perpétuité. Comme pour mieux verrouiller un régime dont le calendrier n’inspire guère confiance, le ministère guinéen de l’Information vient d’interdire quatre radios et une télévision privées – Radio FIM FM et plusieurs médias des groupes Djoma et Hadafo –, dans un paysage audiovisuel déjà marqué par la suspension de plusieurs médias. Justification de la « censure » ? « Non-respect du contenu des cahiers des charges », assurent les autorités.
Vernis démocratique
Alors que la Guinée ne rédige pas encore la postface de son régime transitoire, c’est sous un vernis démocratique que Mahamat Idriss Déby Itno vient de mettre un point final à une période de turbulences institutionnelles pilotée à sa guise. Validé, le résultat d’une présidentielle pourtant contestée. Investi chef de l’État élu, le fils de feu Idriss Déby Itno. Éloigné, l’opposant Succès Masra, un temps Premier ministre. Nommé chef de gouvernement, le « fidèle des fidèles » Allamaye Halina, ancien ambassadeur du Tchad en Chine.
Rendez-vous dans cinq ans, pour l’éventuel renouvellement du mandat présidentiel, et dans moins de dix ans, pour de possibles nouvelles circonvolutions sur l’esprit et la lettre de la Constitution.
Palabres préfabriquées
À mi-chemin entre la première étape transitoire de la Guinée et la fin de la transition tchadienne, le Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration 2 (MPSR 2) burkinabè a mis le week-end à profit pour prolonger son bail d’une durée supérieure audit bail. Presque deux ans après la promesse du capitaine Ibrahim Traoré de régler le problème sécuritaire et de rendre au plus vite un pouvoir qui ne l’intéressait officiellement pas, des assises nationales ont eu beau jeu d’imposer une précipitation certaine à un paysage politique léthargique, à une opinion intimidée et à une société civile souvent taxée d’apatridie intellectualiste.
Les nostalgiques groggy du vent frais du discours de La Baule n’ont plus que leurs yeux pour pleurer, dans un contexte inédit d’arrière-plan jihadiste et de populisme censément productif.
Le Mali, en avance sur le Burkina, et le Niger, en retard sur le Faso, réfléchissent à leur inscription dans cette typologie des juntes d’Afrique francophone. Avec les premiers symptômes d’une gueule de bois. Le Mali assiste à la gestation d’un pacte de non-agression entre les jihadistes du JNIM et les rebelles du CSP. Le Niger lorgne toujours un voisin béninois qui pourrait n’avoir décrispé les tensions diplomatiques que temporairement.
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