La Soudanaise au pantalon révèle avoir porté le niqab pour quitter son pays
La journaliste Loubna Ahmed al-Hussein, condamnée récemment au Soudan pour avoir porté un pantalon jugé « indécent », a révélé mardi à Paris avoir revêtu le voile islamique intégral, le niqab, pour quitter clandestinement son pays et se rendre en France.
"Ils ont voulu m’empêcher de sortir, j’ai eu recours au niqab, et j’ai pu sortir quand même", a-t-elle déclaré. "J’ai eu recours à ce moyen parce qu’on m’avait interdit de voyager, j’avais demandé des documents pour pouvoir partir, et je n’ai trouvé que ce moyen pour pouvoir quitter le Soudan", a-t-elle ajouté.
La jeune femme a été reçue à Paris par le ministre des Affaires étrangères Bernard Kouchner, qui a rendu hommage à son combat "important pour les femmes arabes et africaines".
Au côté du ministre français, Loubna Ahmed al-Hussein, 35 ans, a fustigé une nouvelle fois les violations des droits humains, selon elle, du régime du président Omar el-Béchir.
"Ces dizaines de milliers de femmes soumises à des coups de fouet à cause des vêtements qu’elles portent, c’est en vertu d’une loi du gouvernement à Khartoum. On peut se poser la question sur ce que le gouvernement peut faire au Darfour en dehors de tout cadre juridique", a-t-elle dit.
Procès retentissant
Chroniqueuse au journal de gauche as-Sahafa et employée à la section média de la mission de l’ONU au Soudan -travail qu’elle a quitté depuis-, elle avait décidé de sortir ces femmes de l’ombre.
A l’issue de son procès qui avait eu un retentissement mondial début septembre, elle avait été reconnue coupable d’avoir porté un pantalon jugé "indécent" par la cour.
Elle n’avait pas reçu de coups de fouet comme le prévoit la loi, mais avait été emprisonnée après avoir refusé de payer une amende de quelque 200 dollars américains. L’association des journalistes soudanais avait payé son amende au lendemain du verdict et la jeune femme avait aussitôt été libérée.
Selon la présidente de l’association française de défense du droit des femmes "Ni putes ni soumises", Sihem Habchi, qui a organisé son séjour, Loubna Ahmed Al-Hussein est arrivée en France le 18 novembre.
Elle était partie par l’aéroport de Khartoum pour Sanaa, Le Caire et Amman, trois capitales où elle a été accueillie par des associations de femmes, selon Mme Habchi. Elle doit revenir en décembre au Caire pour recevoir un prix d’organisations féministes.
"Elle a utilisé l’outil d’oppression, le voile intégral, contre l’oppresseur pour s’enfuir", s’est félicité Mme Habchi.
Un livre pour interpeller sur ces abus
La jeune femme, venue en France à l’occasion de la parution de son livre "Quarante coups de fouet pour un pantalon" (Editions Plon), a insisté sur sa liberté de citoyenne.
"Je n’ai pas fui le Soudan. La Constitution me donne un certain nombre de droits dont le droit de voyager. Ceux qui m’ont empêché de voyager auparavant ont violé la Constitution", a-t-elle dit.
Elle n’a pas révélé quels étaient ses projets immédiats. Mais "elle n’envisage pas de ne pas retourner dans son pays", a assuré Sihem Habchi.
Loubna al-Hussein a aussi "adressé un message" aux autorités soudanaises: "il a suffi que je me couvre pour pouvoir sortir: cela peut avoir des répercussions très importantes, y compris sur le plan de la sécurité", a-t-elle observé.
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