Élections en Afrique du Sud : l’ANC attend le verdict très incertain des urnes
Le décompte des voix se poursuit ce 30 mai, au lendemain d’élections générales cruciales pour le parti au pouvoir. Pour la première fois de son histoire, la formation de Cyril Ramaphosa pourrait perdre sa majorité absolue.
La plupart des bureaux de vote en Afrique du Sud ont fermé mercredi 29 mai 21 heures, sauf dans plusieurs grandes villes, notamment Durban, capitale du pays zoulou (Est), où des milliers d’électeurs ont attendu des heures pour déposer leurs bulletins, en raison de files d’attente interminables.
DA et EFF dénoncent des dysfonctionnements
Parmi les plus de 27 millions d’inscrits, la participation s’annonce forte, la commission électorale estimant qu’elle sera « bien supérieure » à celle des dernières élections de 2019 (66% à l’époque). Les résultats ne sont pas attendus avant le week-end, et nombre d’observateurs analyseront de près taux de participation et résultats partiels dans différentes zones, villes, banlieues et townships, pour tenter de pronostiquer la tendance pendant les prochains jours.
Mercredi, les électeurs ont confié leurs espoirs et inquiétudes : certains maintiennent leur confiance au Congrès national africain (ANC) pour remédier au chômage endémique, mettre fin aux inégalités records et mettre fin aux pénuries d’électricité. D’autres, exaspérés, ont choisi l’opposition, morcelée entre de nombreuses formations politiques.
Les deux principaux partis d’opposition, l’Alliance démocratique (DA, centre libéral) comme les Combattants pour la liberté économique (EFF, gauche radicale), ont regretté des dysfonctionnements, responsables de ces foules qui « incitent les gens à partir avant de voter ».
À Durban, Sibahle Vilakazi, 25 ans, est revenue en fin de journée une troisième fois dans son bureau de vote, découragée plus tôt par la foule : « Je ne renoncerai pas, nous avons besoin de changement, tout le monde ici va s’accrocher. »
À Soweto, le président Cyril Ramaphosa, 71 ans, a assuré en souriant que la victoire de l’ANC ne faisait « aucun doute ». Mais le chef du DA, John Steenhuisen, a évoqué une nouvelle ère, après trente ans de scrutins où « il allait de soi que l’ANC allait gagner [et où] on se demandait seulement avec quel score ».
« Un résultat potentiellement inférieur à 50% »
Les Sud-Africains devaient choisir parmi une cinquantaine de listes pour élire 400 députés à la proportionnelle. Ces derniers désigneront à leur tour le prochain président courant juin.
À Soweto, township symbole de la lutte contre l’apartheid, les fidèles âgés de l’ANC, qui ont connu la ségrégation, étaient les premiers au petit matin dans les bureaux de vote, suivis par d’autres électeurs souvent désabusés. Agnes Ngobeni, 76 ans, votera ANC aussi longtemps qu’elle sera en vie: « C’est le parti que j’aime, celui qui a fait de moi ce que je suis. »
Mais Kqomotso Mtumba, employée de banque de 44 ans, ex-électrice de la formation de Nelson Mandela, a désormais choisi un « nouveau parti » au programme séduisant. L’ANC « n’a pas tenu ses promesses, alors je vais essayer celui-là ». « On n’a pas de boulot, pas d’eau, rien ne marche », râle aussi Danveries Mabasa, chômeur de 41 ans.
Ce scrutin est « sans aucun doute le plus imprévisible depuis 1994 », même si l’ANC devrait rester le premier parti à l’Assemblée, relève l’analyste politique Daniel Silke.
Économie morose, scandales de corruption à répétition… Le parti au pouvoir risque d’obtenir « un résultat potentiellement inférieur à 50% ». Il serait alors contraint de former un gouvernement de coalition. Le DA, qui promet de « sauver l’Afrique du Sud » et son économie, pourrait rafler 25% des voix, selon les sondages. Les radicaux de gauche de l’EFF, eux, sont crédités d’environ 10%.
Mais la plus grande menace pour l’ANC pourrait provenir du petit parti populiste Umkhonto We Sizwe (MK), mené par l’ancien président Jacob Zuma, crédité de jusqu’à 14% des suffrages, qui grignote l’électoral traditionnel du parti au pouvoir sur sa gauche.
(avec AFP)
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