L’ANC a perdu sa majorité absolue en Afrique du Sud

Coup de tonnerre en Afrique du Sud : après trente ans de règne, le Congrès national africain (ANC), au pouvoir depuis l’avènement de la démocratie et l’élection de Nelson Mandela en 1994, a perdu sa majorité absolue à l’Assemblée nationale.

Le président sud-africain, Cyril Ramaphosa, face aux nouveaux membres de l’ANC lors de sa campagne en vue des élections générales de 2024, dans le township de Chatsworth, au nord de Durban, le 14 mai 2023. © Rajesh JANTILAL / AFP

Publié le 1 juin 2024 Lecture : 3 minutes.

C’est un revers historique. Selon les résultats quasi complets de la Commission électorale samedi, à plus de 99,5% du dépouillement à 14h GMT, l’ANC, parti historique, recueille 40,21% des voix, plongeant nettement sous la barre critique des 50%.

La plus grande formation d’opposition (Alliance démocratique, DA) rassemble 21,79% des suffrages exprimés. Le parti uMkhonto weSizwe (MK) de l’ex-président Jacob Zuma, né seulement quelques mois avant le scrutin, réalise une performance à 14,61%, tandis que les radicaux de gauche des Combattants pour la liberté économique (EFF) restent à 9,48%.

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Les résultats définitifs du scrutin le plus disputé de l’histoire démocratique du pays doivent être annoncés dimanche. Jusqu’à présent, l’ANC tout-puissant avait remporté chaque élection nationale avec une large majorité. Mais la désillusion des 62 millions de Sud-Africains a cette fois vaincu une loyauté longtemps infaillible envers le mouvement qui a libéré le pays du joug de l’apartheid.

La participation en baisse

Dans la deuxième puissance industrielle du continent, le chômage frappe un tiers de ceux en âge de travailler et plus particulièrement les jeunes. La pauvreté s’aggrave et les inégalités se creusent, tandis que la criminalité bat régulièrement ses propres records.

Au quotidien, les coupures répétées d’eau et d’électricité rappellent à quel point le rêve d’une nation dotée d’un accès pour tous à l’éducation, un logement et aux services de base, promise par l’ANC à la fin de l’apartheid, est encore hors de portée. Pire, la confiance s’est envolée à mesure qu’ont éclaté ces dernières années de multiples scandales de corruption impliquant des hauts dirigeants du parti et nourrissant les gros titres.

Appelés aux urnes mercredi, quelque 16 millions d’électeurs se sont déplacés, pour beaucoup avec une colère qui couvait depuis longtemps : l’ANC n’avait déjà rassemblé que 57% des suffrages exprimés aux dernières législatives de 2019, contre 70% en 2004. La participation s’établit pour l’instant à 58,6%, en baisse par rapport aux 66% lors du dernier scrutin.

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Vers un gouvernement de coalition ?

Après l’annonce des résultats finaux, les 400 sièges de députés seront répartis. La nouvelle Assemblée devra ensuite siéger courant juin pour élire le prochain président.

Les négociations entre partis ne sont pas encore entamées mais des canaux ont été ouverts, des discussions de personne à personne.

Helen Zille Membre du comité de tête de la DA

L’ANC, qui détient actuellement 230 sièges (57,5%), reste la plus grande formation politique. Mais dépouillé de sa stature de parti dominant, il devra entamer des négociations dans les prochains jours. À ce stade, les spéculations vont bon train sur la formation du prochain gouvernement, experts et observateurs misant sur la formation d’un gouvernement de coalition.

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Si l’ANC décide de se rapprocher de la DA, il devra faire des concessions au mouvement libéral qui prône la privatisation du secteur public et une dérégulation de l’économie. Un rapprochement avec l’EFF et le provocateur Julius Malema impliquerait des compromis sur des demandes de réformes radicales telles que la redistribution sans compensation des terres aux noirs et la nationalisation de secteurs économiques clefs. « Nous ne sommes pas désespérés et ne ferons aucun compromis sur nos revendications et nos principes », a martelé Julius Malema lors d’une conférence de presse samedi.

Largement en tête avec 45,90% des voix dans la province du KwaZulu-Natal (KZN, est), fief traditionnel de l’ANC (17,64%), le MK devient la troisième force du pays. Mais le président Cyril Ramaphosa, 71 ans, et Jacob Zuma, 82 ans, sont de vieux ennemis politiques et un apaisement des relations entre les deux hommes semble improbable.

L’idée que l’ANC puisse continuer à gouverner malgré la perte de sa majorité absolue, sur la base d’un accord avec certains partis sur des aspects clefs comme le budget ou un engagement à ne jamais soutenir de motion de censure, fait également son chemin.

« Un gouvernement minoritaire serait quelque chose de totalement nouveau en Afrique du Sud mais c’est une option parmi d’autres, a confirmé Helen Zille, dans le comité de tête de la DA. Les négociations entre partis ne sont pas encore entamées mais des canaux ont été ouverts, des discussions de personne à personne. »

(Avec AFP)

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