D’ex-rebelles du Liberia mêlés au massacre de Conakry ?

Selon plusieurs témoignages, des membres de l’ancienne rébellion du Liberia, l’Ulimo -soupçonnés de soutenir Dadis- ont été reconnus aux côté de la junte qui a perpétré violences et exactions lors du massacre du 28 septembre contre l’opposition lors d’une manifestation au stade de Conakry.

Publié le 10 octobre 2009 Lecture : 3 minutes.

D’anciens rebelles des guerres civiles au Liberia (1989-2003) ont participé, le 28 septembre à Conakry, à la répression sanglante d’une manifestation marquée par des atrocités inédites en Guinée, ont affirmé diverses sources concordantes.

Ce massacre en plein jour, dans le plus grand stade de Conakry, a fait officiellement 56 morts et 934 blessés, selon la junte au pouvoir depuis neuf mois en Guinée. Mais l’ONU et une ONG parlent de plus de 150 morts.

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"Cette barbarie, nous ne l’avions jamais connue en Guinée! Cela rappelle les techniques employées au Liberia", assure un dirigeant de l’opposition, François Lonsény Fall, qui a vu "des soldats violer des femmes avec des fusils, des bâtons".

Des membres de l’Ulimo reconnus

Un autre leader de l’opposition, Jean-Marie Doré, affirme "catégoriquement" qu’au moins deux des bérets rouges (garde présidentielle) qui l’ont roué de coups étaient "des éléments du Mouvement uni pour la démocratie au Liberia, l’Ulimo", une des principales factions qui luttaient contre le mouvement de Charles Taylor (le Front national patriotique du Liberia, NPFL, qui avait déclenché la guerre au Liberia fin 1989).

M. Doré assure avoir bien reconnu "les grigris, certains accoutrements, les fils au cou" que portent habituellement ces hommes et renchérit: "Ils étaient drogués à bloc, c’est aussi la marque de l’Ulimo".

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"L’un m’a dit: ‘toi, on te cherche depuis longtemps (…), je vais te tuer de deux balles dans la tête’. Son copain a dit ‘non, il faut l’égorger’ ". Or "les seuls qui ont un contentieux avec moi, ce sont les gens de l’Ulimo", ajoute M. Doré qui "soutenait" de son côté les NPFL de Taylor.

Des rapports complexes

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Voisine du Liberia, la Guinée a été très tôt contaminée par la guerre libérienne. Elle a abrité de nombreux combattants de ce conflit qui a duré 14 années et a été marqué par l’enrôlement d’enfants soldats et toutes sortes d’atrocités, des viols collectifs systématiques aux sacrifices humains.

D’une part, le président guinéen Lansana Conté (au pouvoir de 1984 jusqu’à sa mort en décembre 2008) a soutenu la création de l’Ulimo et supervisé la formation de ses éléments en Guinée. D’autre part, de nombreux habitants de la Guinée forestière ont rejoint les rebelles dirigés par Taylor. Puis, à la fin du conflit, des dizaines de milliers d’hommes sont revenus s’installer en Guinée.

"Des membres de l’Ulimo entourent actuellement le chef de la junte, le capitaine Moussa Dadis Camara, mais il y a aussi des Guerzé et des Toma (ethnies de la Guinée forestière) qui ont combattu avec les NPFL de Taylor", assure une source militaire, interrogée par l’AFP à Conakry sous couvert de l’anonymat.

"Ces gens cherchent du travail comme mercenaires, c’est pourquoi ils n’ont pas de pitié", poursuit ce militaire.

Dadis dément

"C’est bien la garde présidentielle dirigée par Aboubacar Diakité dit Toumba, avec des éléments de l’Ulimo et des NPFL, qui a fait ça, la tuerie" insiste cette source, qui ajoute: "La plupart des militaires qui crient ‘Dadis ou la mort’ ont été recrutés depuis le putsch de décembre, dans sa région natale, la Guinée forestière".

Le Guinéen Mamadi Kaba, représentant de la Rencontre africaine pour la défense des droits de l’Homme (Raddho), a recueilli "le témoignage d’un civil, employé dans un camp militaire, qui assure qu’il y avait au stade des soldats couverts de grigris qui parlaient entre eux en anglais ou dans une langue locale, et qu’il les a revus, depuis, dans un camp de Conakry".

Interrogé à ce sujet, le 4 octobre sur RFI, le capitaine Dadis Camara a déclaré: "Je n’ai jamais recruté des hommes, des rebelles! Je n’ai fait que réunir toutes les unités" de l’armée.

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