Obama renonce à moitié au bouclier antimissile
Le président américain a annoncé jeudi qu’il abandonnait le projet de bouclier antimissible européen initié par son prédécesseur George Bush. Il sera remplacé par un programme moins cher et plus adapté au péril représenté par le programme balistique iranien.
Le président Barack Obama a annoncé jeudi l’abandon d’un projet antimissile en Europe qui provoquait avec la Russie des tensions rappelant la Guerre froide, opérant un changement stratégique majeur fondé selon lui sur une réévaluation de la menace iranienne.
M. Obama a annoncé que ce projet, un motif de conflit considérable entre Washington et Moscou depuis son annonce en 2007 par l’administration Bush, était abandonné au profit d’un autre moins cher et plus adapté au péril représenté par le programme balistique iranien.
Multitude de questions
Cette décision a immédiatement soulevé une multitude de questions: sur un possible marchandage avec la Russie, qui pourrait se montrer un partenaire international plus conciliant, en particulier face à l’Iran; sur le respect par M. Obama des engagements internationaux pris par les Etats-Unis, envers la Pologne et la République tchèque par exemple, qui devaient accueillir les composantes du précédent projet; sur la fermeté de M. Obama en matière de sécurité nationale.
Le prédécesseur de M. Obama, George W. Bush, voulait installer en Pologne et en République tchèque 10 intercepteurs et un radar très perfectionné. Il s’agissait d’étendre un système déjà établi aux Etats-Unis, au Groenland et au Royaume-Uni pour protéger l’Amérique des missiles intercontinentaux. M. Bush justifiait l’extension du "bouclier" par la volonté de protéger les Etats-Unis mais aussi l’Europe des "Etats voyous", au premier rang desquels l’Iran.
Mais la Russie, qui a toujours contesté l’urgence du danger iranien, voyait dans ce projet une telle atteinte à sa sécurité qu’elle menaçait de braquer ses missiles sur les capitales européennes s’il se réalisait.
M. Obama, qui, depuis son investiture, s’emploie à remettre le compteur des relations avec la Russie "à zéro", a renoncé à ce projet après plusieurs mois de réexamen par son administration.
"Protection plus forte, plus intelligente et plus rapide"
La menace de missiles iraniens de longue portée n’est "pas aussi immédiate qu’imaginé auparavant", a expliqué son ministre de la Défense Robert Gates.
Aussi les Etats-Unis vont-ils déployer en Pologne et en République tchèque des missiles conçus pour détruire des engins à courte et moyenne portée: une première phase verra le déploiement de navires Aegis équipés d’intercepteurs SM-3; une deuxième phase, vers 2015, l’installation de SM-3 au sol, a expliqué M. Gates.
"Pour dire les choses simplement, notre nouvelle architecture de défense antimissile en Europe assurera aux forces américaines et aux alliés de l’Amérique une protection plus forte, plus intelligente et plus rapide", a dit M. Obama.
Cette annonce survient au moment critique où les représentants des Etats-Unis, de la Russie et de quatre autres puissances se préparent à s’asseoir à la même table que les Iraniens pour des discussions.
Obama rassure
M. Obama a dû souligner que sa "nouvelle approche" antimissile ne signifiait nullement un fléchissement face à l’Iran. Son porte-parole, Robert Gibbs, a dû démentir tout marchandage avec la Russie sous forme d’un abandon du projet Bush contre une coopération plus grande face à l’Iran.
M. Obama a aussi dû se montrer rassurant pour ses alliés, à commencer par la Pologne et la République tchèque et a invoqué l’article 5 de la charte de l’Otan qui affirme la solidarité des membres de l’Alliance en cas d’attaque.
Les dirigeants polonais et tchèques, qui n’ont guère paru surpris, ont pris acte. L’Otan a indiqué qu’elle allait examiner les conséquences et "revoir toute sa réflexion sur la défense antimissile". La chancelière allemande Angela Merkel a voulu voir dans la décision américaine l’espoir d’un rapprochement avec la Russie.
Mais la décision a provoqué une levée de boucliers chez les adversaires républicains de M. Obama. Pour le sénateur John McCain, son ancien rival à la présidentielle, cette décision "unilatérale est une grave erreur".
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