Un rapport brûlant sur la guerre mis au frais

Les parlementaires du Liberia étudieront en janvier un rapport qui, estiment certains, pourrait plonger le pays dans une nouvelle guerre. Ledit rapport recommande que huit ex-chefs de guerre soient jugés et que la présidente Sirleaf quitte le pouvoir.

Publié le 29 août 2009 Lecture : 2 minutes.

Six ans après la fin de la guerre civile au Liberia, les parlementaires ne sont pas pressés de rouvrir ce dossier brûlant: ils n’examineront qu’en janvier le rapport d’une commission recommandant que huit ex-chefs de guerre soient jugés et que la présidente quitte le pouvoir.

"Nous avons demandé à la présidente Ellen Johnson Sirleaf de ne pas agir tant que nous ne serons pas de retour des vacances", en janvier, a déclaré vendredi le député Wesseh Blamoh au nom des parlementaires.

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"Chaque membre du parlement va mettre ses vacances à profit pour consulter la population dans sa circonscription" a-t-il assuré. Une façon d’apaiser un peu les débats qui agitaient Monrovia.

Peur, amertume, suspicion

"Les réactions à la publication de ce rapport ont suscité la peur, l’amertume, la suspicion. Depuis, des Libériens se pointent du doigt les uns les autres tout en s’adonnant à la conspiration" estime ainsi le professeur d’université Amos Sawyer qui fut, en 1990, le premier président intérimaire du Liberia.

Depuis trois ans, la Commission Vérité et Réconciliation (Truth and Reconciliation Commission, TRC) était chargée d’enquêter sur les crimes commis de 1979 à 2003 dans le pays, dont les 14 ans de guerres civiles qui ont tué 250. 000 personnes.

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Dans son rapport final rendu public fin juin, la TRC a recommandé que huit ex-chefs de guerre comparaissent devant un tribunal spécial au Liberia pour "crimes contre l’humanité". Parmi eux figure l’ancien président libérien Charles Taylor, actuellement jugé à La Haye pour avoir dirigé en sous-main les rebelles sierra-léonais qui ont ravagé la Sierra Leone voisine de 1991 à 2001.

La commission a également souhaité que la présidente libérienne Ellen Johnson Sirleaf, élue en 2005, n’ait plus le droit d’occuper un poste officiel pendant 30 ans, en lui reprochant d’avoir financièrement soutenu la guerre civile au Liberia.

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Sirleaf coincée

Lors d’une audition en février devant la commission, Mme Sirleaf avait démenti avoir été membre du mouvement rebelle de Taylor. Mais elle avait reconnu l’avoir rencontré plusieurs fois pendant la guerre civile libérienne et admis avoir collecté des fonds pour lui lorsqu’il se préparait, dans les années 1980, à renverser le président Samuel Doe.

Depuis, la présidente s’est gardée de commenter elle-même le dossier.

Selon un diplomate africain en poste à Monrovia, "la présidente traverse actuellement une mauvaise passe". "Je crois qu’elle s’est mise la corde au cou. C’est elle qui a voulu la mise en place d’une Commission Vérité et Réconciliation pendant que les autres optaient pour une résolution des problèmes sous l’arbre à palabre", assure-t-il.

Le spectre d’une nouvelle guerre

"Elle ne savait pas qu’elle serait elle-même en butte aux accusations de la commission. C’est devenu un vrai problème parce que si elle s’arrange pour que le rapport de la TRC ne soit pas appliqué, cela voudra dire qu’elle opte pour l’impunité, ce qui est contre les principes de la démocratie".

Un député, James Benny, a récemment accusé le gouvernement de "négocier" pour que les parlementaires "tuent" ce rapport.

Il semble en tout cas improbable que le Parlement applique à la lettre les recommandations de la TRC. Car en son sein siègent des personnalités mises en cause. "Le gouvernement ne va pas adopter quelque chose qui ramènera le pays à la guerre", avait ainsi menacé, en juillet, le sénateur Prince Johnson, ex-chef de guerre responsable de la mort de centaines de Libériens.

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