Casimir Oyé Mba veut « moraliser la vie publique »
L’ancien Premier ministre gabonais, Casimir Oyé Mba, un des grands favoris de l’élection présidentielle du 30 août, a estimé dans un entretien à l’AFP qu’il faut « moraliser la vie publique », met en garde contre un « repli identitaire » et prévient des risques d’un scrutin biaisé.
"Il faut moraliser la vie publique gabonaise. La mauvaise gouvernance actuelle profite forcément à certains mais la plus grande majorité de la population n’y trouve pas avantage", affirme cet homme de 67 ans surnommé "Cam-la-Classe", un des barons du régime du président Omar Bongo, décédé en juin, et dont il a été Premier ministre et ministre à plusieurs reprises.
Il reconnaît pourtant que 40 ans au pouvoir d’Omar Bongo, "c’est trop".
"Il y a une trop grande complicité, connivence d’intérêts entre certains décideurs de l’Etat et les milieux d’affaires, gabonais ou étrangers", ajoute M. Oyé Mba, également ancien gouverneur de la Banque des Etats de l’Afrique Centrale (BEAC).
"Je ne veux pas dire qu’on va couper la tête à tout le monde, mais s’il est avéré que tel ou tel a mis la main dans la caisse. Il y a des lois. La loi s’applique à tout le monde. Pas seulement aux petits", souligne le candidat qui reconnaît être "préoccupé par l’avenir de son pays", à l’économie de rente touchée par la crise mondiale avec la chute des cours des matières premières.
"Il faut diversifier l’économie. En gérant bien, en dépensant intelligemment, en évitant les gaspillages, les doubles emplois, en luttant contre la corruption, l’activité informelle. On va dégager des ressources pour financer des activités, des infrastructures, des investissements".
Vers un repli indentitaire?
Quant au scrutin du 30 août, M. Oyé Mba, un Fang – l’ethnie à la majorité relative dans le pays (entre 30 et 40%) – "perçoit une tonalité identitaire inquiétante". "J’entends des slogans comme TSF (Tout sauf les Fang)", précise-t-il.
Omar Bongo, de l’ethnie minoritaire des Batéké, avait mis en place un système reposant sur un savant dosage des ethnies aux postes clé. Beaucoup d’observateurs craignent désormais un "repli identitaire", c’est-à-dire que les électeurs se déterminent en fonction de leur ethnie et de celui du candidat.
"Je suis né de race noire, Gabonais et Fang. Comme d’autres naissent Bapunu, Myené, Bakota. . . Je suis fier d’être Fang, je souhaite que le Bapunu soit fier d’être Bapunu. Je ne suis pas le candidat des Fang mais celui des Gabonais qui veulent un changement profond dans notre pays. Il y en a de toutes les ethnies", précise M. Oyé Mba.
"En réalité, il n’y a pas de problème. Les Gabonais se marient les uns avec les autres: Fang, Bakota, Obamba. . . La population de base est en avance par rapport à nous, les décideurs. C’est nous, hommes politiques, qui attisons ces phénomènes là! Parce qu’on veut des places: on veut être directeur, ambassadeur, colonel. . . président de la République".
Ali Bongo
M. Oyé Mba s’affirme "pas rassuré sur le caractère propre de l’élection parce que le gouvernement est manifestement partisan" d’Ali Bongo, fils du président défunt et investi par le Parti démocratique gabonais (PDG) dont M. Oyé Mba a vainement brigué l’investiture. Il s’est finalement présenté comme indépendant.
"Les Gabonais ont cette fois-ci l’impression que leur bulletin de vote pourra réellement signifier quelque chose. Pour cela, cette élection doit être particulièrement bien organisée, parfaitement propre, transparente et crédible. Les Gabonais veulent que celui qui sera proclamé élu, l’ait réellement été", analyse-t-il.
Et de prévenir: "S’il n’en était pas ainsi, la frustration qu’ils pourraient ressentir sera d’autant plus grande. Qui peut imaginer à quoi peut conduire cette frustration? Mais je ne souhaite pas malheur à mon pays".
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