Les jeunes Kényans veulent maintenir la pression après le limogeage du gouvernement
Bouleversée par les manifestations meurtrières, la « génération Z » aspire au changement, et les mesures annoncées par le président William Ruto pourraient ne pas suffire.
« Ruto doit partir. » Au lendemain de l’annonce par le président kényan, William Ruto, du limogeage de la quasi-totalité du gouvernement, les jeunes, fer de lance de la mobilisation contre les autorités, veulent maintenir la pression.
Le président kényan tente de contenir un mécontentement croissant. Il avait déjà annoncé le 26 juin le retrait d’un projet de budget controversé prévoyant des hausses d’impôts, au lendemain d’une journée de violences meurtrières marquée par l’assaut du Parlement par de jeunes manifestants.
Le gouvernement a été pris de court par l’ampleur de la contestation baptisée « Occupy Parliament » (« Occuper le Parlement »), née sur les réseaux sociaux après la présentation du budget au Parlement le 13 juin, et qui a trouvé un puissant écho au sein de la « génération Z » (terme qui désigne les jeunes nés après 1997).
Le président a annoncé, jeudi, le limogeage de la quasi-totalité de son administration, seuls le ministre des Affaires étrangères Musalia Mudavadi et le vice-président Rigathi Gachagua conservant leurs portefeuilles. William Ruto a également déclaré travailler à la constitution « d’un gouvernement à base élargie ».
« Nous ne pouvons pas lui faire confiance »
Mais cette annonce ne semble pas avoir convaincu la « génération Z ». « Nous serons de retour dans la rue jusqu’à ce que Ruto parte. Il a perdu deux ans de mandat à voyager et à mentir », lance Hyrence Mwangi, 25 ans. « Quand nous sommes descendus dans la rue pour la première fois, Ruto nous a qualifiés de bande de voyous et de criminels, pour ensuite revenir et commencer à dire qu’il apporterait des changements », soutient de son côté Jackson Rotich, 27 ans, avant de conclure : « Nous ne pouvons pas lui faire confiance. »
Melissa Agufana, étudiante en droit âgée de 24 ans, est de son côté plus mesurée à l’égard du président, le « remerciant d’avoir écouté », tout en ajoutant que les ministres avaient « perdu deux ans à ne rien faire ».
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« Apaiser la colère populaire »
Pour certains analystes, ces limogeages, une première depuis 2005 et la dissolution du gouvernement par le président Mwai Kibaki après le rejet par référendum d’un projet de Constitution, offrent la possibilité au chef de l’État de faire « table rase ». Mais cela comporte aussi des risques.
Après ces limogeages, « le défi auquel Ruto est désormais confronté est de former un nouveau gouvernement qui puisse inclure divers intérêts particuliers, tout en apaisant la colère populaire face à un mouvement explicitement sans leader », avait estimé Gabrielle Lynch, professeure de politique comparée à l’université britannique de Warwick.
Lors de l’assaut du Parlement, la police avait tiré à balles réelles sur la foule. Selon l’agence officielle de protection des droits humains KNHCR, 39 personnes sont mortes depuis la première manifestation le 18 juin.
« Nous n’aurons pas de repos tant qu’il [Ruto] n’aura pas limogé tous les hauts responsables de la police, à commencer par l’inspecteur général qui doit être poursuivi pour brutalités policières », lâche Cyrus Otieno, informaticien de 27 ans.
Après le retrait du projet de budget, William Ruto a annoncé une hausse des emprunts – d’environ 169 milliards de shillings (1,2 milliard d’euros) – ainsi qu’une baisse des dépenses de l’ordre de 177 milliards de shillings (1,3 milliard d’euros). Des mesures qui feront passer le déficit budgétaire de 3,3 % à 4,6 %, avait estimé le chef de l’État.
(Avec AFP)
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