Imane Khelif : ce qu’il faut savoir sur la polémique autour de la boxeuse algérienne aux JO 2024
L’hyperandrogénie de la boxeuse algérienne, qui concourt dans la catégorie féminine des olympiades de boxe, a provoqué une polémique qui démontre l’amalgame fait entre intersexualité et transsexualité.
C’est la séquence qui relance un débat des plus clivants. En huitième de finale du tournoi de boxe féminin 66 kg, l’Algérienne Imane Khelif s’est retrouvée face à l’Italienne Angela Carini. Khelif a très rapidement dominé la rencontre, avec des coups très puissants dans le visage de son adversaire, qui a dû renoncer à continuer le combat après moins d’une minute de match. Carini était inconsolable, en pleurs, à genoux au milieu du ring, tandis que Khelif venait de triompher.
Mais, encaissant mal la défaite de l’Italienne, certains commentateurs ont jugé cette victoire déloyale, considérant que la boxeuse Imane Khelif ne peut concourir dans la catégorie féminine au vu de son hyperandrogénie. Faisant l’amalgame entre intersexualité et transsexualité, beaucoup de personnalités ont eu des réactions transphobes, comme le politicien italien Matteo Salvini, la romancière J.K Rowling, ou encore même Donald Trump ou Elon Musk.
« Insultes et menaces pour avoir exprimé une opinion qui, je crois, est largement répandue parmi les Italiens : voir une femme concourir aux Jeux olympiques avec un boxeur trans est une folie inacceptable, le résultat de l’hypocrisie du politiquement correct », s’est insurgé Matteo Salvini .
Elle est cependant défendue par ses compatriotes, à l’image notamment du footballeur Ismaël Bennacer, sur les réseaux sociaux. « Soutien total à notre championne Imane Khelif, qui subit une vague de haine injustifiée. Sa présence aux Jeux olympiques est tout simplement le fruit de son talent et de son travail acharné. On croit en toi pour porter haut les couleurs de l’Algérie. »
Imane Khelif est-elle transgenre ?
Non. Même si les différentes instances internationales de boxe restent discrètes sur ce sujet, la boxeuse algérienne est considérée comme intersexe, ce qui signifie que ses caractéristiques sexuelles ne correspondent pas aux assignations binaires masculines ou féminines. Cependant, depuis sa naissance, elle est considérée et est déclarée à l’état civil comme de genre féminin, comme l’ont d’ailleurs démontré des médias algériens, photos à l’appui.
Cependant, sa production naturelle de testostérone est plus élevée que la moyenne, on parle alors dans ce cas d’hyperandrogénie. Cette situation concerne environ 5 % des femmes, et concernerait des femmes atteintes du syndrome des ovaires polykystiques (SOPK). Or le taux de testostérone chez les sportifs a son importance, car l’injection de cette hormone est reconnue comme une forme de dopage, et est donc très surveillée dans les compétitions internationales.
A t-elle le droit de concourir dans le tableau féminin ?
Tout à fait. Même si ça n’a pas toujours été aussi simple pour Imane Khelif. Par exemple, lors des Mondiaux de New Delhi, en Inde en 2023, elle aurait été disqualifiée en raison de « taux élevés de testostérone », avant de concourir pour la finale. La Fédération internationale de boxe (IBA) a d’ailleurs tenu à rectifier cette information dans un communiqué, expliquant qu’elle n’avait pas été « soumise à une analyse de la testostérone », mais à d’autres tests dont la nature n’a pas été précisée.
Alors que certaines fédérations sportives imposent à leurs athlètes de ne pas dépasser un seuil de testostérone pour participer, à l’instar de l’athlète hyperandrogène sud-africaine Caster Semenya, à qui l’on demande de faire baisser son taux de testostérone pour courir, le Comité international olympique est beaucoup moins strict sur le sujet.
En effet, le taux de testostérone naturel n’entre pas en jeu pour une participation aux Jeux olympiques, comme l’explique le porte-parole du CIO, Mark Adams, dans un communiqué : « De nombreuses femmes peuvent avoir un taux de testostérone égal à celui des hommes, tout en étant des femmes […] Je dirais simplement que toutes les femmes qui concourent dans la catégorie féminine respectent les règles d’admissibilité à la compétition. Ce sont des femmes dans leur passeport et il est indiqué que c’est le cas. »
Mais alors, est-elle imbattable ?
Pas du tout. Et en vérité, elle s’est déjà inclinée neuf fois en compétition, notamment contre la championne du monde de boxe irlandaise Amy Broadhurst, qui s’est d’ailleurs exprimée au sujet de l’Algérienne : « Je ne pense pas qu’elle ait fait quoi que ce soit pour tricher. Elle est née intersexe et, pour autant que nous sachions, elle aurait été élevée en pensant qu’elle était une femme. Personne ne connaît toute la vérité. […] Le fait qu’elle ait été déjà battue par neuf boxeuses en dit long. »
La boxeuse italienne Angela Carini a elle aussi refusé de rentrer dans la polémique après son combat : « Je ne suis personne pour juger ou prendre une décision, si cette femme est ici, il y a une raison. »
Maintenant que les différents points ont été mis au clair, le monde de la boxe et les amateurs de sport pourront analyser sereinement le quart de finale d’Imane Khelif, face à la Hongroise Anna Luca Hamori, le 3 août à 17 h 22 environ.
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