Yahya Sinwar, nouveau dirigeant politique du Hamas
Yahya Sinwar, considéré comme un cerveau de l’attaque du 7 octobre contre Israël, a été désigné, mardi 6 août, comme le nouveau chef politique du Hamas.
Yahya Sinwar, désigné mardi soir comme le nouveau chef politique du Hamas, a fait toute sa carrière dans l’ombre : celle des prisons israéliennes où il a passé vingt-trois ans, puis de l’appareil sécuritaire du mouvement islamiste palestinien où il se chargeait des purges.
Chef depuis 2017 du mouvement islamiste palestinien à Gaza, il est, à 61 ans, l’architecte du 7 octobre : ce jour-là, des centaines de commandos fondaient sur des kibboutz, des bases militaires et une rave-party en Israël qui vivait sa pire attaque contre des civils depuis sa création en 1948.
« C’est sa stratégie, c’est lui qui a monté l’opération » probablement pendant un an ou deux, explique Leïla Seurat, chercheuse au Centre arabe de recherches et d’études politiques (Carep), à Paris. L’homme « a imposé son tempo pour changer le rapport de force sur le terrain et a pris tout le monde par surprise », selon elle.
Celui qui est désormais « le visage du diable » ou le « mort en sursis », selon les termes de l’armée israélienne, n’est pas apparu en public depuis octobre. « C’est l’homme de sécurité par excellence » qui, avec un « charisme de leader », « prend des décisions dans le plus grand calme », affirmait Abou Abdallah, un ex-codétenu du Hamas, en 2017.
Radical et pragmatique
En 1987, la première Intifada (le soulèvement contre l’occupation israélienne) éclate dans un camp de réfugiés du nord de la bande de Gaza. L’enfant, né à Khan Younès, un camp du sud du territoire, rejoint le Hamas tout juste fondé.
À 25 ans, il dirige déjà l’Organisation du jihad et de la prédication, l’unité de renseignement du Hamas qui punit les « collaborateurs », ces Palestiniens châtiés pour intelligence avec l’ennemi israélien. En 1988, il fonde Majd, le service de sécurité intérieure de l’organisation islamiste.
Incarcéré en 1989, il s’impose en leader des prisonniers. Condamné plusieurs fois à la perpétuité, il sort en 2011 avec un millier de détenus libérés par Israël, en échange du soldat Gilad Shalit, otage du Hamas pendant cinq ans.
Yahya Sinwar voit Israël éliminer ses mentors, notamment le cheikh Ahmed Yassine, fondateur du Hamas, et Salah Chehadé, fondateur des brigades Ezzedine al-Qassam, branche armée du mouvement, dont il passe pour le bras droit. Placé sur la liste américaine des « terroristes internationaux », il fait l’objet de multiples tentatives d’assassinat.
Élu en 2017 chef du Hamas à Gaza, il impulse une stratégie « radicale sur le plan militaire et pragmatique en politique », décrypte Leïla Seurat. « Il ne prône pas la force pour la force » mais « pour amener [les Israéliens] aux négociations ».
Les médias israéliens ont publié des extraits de ses interrogatoires. Il y raconte avoir enlevé un traître, conduit au cimetière de Khan Younès : « Je l’ai mis dans une tombe et étranglé avec un keffieh. (…) J’étais sûr qu’il savait qu’il méritait de mourir ».
Pour une direction palestinienne unie
Sur le plan politique, il prône une direction palestinienne unie pour tous les Territoires occupés : la bande de Gaza, tenue par le Hamas, la Cisjordanie, administrée par le Fatah de Mahmoud Abbas, et Jérusalem-Est. « Il a fait savoir qu’il punirait quiconque tenterait d’entraver la réconciliation avec le Fatah », rappelle le European Council on Foreign Relations (ECFR).
À son élection à la tête du Hamas à Gaza, le mouvement accepte le principe d’un État palestinien dans les frontières de 1967, mais conserve comme but ultime la « libération » de tout le territoire de la Palestine de 1948, incluant le territoire israélien actuel.
Coûte que coûte, il entend forcer Israël et le monde à s’intéresser au sort des Palestiniens. La stratégie de la respectabilité des « politiques » du Hamas échoue : il choisira alors la violence. Sur fond de désintérêt mondial pour la cause palestinienne et d’une normalisation naissante des relations entre des États arabes et Israël, il pousse, en 2018 et 2019 pour les « Marches du retour ». Les affrontements le long de la barrière de séparation avec Israël font près de 300 morts à Gaza.
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Le 7 octobre, l’organisation islamiste lance son attaque en faisant exploser le check-point qui garde la frontière avec la bande de Gaza, sous blocus depuis 2007. La riposte israélienne aura alors comme objectif la « destruction » du Hamas.
(Avec AFP)
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