« Je veux faire la musique comme lui » : cinq ans après sa mort, les fans de DJ Arafat toujours au rendez-vous
Décédé le 12 août 2019 dans un accident de moto, l’artiste ivoirien a laissé une empreinte indélébile sur la Côte d’Ivoire. Ce lundi, ses fans lui ont rendu hommage, entre le carrefour où il a trouvé la mort et le bar de sa mère, Tina Glamour.
Jusqu’en 2019, ce n’était qu’un carrefour anonyme, comme Abidjan en compte des centaines. Mais depuis le 12 août 2019, il est devenu officieusement « le carrefour Arafat », celui où le roi ivoirien du coupé-décalé s’est crashé en moto, à l’âge de 33 ans.
Des Chinois qui n’ont pas oublié
Ce lundi matin, pour le cinquième anniversaire de sa mort, ils étaient des centaines à s’être réunis sur les lieux pour une marche blanche, organisée par sa mère, Valentine Logbo, dit Tina Glamour, artiste ivoirienne. Commencée au petit matin, la marche s’est prolongée en commémoration informelle jusqu’au soir. Les « Chinois » – Arafat surnommait ses fans ainsi en référence à leur nombre – sont de tout âge, mais la plupart sont jeunes, parfois adolescents. Chaque 12 août depuis 5 ans, cette rue devient leur lieu de pèlerinage. Ils viennent s’y recueillir sous la pancarte à l’effigie de leur idole, située précisément au point du crash. Ils y déposent des fleurs et prennent des selfies. Certains viennent parader avec des cortèges de deux roues, car DJ était un grand féru de moto. Certains fans ressemblent même suffisamment à DJ Arafat pour se présenter comme ses « sosies officiels » et prendre des selfies avec d’autres fans. La foule réunie entonne des chansons de la star.
« C’était notre idole! Il a apporté beaucoup à la jeunesse ivoirienne. Il chantait pour nous, il s’adressait à nous, il nous motivait avec sa musique. Il ne méritait pas de partir si tôt. C’était un grand homme. » Ainsi parle Chikominko, un jeune fan qui veut emboîter le pas à son idole : « Je veux faire la musique comme lui, je m’habille comme lui, je me coiffe comme lui. »
Le King n’est pas mort
Un peu plus loin, après la marche blanche, Tina Glamour a invité les fans dans son bar, le Desaltero, pour une animation DJ. Devant le troquet, sur les sons de DJ Arafat, sa maman, certains membres de la Yorogang (un de ses albums), ses compagnons et ses « Chinois », dansent. « Je suis fier de mon fils, Ange Didier Houon dit DJ Arafat, il reste une icône de la jeunesse et de la musique ivoirienne, il demeure le King du coupé-décalé », confie Tina Glamour. Plusieurs amis et collaborateurs du défunt ont fait le détour pour célébrer sa mémoire avec les fans, ils ont vibré sous les animations de Mano Dénon, le DJ personnel de la star, venu lui aussi rendre hommage à l’artiste parti trop tôt. « Je suis contente parce que les « Chinois » ont répondu à l’appel, d’abord au cimetière et ensuite à la marche blanche », se félicite Tina Glamour qui a également épuisé son stock de T-shirts à l’effigie de son fils…
Une marque indélébile
Il faut dire que l’empreinte laissée par DJ Arafat sur la musique, et plus généralement la culture ivoirienne, semble encore indélébile. Il a propulsé le coupé-décalé à l’international. Le « Daïshikan », comme il se faisait appeler, a collaboré avec plusieurs artistes internationaux, tels que la superstar nigériane Davido, la star de la rumba congolaise Fally Ipupa, le duo togolais Toofan, le rappeur franco malien Mokobé, les franco congolais Dadju et Naza, et le groupe de rap ivoirien Kiff no beat.
DJ Arafat a même été le créateur du mouvement de danse appelé « Roukaskas » – un pas de danse de coupé-décalé rappelant le break dance. L’interprète de « Jonathan » ou encore « Djessimidjeka » a influencé plusieurs artistes de la nouvelle génération de musique ivoirienne et même de la diaspora. « Les nouveaux genres musicaux comme le « Maïmouna » que les jeunes artistes ivoiriens pratiquent est inspiré du coupé-décalé et surtout d’Arafat », vante Mano DJ installé aux platines devant le bar de Tina Glamour. L’influence de DJ Arafat porte au-delà de la sphère du coupé décalé, plusieurs jeunes artistes de la nouvelle scène musicale ivoirienne clament avoir été encouragés et inspirés par sa musique.
Pas de deuxième Arafat
« DJ Arafat est venu avec son style, il est parti avec son style, on n’aura pas un deuxième Arafat, analyse Serge Nguessant, journaliste culturel. Lui seul avait le secret de la manière d’entretenir ses fans ». Mais si cette année, bien que les « Chinois » aient été au rendez vous, force est de constater que la mobilisation décroît. Et même si Tina Glamour a affirmé avoir été soutenue par le ministère de la Culture pour l’organisation de cette marche blanche, aucune présence d’officiels n’a été remarquée. Certains conflits, entre Tina Glamour et des compagnons de son fils, ont pu avoir une influence sur la mobilisation. Reste qu’au Desaltero, la fête continuera quand même jusqu’au petit matin.
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