Au Nigeria, l’avion présidentiel… et le crash de Tinubu ?

L’acquisition d’un nouvel appareil présidentiel par l’administration nigériane a réveillé la grogne sociale qui secouait le pays il y a quelques semaines. La presse et les réseaux s’indignent.

© Damien Glez

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Publié le 28 août 2024 Lecture : 2 minutes.

À ceux qui entendent diriger un État soumis aux critiques de l’opinion, les sciences politiques enseignent l’importance du timing. Dix-huit mois à peine après son accession au pouvoir, le président de la République du Nigeria déconcerte les médias et agace les internautes.

Simple hasard du calendrier ? L’actualité 2024 du pays le plus peuplé d’Afrique a déjà été marquée par la concomitance de deux événements : un mouvement de grogne sociale qui semble toujours couver sous la cendre et l’apparition d’un nouvel avion présidentiel…

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C’est à l’occasion d’un bref séjour de travail de Bola Tinubu, à la mi-août en France, que le Nigérian lambda a pu découvrir, sur le tarmac de Nice, l’Airbus A330 de la présidence nigériane, et les journaux d’évoquer la somme de 100 millions de dollars pour l’acquisition de cet appareil qualifié de « flambant neuf ». « Extravagance ! » s’indignent des abonnés du réseau X…

Crise indigeste

Le Nigeria subit actuellement une crise économique que les spécialistes présentent comme la pire depuis les années 1990, avec une inflation à son plus haut niveau, depuis plusieurs décennies. Selon la Banque mondiale, plus de 40% de la population vivrait sous le seuil de pauvreté. Or, des citoyens descendus récemment dans la rue pour protester contre la vie chère évoquent déjà l’idée de remettre le couvert en octobre.

L’exhibition de l’aéroplane leur donne du grain à moudre alors que le début du mandat présidentiel actuel avait déjà été accompagné d’un sentiment de « brutalité » économique, lorsque les subventions sur les carburants avaient été suspendues.

Dans un pays marqué par de profondes inégalités sociales et des soupçons permanents de corruption politique généralisée, il ressort des articles de presse ainsi que dans des forums internet que le régime Tinubu apparaît détaché des citoyens en difficulté. Dans l’acquisition de l’Airbus, un internaute lit « un manque d’égard du gouvernement envers la misère du peuple ». Un ancien ministre de l’Éducation, Oby Ezekwesili, y voit, lui, un symbole de « l’imprudence fiscale et de la malhonnêteté » de l’administration actuelle.

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Ce qu’enseignent les sciences politiques, en plus du sens du timing, c’est l’art de la réponse, au risque de noyer quelques poissons dans le jargon technocrate ou de verser dans la démagogie. Dans le dossier de l’Airbus présidentiel, la justification du porte-parole de la présidence semble, elle aussi, déconnectée de la réalité du quotidien des Nigérians : acquise sur recommandation du comité de sécurité du Sénat, la bonne affaire aurait été « achetée bien en dessous du prix du marché ». Achète-t-on un bien parce qu’il est en promotion ou parce qu’on en a besoin… ?

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