François Fillon parle coopération mais zappe les droits de l’Homme
La visite de travail du premier ministre français en Tunisie a été marquée, jeudi, par la signature de divers accords de coopération, notamment dans le domaine du nucléaire et des transports. En revanche, pas un mot sur l’épineuse question des droits de l’Homme.
François Fillon a entamé jeudi une visite de travail en Tunisie avec la signature d’accords de coopération dont certains dans le but de décrocher à plus ou moins long terme de nouvelles parts d’une économie prospère, en évitant soigneusement la question des droits de l’Homme.
Le Premier ministre français et son homologue tunisien Mohamed Ghannouchi se sont réjouis de "l’exemplarité" de la relation entre les deux pays. M. Fillon a a évoqué une "coopération gagnant-gagnant" en réponse à M. Ghannouchi qui célébrait une "concordance" totale "de vues et d’analyses".
"Les échanges sont à un niveau historique", a même dit M. Fillon.
Accords sur le nucléaire et les transports
Pour concrétiser cette entente idyllique qui n’est pas sans ambitions commerciales pour Paris, les deux gouvernements ont paraphé plusieurs accords dont certains avaient été mis sur les rails lors de la visite du président Nicolas Sarkozy, il y a tout juste un an.
C’est le cas dans le nucléaire civil, la France espérant à terme obtenir la construction d’une centrale d’ici 2020. Paris a également des ambitions dans le domaine des transports, objet d’un autre accord-cadre, avec le projet d’extension du tramway à Tunis et l’équivalent du RER parisien.
En direction des PME tunisiennes qui participent à une croissance estimée à 3% cette année (4,5% selon des statistiques tunisiennes) malgré la crise, la France débloque une aide de 40 millions d’euros liée à l’obligation de se fournir auprès d’entreprises françaises.
Les droits de l’Homme passés sous silence
M. Fillon, qui est accompagné d’une cinquantaine de chefs d’entreprise, a en revanche soigneusement évité la question des droits de l’Homme, au centre de critiques récurrentes d’organisations internationales et des opposants au régime de Zine El Abidine Ben Ali, dont des portraits géants ornent la capitale et qui brigue à l’automne un cinquième quinquennat consécutif.
M. Fillon n’en a pas dit un mot devant des étudiants tunisiens réunis à la Cité des Sciences qui avaient pour "recommandations officieuses", selon l’un d’entre eux, de ne pas en parler.
En avril 2008, le président Nicolas Sarkozy s’était risqué sur ce terrain pour louer les "efforts" de la Tunisie, déclenchant une polémique.
En revanche, le Premier ministre n’a pas échappé à une question sur le nombre "trop réduit" de visas d’études accordés par la France à une jeunesse durement touchée par le chômage.
M. Fillon s’en est défendu en avançant le chiffre de 7% d’augmentation en 2008 et a mis en avant la coopération très forte en matière d’enseignement supérieur et de formation professionnelle, qui représentent 60% de l’aide française, laquelle s’est traduite par un nouvel accord global de coopération.
"Gestion maîtrisée des flux migratoires"
Le chef du gouvernement a aussi insisté sur la stratégie française de "gestion maîtrisée des flux migratoires" qui a fait l’objet d’un accord de mise en oeuvre, un an après avoir été conclu par M. Sarkozy. Il prévoit 40 millions d’euros sur trois ans pour des projets de développement à destination des jeunes dans le but avoué de limiter l’immigration économique.
Par ailleurs, l’Agence française de développement (AFD) a signé trois conventions d’aide d’un montant de 80 millions d’euros dont 65 millions dédiés à la gestion de l’eau.
Vendredi, M. Fillon devait être reçu par M. Ben Ali avec qui il devait évoquer des dossiers diplomatiques dont l’Union pour la Méditerranée (UMP), en panne depuis la crise de Gaza, et dans laquelle la Tunisie est très impliquée.
Après cette visite de travail qui prend fin vendredi soir, M. Fillon restera en Tunisie pour un week-end privé, a indiqué Matignon.
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