Au Burkina, la mention « Cedeao » disparaît des passeports
Le pays des Hommes intègres émet son passeport électronique de nouvelle génération sur lequel ne figure plus le sigle de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest. Ultime pied de nez à l’organisation ?
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 4 septembre 2024 Lecture : 2 minutes.
Pour son document d’identité à usage international, le Burkina Faso s’offre une débauche de modernité administrative : passeports biométriques en polycarbonate colorisé munis de puces électroniques de grande capacité de stockage de données, « supports réalisés avec l’intelligence artificielle intégrée qui permet de rester connecté au reste du monde », selon la société Emptech qui fabrique le nouvel objet.
Autre nouveauté de nature à soulager les citoyens résignés aux longues files d’attente : le système d’émission automatisé permet le pré-enrôlement en ligne et la connexion de kits d’enrôlement qui seront disposés dans certaines représentations diplomatiques à l’étranger, afin de faciliter la collecte et la transmission des données vers l’Office national d’identification (ONI) et le ministère des Affaires étrangères.
C’est ce 3 septembre qu’a été officiellement lancée cette nouvelle génération de passeports burkinabè qui respecte les normes édictées par l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI). Le document est le fruit de la coopération sino-burkinabè, à travers la société Emptech.
AES toute !
Les observateurs ont tôt fait de remarquer que la mention « Cedeao » ne figurait plus sur la couverture du passeport. Rien que de très logique, le Burkina Faso ayant officiellement claqué la porte de la communauté sous-régionale. L’information fera peut-être quand même grincer les dents de ceux qui espéraient encore une réintégration du Mali, du Niger et du Burkina dans l’organisation.
En juillet dernier, depuis Accra, c’est sous la forme de menaces que le président de la Commission de la Cedeao avait évoqué les contraintes auxquelles seraient confrontés les voyageurs des membres de l’Alliance des États du Sahel (AES) : « Les citoyens de ces pays pourraient ne plus être en mesure de résider ou de créer librement des entreprises dans le cadre des facilités mises en place par la Cedeao ». Omar Alieu Touray avait ajouté que le retrait des pays sahéliens affecterait « les conditions de voyage et d’immigration des citoyens de ces trois pays, car ils auront désormais à mener des démarches en vue de l’obtention d’un visa avant de voyager dans la sous-région ».
Le Burkina devrait, toujours selon le président de la Commission « cesser d’utiliser le passeport de la Cedeao, la carte d’identité nationale biométrique de la Cedeao et l’assurance automobile carte Brune de la Cedeao ». « Chiche ! », semble avoir répondu Ouagadougou, devançant ainsi l’iguane dans l’eau. L’avènement de ce passeport burkinabo-burkinabè constitue-t-il le point de rupture final avec la Cedeao ? Présent à la cérémonie de lancement du nouveau passeport, le ministre burkinabè de la Sécurité ne s’est pas senti obligé de le surligner, pensant certainement que le triple message du jour était clair.
Primo, le Faso – qui annonce également la délivrance des extraits de casiers judiciaires via la plateforme ecasier-judiciaire.gov.bf – emprunte clairement le chemin de la modernité. Secundo, si le capitaine Ibrahim Traoré a renoncé à se rendre au Forum de coopération sino-africaine (Focac), son pays affirme son intention de coopérer avec de nouveaux partenaires comme la Chine. Tertio, la locomotive de l’AES est définitivement lancée sur les rails de la confédération… « Je pensais que ce passeport allait porter le logo de l’AES », s’étonne d’ailleurs un internaute burkinabè…
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