Mutinerie dans un camp militaire aux portes de la capitale
Des soldats malgaches, traditionnellement loyalistes, ont déclenché une mutinerie dans un important camp militaire situé aux portes d’Antananarivo, pour protester contre la répression par le gouvernement des de l’opposition depuis trois mois.
Les accès à ce camp – le CAPSAT (Corps d’Administration des Personnels et Services de l’Armée de Terre), considéré comme le "poumon de l’armée malgache" et situé à environ six kilomètres du centre de la capitale – étaient bloqués dimanche par des soldats mutins, a constaté un journaliste de l’AFP.
"Nous ne répondons plus aux ordres de nos supérieurs, nous répondons à notre coeur. Nous avons été formés pour protéger les biens et les personnes, pas pour tirer sur les gens. Nous sommes avec la population," a déclaré un soldat.
Un journaliste de l’AFP a réussi à pénétrer dans une aile de l’enceinte militaire, où des soldats, s’exprimant sous couvert d’anonymat, ont confirmé qu’ils se rebellaient contre la répression gouvernementale des manifestations de l’opposition.
"Le chef d’état-major de l’armée est venu ce matin pour tenter de nous amadouer mais il est vite reparti dans sa voiture", a ajouté un autre soldat.
Plusieurs témoins ont constaté que des soldats s’étaient déployés autour de la base, se préparant vraisemblablement à des représailles de la garde présidentielle, mais aucun coup de feu n’a été entendu depuis le début de la mutinerie dimanche.
Mais le commandant de ce corps autonome recevant ses ordres directement de la Présidence a fait diffuser dimanche soir un communiqué à la radio malgache.
"Face aux rumeurs qui disent que la garde présidentielle va attaquer les camps militaires (. . . ), je réponds que ce n’est pas vrai, que l’on n’a jamais eu l’intention de faire ça", a déclaré le général de Brigade Alain Randriamory.
La mutinerie semble limitée à ce camp et aucun mouvement n’a été rapporté dans d’autres bases militaires autour de la capitale et dans le reste de l’île.
Madagascar a une longue Histoire d’instabilité politique, mais jusqu’à présent les militaires sur cette île pauvre de l’océan Indien étaient réputés pour leur loyauté au régime.
Aucune réaction officielle n’a été communiquée après ce nouveau regain de tension à Madagascar.
Samedi, l’opposant malgache Andry Rajoelina, menacé d’arrestation, avait déclaré à l’AFP qu’il était désormais "caché en lieu sûr", et a appelé à un élargissement du dialogue pour sortir l’île de la crise.
Jeudi soir, le jeune chef de l’opposition, 34 ans, aurait échappé à une tentative d’arrestation, selon plusieurs sources concordantes, et ses partisans avaient installé vendredi des barrages dans tout le quartier entourant sa résidence pour le protéger.
Depuis mercredi, les forces de l’ordre bloquent complètement l’accès au centre-ville, interdisant tout rassemblement et provoquant des affrontements avec les manifestants.
Les représentants de M. Rajoelina boycottent depuis jeudi les discussions avec les délégués du président Marc Ravalomanana, dont ils réclament le départ.
"Aucune des deux parties ne peut cautionner l’avenir de Madagascar. Si le président démissionne ou si j’arrête mon mouvement, cela ne voudra pas dire que cela serait fini", a déclaré M. Rajoelina.
Selon plusieurs responsables et témoins, les forces de sécurité ont également effectué samedi des opérations dans les bureaux de la télévision Viva de Rajoelina où elles ont confisqué les équipements qui s’y trouvaient.
Un conflit larvé entre MM. Ravalomanana et Rajoelina s’est transformé en crise ouverte mi-décembre, après la fermeture par les autorités de cette même télévision.
Depuis, M. Rajoelina, qui a été destitué par le gouvernement de son poste de maire le 3 février, a multiplié les manifestations à Antananarivo et s’était également autoproclamé en charge des affaires du pays.
Au total, une centaine de personnes sont mortes à Madagascar depuis le 26 janvier dans les violences qui ont émaillé ce conflit.
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