Mandat de la CPI contre Béchir: division de la communauté internationale

« Opportunité » pour la paix pour les ONG, « menace aux yeux des partenaires du Soudan, soutien à la lutte contre l’impunité de la part des Occidentaux: les réactions au mandat d’arrêt contre le président soudanais illustrent les divisions internationales sur le conflit du Darfour.

Publié le 4 mars 2009 Lecture : 3 minutes.

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Mandat d’arret contre Béchir: les réactions

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Redoutant une flambée de violence, le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon a appelé Khartoum à "assurer (. . . ) la sécurité de la population civile et des personnels de l’ONU", dès l’annonce de la Cour pénale internationale (CPI), qui a émis un mandat d’arrêt contre Omar el-Béchir.

"Des violences supplémentaires contre les civils et les intérêts étrangers (. . . ) ne seront pas tolérées", a prévenu Washington, appelant "à la retenue".

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Sans surprise, le Soudan s’est partagé entre partisans et adversaires du président Béchir face à la CPI, qui l’accuse de crimes de guerre et crimes contre l’humanité au Darfour (ouest soudanais), en guerre civile depuis 2003.

"C’est une grande victoire pour les victimes du Darfour et du Soudan", a lancé le chef rebelle Abdel Wahid Mohammed Nour. Le Mouvement pour l’égalité et la justice (JEM), qui vient de conclure un accord avec Khartoum, juge qu’il ne peut plus négocier avec quelqu’un qui "a perdu sa légitimité".

Des cris de joie ont retenti dans un camp de réfugiés darfouris au Tchad. "On attendait cette décision avec impatience", s’est réjouie Khadija Djmet Ibrahim, qui dit avoir "perdu quatre parents à cause de Béchir".

Manifestation d’hostilité envers la CPI, en revanche, à Khartoum, où des milliers de manifestants ont promis de "protéger le président Béchir jusqu’à la dernière goutte de (leur) sang".

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Comme prévu, le chef de la diplomatie soudanaise Ali Karti a opposé un "refus total de la décision de la CPI" qui "n’a pas compétence sur le Soudan". Il a annoncé qu’Omar el-Béchir se rendrait au sommet arabe de Doha fin mars.

La communauté internationale a émis des réactions également dissonantes.

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Les capitales occidentales ont pris acte de la décision avec une satisfaction mesurée au nom de la lutte contre l’impunité. Comme l’ONU, elles demandent au Soudan de "coopérer" avec la justice internationale, insistant sur son "indépendance".

Londres a regretté que Khartoum "n’ait pas pris ces accusations au sérieux". Paris a demandé "instamment au Soudan de coopérer pleinement avec la CPI pour la mise en oeuvre" de ses décisions. "Ceux qui ont commis des atrocités doivent être présentés à la justice", a estimé Washington.

"La lutte contre l’impunité est indissociable de la recherche de la paix", a renchéri Paris, mais "il ne saurait y avoir d’autre solution que politique à la crise du Darfour".

Pour les partenaires de Khartoum, il y a menace des efforts de paix.

"La décision inopportune de la CPI créera un dangereux précédent (. . . ) et risque d’avoir des conséquences négatives sur le Soudan", a ainsi protesté l’émissaire russe pour le Soudan Mikhaïl Marguelov.

De même, l’Union africaine (UA) y voit une "menace pour la paix". "Les impératifs de justice ne peuvent ignorer les impératifs de paix", dit le président de la Commission de l’UA Jean Ping, déplorant que la CPI ne s’intéresse qu’à l’Afrique "comme si rien ne se passait ailleurs".

Des démarches sont déjà entreprises auprès du Conseil de sécurité de l’ONU pour "suspendre et différer" les poursuites de la CPI, comme le permet son statut, a rappelé Ping. Même initiative du côté du Caire qui se dit "très troublé".

Quant aux organisations de défense des droits de l’Homme, majoritairement favorables au mandat d’arrêt, une première de la CPI contre un chef d’Etat en exercice, elles ont salué "un signal important", selon les termes d’Amnesty International. "Même les présidents n’ont plus les mains libres pour commettre des crimes horribles", s’est félicité Human Rights Watch.

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