Le Soudan inaugure son grand barrage en défiant la justice internationale

Le Soudan a lancé en grande pompe mardi la production électrique au grand barrage de Méroé, le plus important chantier sur le Nil depuis 40 ans, son président Omar el-Béchir en profitant pour fustiger la justice internationale qui le menace.

Publié le 3 mars 2009 Lecture : 2 minutes.

Un géant de béton se dresse désormais à 400 kilomètres au nord de Khartoum. Ce projet controversé de plus de deux milliards de dollars, financé à l’ombre des sanctions américaines, doublera à terme la capacité électrique du pays. Il a entraîné l’inondation de villages et le déplacement de milliers de paysans.

« Chaque fois que l’Occident imposera une sanction ou une résolution contre nous, nous répliquerons avec de grands projets de développement » comme Méroé, a déclaré le président Omar el-Béchir lors de son discours d’inauguration.

la suite après cette publicité

Des milliers de Soudanais et le gotha diplomatique ont assisté au lancement de ce barrage, considéré comme l’un des plus importants projets depuis l’indépendance du Soudan en 1956 et le plus vaste chantier sur le Nil depuis la construction du grand barrage d’Assouan (Egypte) à la fin des années 60.

Ce projet pharaonique arrive à point nommé pour le président soudanais. La Cour pénale internationale (CPI) doit décider mercredi d’émetre ou non un mandat d’arrêt contre Omar el-Béchir, accusé de génocide, crimes de guerre et contre l’humanité au Darfour, région de l’ouest soudanais en proie à une guerre civile à l’origine de 300. 000 morts depuis 2003 selon l’ONU, 10. 000 selon Khartoum.

« Toute décision de la CPI n’aura aucune valeur pour nous, a lancé M. Béchir en pointant la foule avec sa traditionnelle canne. Elle ne vaudra pas l’encre avec laquelle elle aura été écrite. « 

« Nous sommes tous avec toi », pouvait-on lire sur des milliers d’affiches à l’effigie du président, distribuées à la foule compacte. Des photos du procureur de la CPI, Luis Moreno-Ocampo, barrées d’un X rouge jonchaient le sol, piétinées par les milliers de personnes présentes.

la suite après cette publicité

Une marionnette grandeur nature du procureur, derrière laquelle étaient placées deux fausses roquettes baptisées Béchir-1 et Béchir-2, a aussi été incendiée.

Le président, qui courtise la population dans son bras de fer avec la communauté internationale, a promis des réductions de 25 à 30% des factures d’électricté, un geste exceptionnel alors que le pays est frappé de plein fouet par la crise économique.

la suite après cette publicité

Mais d’autres ont fait les frais de la construction du barrage, qui a englouti des villages entiers et forcé le déplacement de 40. 000 personnes. De émeutes ont fait au moins trois morts et des dizaines de blessés en 2006 parmi des villageois qui s’opposaient à leur expulsion.

Des villages ont été construits dans le désert mais de nombreux expulsés ont refusé de s’y installer.

« Il y a des gens qui ont tout perdu », lance Ali Askouri, porte-parole d’un groupe de déplacés. « Ils vivent comme des sans-logis à proximité du réservoir, ils ne veulent pas être relogés dans le désert », explique-t-il à l’AFP.

Méroé symbolise aussi les relations stratégiques entre la Chine et le Soudan. Le barrage a été construit par un consortium d’entreprises chinoises supervisées par le groupe allemand Lahmeyer. Quelque 2. 000 Chinois travaillent toujours sur le site, pour les finitions. La France est également présente à travers le groupe Alstom, qui a construit les 10 turbines du barrage, dont deux ont été mises en service mardi. Ce contrat est évalué à 270 millions d’euros.

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires