Tnterdiction du bois à brûler, N’Djamena marche sur des charbons ardents

Le mécontentement monte à N’Djamena où les autorités ont interdit sans concertation l’utilisation du charbon et du bois vert pour lutter contre la déforestation. Une mesure qui touche durement les classes les moins favorisées et crée une situation de pénurie.

Publié le 25 février 2009 Lecture : 2 minutes.

"C’est trop brutal ! On ne peut pas changer d’habitudes du jour au lendemain", affirme à l’AFP Brigitte Topinanty Dionadji, consultante aux ministères de l’Action sociale et de l’Agricuture. "Il faut lutter contre la désertification, mais il aurait fallu des campagnes de sensibilisation, une transition. . . C’est un grave problème social. Ce sont les gens les plus démunis qui sont touchés".

En décembre, pour l’exemple, les autorités ont ordonné de brûler les véhicules transportant du charbon. A Walia, à l’entrée sud de N’Djamena, les carcasses de quatre mini-bus sont encore visibles. Des forces de sécurité contrôlent toujours la route d’entrée de la capitale.

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"Depuis janvier, plus personne n’essaie de passer avec du charbon. Au début, on a arrêté beaucoup de gens", confie l’officier Djidi Toulaye.

Interdiction d’entrée pour le charbon et le "bois vert", mais le "bois sec" est autorisé. Hassan Toufdy, dans un pick-up chargé à ras bord de bois ramassé à 90 km de N’Djamena, assure que sa cargaison "achetée à 50. 000 francs CFA (76 euros)" sera vendue trois fois plus cher.

Comment contrôler que le bois mort n’est pas un bois vert coupé et séché? Pas de réponse. La situation est quelque peu ubuesque. Près du poste de contrôle à Chagwa, où se vendait jadis le charbon, la vente de bois même sec est totalement interdite et le marché a été brûlé.

Depuis, une soixantaine de marchands attendent "une solution", à l’instar d’Abderraman Gassra: "Nous avons perdu environ 60 millions de FCFA" (10. 000 euros) de stocks, "nous n’avons plus de travail, plus de quoi vivre".

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Pour Mahamat Hissène, ministre de la Communication, il fallait prendre des mesures d’urgence.

"N’Djamena et ses environs se transforment en désert. Il faut sauver les forêts. J’ai planté des eucalyptus à Walia dans les années 1970, aujourd’hui c’est nu. De N’Djamema à Massaguet (80 km), il n’y a plus rien".

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"1,5 million de personnes habitent N’Djamena. Tous ces gens ont comme habitude de manger en consommant beaucoup de charbon", souligne le ministre, précisant que le président tchadien Idriss Deby Itno avait exhorté les Tchadiens à des efforts lors de la dernière saison des pluies (juillet-août), en vain jusqu’à décembre, poussant les autorités à "taper du poing sur la table".

Pour accompagner l’interdiction, le gouvernement subventionne l’utilisation "des bouteilles de gaz de 3 et 6 kg à hauteur de 50%", dit-il.

Le gaz revient aujourd’hui entre 30% et 50% moins cher le bois ou le charbon, mais les "petits revenus n’en ont pas les moyens", souligne Brigitte Topinanty Dionadji. Ils "achetaient des petits tas de 50 ou 100 FCFA de charbon pour chaque repas. Ils vivent au jour le jour. Comment voulez-vous qu’ils paient la caution d’une bouteille et le gaz pour plusieurs jours?".

La pénurie de bois a, en plus, provoqué celle du gaz. Le marché n’était pas prêt à recevoir une telle demande. De longues queues se forment devant les points de vente.

"Je vends 400 bouteilles par jour mais je pourrais en vendre 1. 000 si je les avais", explique Mahamat Malik, revendeur.

M. Hissène assure: "Nous sommes au courant de ces problèmes. Nous avons signé un contrat avec un importateur nigérian pour augmenter l’offre. On règle les problèmes petit à petit. Mais l’interdiction du charbon est inévitable, sinon ce sera le désert".

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