Les hôpitaux en grève, personnels démobilisés, matériel vétuste
« C’est fermé. Nous sommes en grève » est inscrit sur la porte des urgences gynécologiques de l’hôpital central de Libreville: la grève entamée le 12 janvier dans les hôpitaux gabonais s’est durcie avec la suppression du service minimum dans certains établissements.
"Aujourd’hui, un Gabonais ne peut pas se soigner. Des gens vont peut-être mourir pour des problèmes qui auraient pu être traités", souligne Apollinaire Moukila, conseiller en communication du ministre de la Santé le général Idriss Ngari, en regrettant que les syndicats aient décidé de ne plus assurer de service minimum.
Aux urgences générales, la porte est fermée. L’hôpital est presque désert et les rares employés rencontrés préfèrent ne pas donner leur noms. "Le personnel soignant n’est pas là. On ne reçoit personne", affirme une employée.
Au service pédiatrique, l’ambiance est également bizarre. On témoigne là aussi sous couvert d’anonymat: "C’est la galère, la galère, pleure une mère de famille, dont le jeune fils souffre d’une crise de paludisme. "Il y a une infirmière et un médecin qui viennent de leur bon coeur, mais mon fils n’est pas soigné normalement", souligne-t-elle inquiète.
A l’hôpital Jeanne Ebori, un service minimum est assuré mais aucun employé ne consent à répondre. "C’est risqué de parler", affirme un infirmier.
Globalement, les employés réclament à la fois des revalorisations salariales, une réhabilitation des hôpitaux ainsi que plus de moyens pour soigner les malades.
Au Gabon, l’organisation sanitaire est particulière: il y a un réseau d’hôpitaux de "santé publique" géré par le ministère de la Santé et un réseau d’hopitaux de la CNSS (Caisse Nationale de la Sécurité sociale) gérée par la CNSS et dont les employés relèvent du ministère du Travail.
"Le comble, c’est que les deux secteurs soient en grève en même temps", souligne sous couvert d’anonymat un employé de la CNSS.
"Il n’y a pas un problème CNSS et un problème Santé publique: il y a un problème de santé pour tous les Gabonais", résume Serghes Mickala Moundanga, du Syndicat national des Personnels de santé (SYNAPS). "On a laissé le secteur à l’abandon depuis de nombreuses années et les personnels sont mal payés".
Selon lui, tous métiers confondus, la moyenne des salaires est de 150. 000 francs CFA (environ 225 euros) mensuels. Le SYNAPS revendique notamment une prime mensuelle "hospitalisation" de 200. O00 FCFA (300 euros) et une prime de "motivation" de 60 à 80. 000 FCFA (100-130 euros).
"On a laissé tout le secteur de la santé s’écrouler. Dire qu’il y a 15 ou 20 ans on avait des hôpitaux réputés en Afrique. Aujourd’hui, les plateaux techniques sont vétustes. On manque de matériel même pour des actes les plus simples. Des gens meurent aujourd’hui parce que l’hôpital n’a plus les moyens de les soigner", souligne le dr Sylvie Nkogue-Mbot, du syndicat Hippocrate, médecin à l’hôpital pédiatrique d’Owendo.
"A l’hôpital de Libreville, il y avait avant un plateau pour les problèmes concernant les viscères, explique M. Mickala Moundanga. Aujourd’hui, ce plateau est fermé depuis deux ans. Si vous avez un problème au pied, on vous soigne, si vous avez un problème viscéral, on vous dit +désolé, on ne peut pas+".
Alors que les enseignants gabonais ont obtenu des revalorisations salariales après plusieurs mois de grève, le syndicaliste du SYNAPS espère que les personnels de santé obtiendront rapidement satisfaction: "Ils ont décalé l’année scolaire de quelques mois mais vous ne pouvez pas décaler des soins de plusieurs mois".
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