Au Mozambique, les élections ont débuté sous tension

Les Mozambicains ont commencé, mercredi 9 octobre, à voter pour élire leur président et leur Parlement. Un scrutin sans grand suspense, mais qui s’annonce tendu, l’opposition craignant des fraudes.

Une électrice vote, dans la ville de Beira, pour le scrutin du 09 octobre 2024 au Mozambique. © Mkhululi Thobela / ANADOLU / AFP

Une électrice vote, dans la ville de Beira, pour le scrutin du 09 octobre 2024 au Mozambique. © Mkhululi Thobela / ANADOLU / AFP

Publié le 9 octobre 2024 Lecture : 3 minutes.

Les 17 millions d’électeurs pourront voter jusqu’à 18 heures (16 heures GMT). Un scrutin, à l’issue duquel le Front de libération du Mozambique (Frelimo) devrait, sauf surprise, se maintenir à la tête de ce pouvoir qu’il détient depuis un demi-siècle.

Ces élections interviennent dans un contexte économique morose et alors que des attaques jihadistes dans le Nord continuent de contrarier les espoirs liés aux gisements de gaz naturel dans l’océan Indien. Le projet mené par le groupe TotalEnergies, chiffré initialement à 20 milliards de dollars d’investissement (18,25 milliards euros), est ainsi paralysé depuis 2021.

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Le président sortant, Filipe Nyusi, a été l’un des premiers à voter dans un quartier aisé de Maputo. Il a appelé à un scrutin « serein, calme », demandant qu’aucun « groupe ne s’agite ou ne menace les autres » et que chacun « évit[e] d’annoncer les résultats à l’avance ».

Irrégularités

Les dernières élections en 2019, qui avaient accordé 73 % des voix au candidat du Frelimo, avaient été entachées d’irrégularités. Et les municipales de l’an dernier avaient été vivement contestées par l’opposition.

« Il faut voter, sortir de sa maison. Sinon, il ne se passe rien », estime Amalia Brandan, une commerçante de 52 ans en chemisette fleurie, parmi les premières dans la queue. Récemment, « ceux qui avaient gagné ne se sont pas vu reconnaître leur victoire », a-t-elle ajouté, donc elle s’ « inquiète » que les élections ne soient pas « paisibles » en ce jour de pluie dans la capitale.

Le candidat du Frelimo à la présidentielle, Daniel Chapo, 47 ans, est un ancien gouverneur de province sans expérience gouvernementale. Il a voté dans le centre du pays, souhaitant lui aussi un scrutin « ordonné, pacifique et sans violence », y compris après la fermeture des bureaux de vote. Sauf forte surprise, le parti-État devrait se maintenir aux postes clés du pouvoir, en dépit des critiques et des dissensions.

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Trois candidats d’opposition

« Rien ne va changer, les résultats seront les mêmes », pronostique Domingos Do Rosario, qui enseigne les sciences politiques à Maputo, soulignant la faiblesse des traditions démocratiques de ce pays pauvre, aux fortes inégalités, où « le clientélisme » domine.

« L’intégrité du processus électoral est un vrai problème, souligne Borges Nhamirre, de l’Institut d’études pour la sécurité de Pretoria. Les institutions à tous les niveaux – corps électoraux, tribunaux, police – vont manipuler le scrutin. »

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Daniel Chapo, front dégarni, physique élancé et présence énergique, avait été désigné en mai à la surprise générale par le parti. Ce qui pourrait le rendre vulnérable aux pressions que ne manqueront pas d’exercer sur lui les différentes factions du Frelimo, soulignent plusieurs experts. Il serait le premier président né après l’indépendance. Et le premier à n’avoir pas combattu lors de la guerre civile qui a fait un million de morts, de 1975 à 1992.

Face à lui, trois candidats de l’opposition : Ossufo Momade de la Renamo, Lutero Simango du Mouvement démocratique du Mozambique (centre-droit), et celui qui a émergé pendant la campagne, Venancio Mondlane, 50 ans. Issu de la Renamo, il l’a récemment quittée après avoir échoué à en prendre la tête. Orateur de talent, charismatique, il suscite de l’espoir, notamment auprès de la jeunesse. « Si les élections étaient libres et équitables, il aurait des bonnes chances d’émerger comme le nouveau leader de l’opposition », estime Borges Nhamirre.

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Mais la commission électorale (CNE), jugée trop proche du pouvoir, lui accordera peut-être « quelque 10 % des voix, voire un peu plus, pour éviter des violences », estime un universitaire qui tient à garder son anonymat. Depuis une vingtaine d’années, « la triche » électorale est omniprésente, renchérit Domingos Do Rosario.

Le Mozambique, vulnérable au dérèglement climatique entre cyclones destructeurs et sécheresse, reste l’un des pays les plus pauvres au monde.

(Avec AFP)

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