La relation entre Wagner et l’armée malienne a-t-elle encore un avenir ?

Difficile de lire entre les lignes de la communication officielle malienne, pour peu qu’il y ait des lignes à lire. Parti début octobre en direction de Tinzawaten, un convoi conjoint des Forces armées maliennes (FAMa) et des supplétifs russes de Wagner était censé mener une opération intitulée « Vengeance », selon certaines sources. Chacun imaginait qu’allaient avoir lieu des combats punitifs, après la destruction d’une colonne russo-malienne, fin juillet, par les rebelles du Cadre stratégique permanent (CSP) et les jihadistes du JNIM. De combat, il n’y eut point.

La « Vengeance » serait-elle inachevée ? Un communiqué diffusé par l’armée malienne sur cette « opération de contrôle de zone » laisse penser, au regard des pratiques habituelles, qu’il ne devrait pas y avoir de suite immédiate. Le convoi étant rentré à Kidal au bout d’une dizaine de jours, la propagande a réduit, officiellement et a posteriori, les objectifs originels à la récupération des « dépouilles de frères d’armes ».

Entorses au professionnalisme

Caustiques, les rebelles du CSP assurent que les militaires n’auraient évacué que des dépouilles russes. Ce que démentent les FAMa. S’agissait-il moins de planter le drapeau malien à Tinzawaten que de rasséréner les mercenaires traumatisés par les évènements de fin juillet ? Non seulement le moral des représentants de Wagner ne serait pas au beau fixe, mais les supplétifs nourriraient quelques griefs à l’égard des soldats maliens.

En vrac, il serait question d’un manque de réactivité des gradés maliens, de tergiversations favorables aux adversaires, notamment en saison pluvieuse, d’une fâcheuse tendance à poster les localisations sur les réseaux sociaux, du goût pour la diffusion de vidéos et d’autres entorses au professionnalisme tel que perçu par les Russes. Sur le réseau Telegram, dont les mercenaires sont friands, circule le qualificatif d’« amateurs ».

Depuis la mort d’Evgueni Prigojine, les questions de la mutation de Wagner, de l’évolution de son architecture, de l’ampleur de son déploiement et même de sa dénomination sont sur toutes les lèvres. La nébuleuse Africa Corps a phagocyté le groupe, et des paramilitaires de la Brigade Bear ont annoncé leur départ de certaines zones du Sahel, comme le Burkina Faso. Des effectifs russes vont-ils quitter le Mali, soit pour renforcer le front en Ukraine, soit pour alimenter d’autres régions africaines où l’intervention de Moscou semble plus stable, comme en Centrafrique ?