En Guinée, 100 jours sans nouvelles de Foniké Menguè et Mamadou Billo Bah

Trois mois après l’enlèvement des deux activistes du FDNC, leurs avocats appellent à la mobilisation contre l’impunité. Ils pointent du doigt le silence accablant de certaines organisations comme la Cour pénale internationale, mais également de certains États comme la France.

Mamadou Billo Bah et Foniké Menguè. © MONTAGE JA : DR ; Aboubacarkhoraa/CreativeCommons

Mamadou Billo Bah et Foniké Menguè. © MONTAGE JA : DR ; Aboubacarkhoraa/CreativeCommons

William Bourdon. Vincent Brengarth.

Publié le 18 octobre 2024 Lecture : 3 minutes.

Cela fait maintenant 100 jours que nous sommes à la recherche de la moindre information après l’enlèvement de Foniké Menguè et Mamadou Billo Bah, membres du FNDC, le 9 juillet dernier. Cette situation est insupportable pour leurs familles, leurs proches et tous ceux qui manifestent leur attachement à la préservation des droits humains. Nous ne les oublions pas et tout sera fait pour que les responsables soient jugés.

Les droits humains ne sont pas une variable d’ajustement

Ce terrible anniversaire doit être l’occasion de pointer le silence accablant de certaines organisations, dont la Cour pénale internationale, mais également de certains États, dont la France, et ce en dépit des multiples alertes et recours. Les droits humains, pas plus en Guinée qu’ailleurs, ne doivent être une variable d’ajustement. Surtout, tous les signaux étaient à l’œuvre pour rendre cet enlèvement prévisible, alors que la Guinée s’enfonce dans une spirale autoritaire, éloignée des promesses de renouveau. Ce sont les mêmes mécaniques qui étaient dénoncées sous Alpha Condé qui sont aujourd’hui à l’œuvre. Le régime a changé de visage, pas de méthode.

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Bien sûr, des organisations, dont les experts de l’ONU et de la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples, ont pris leurs responsabilités, notamment, le 10 octobre 2024, pour exhorter les autorités guinéennes à dévoiler le sort réservé aux deux activistes[1]. L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits humains a condamné fermement leur disparition forcée[2]. Human Rights Watch a appelé à localiser et libérer les deux activistes, ainsi qu’à enquêter sur les allégations de torture[3]. Avec d’autres organisations, Amnesty International a demandé aux autorités de diligenter une enquête impartiale, indépendante et transparente[4].

Le courage des uns, le silence des autres

Il faut rendre hommage à ces organisations qui agissent en toute indépendance et avec les moyens parfois limités dont elles disposent. Elles sont une boussole face à un monde qui peine à assurer le respect des droits les plus universels et sacrés, au nom de logiques d’intérêts. Le soutien de ces organisations est décisif pour que la communauté internationale prenne conscience de l’extrême urgence de la situation et de la nécessité impérieuse que des investigations puissent effectivement avoir lieu.

Cette réaction courageuse doit être appréciée en miroir du silence de certains États ou de certaines organisations. L’Organisation internationale de la Francophonie a ainsi levé la suspension de la Guinée, qui a pu participer à son sommet en France. Mais sur quelle base une telle décision peut-elle s’asseoir ? Elle est en décalage total avec la réalité de la situation sur place et avec les graves atteintes aux libertés individuelles et publiques dont l’enlèvement des deux activistes n’est que l’un des derniers épisodes.

Violations multiples

N’est pas non plus au rendez-vous la Cour pénale internationale, alors que la situation devrait imposer une réaction pour que toute la lumière soit faite sur les agissements en cause. Encore une fois, ils ne sont pas isolés mais s’inscrivent dans le prolongement de violations multiples (une liberté de manifester bafouée, une indépendance des médias mise à mal…). Que faut-il de plus pour se rendre compte de l’évidence quant à la bascule qui s’opère ?

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Cet anniversaire doit enclencher un sursaut de tous ceux qui, jusqu’à présent, ont refusé d’agir. Nulle raison que l’écoulement du temps desserve le combat que nous menons. Il est au contraire la confirmation que nous agissons contre un régime sûr de son impunité et qui ne pourra fléchir qu’avec notre mobilisation collective.

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[1] https://www.ohchr.org/en/press-releases/2024/10/guinea-growing-concern-health-and-well-being-disappeared-human-rights

[2] https://www.fidh.org/fr/themes/defenseurs-des-droits-humains/guinee-dispartion-forcee-des-membres-du-fndc-mamadou-billo-bah-et

[3] https://www.hrw.org/fr/news/2024/10/17/100-jours-plus-tard-deux-opposants-guineens-sont-toujours-portes-disparus

[4] https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2024/08/guinea-urgent-investigation-needed-into-enforced-disappearance-of-two-fndc-activists-missing-since-9-july/

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