Attentat de Djerba: à la barre, Marie-Madeleine revit des minutes d’horreur

Le dernier souvenir que garde Marie-Madeleine Sauvage de son mari Paul, mort en avril 2002 dans l’attentat contre la synagogue de Djerba, c’est un regard bleu sur un corps carbonisé.

Publié le 7 janvier 2009 Lecture : 2 minutes.

A la barre de la cour d’assises spéciale de Paris, qui juge depuis lundi trois hommes accusés de complicité avec le kamikaze qui s’est fait sauter ce jour-là au volant de sa camionnette piégée, cette grand-mère de 76 ans, touriste ce jour-là, a revécu les minutes d’horreur qui ont suivi la déflagration.

Protégée du souffle et du feu parce qu’elle était dans une pièce du fond de l’édifice, elle a cherché son mari, resté dans l’entrée.

la suite après cette publicité

D’une voix ferme, elle raconte: "En sortant, je crois l’avoir reconnu: il était entièrement carbonisé, mais j’ai reconnu son regard. . . Il avait les yeux bleus. J’étais avec mes deux petits enfants, je ne me suis pas arrêtée, je m’en veux".

"J’y suis retournée plus tard, quand j’ai été soignée pour mes pieds brûlés, mais les services de secours l’avaient déjà enlevé. Je ne l’ai jamais revu: son corps est arrivé chez nous, au Mans, deux semaines plus tard dans un cercueil plombé".

Vingt-et-une personnes (14 touristes allemands, cinq Tunisiens et deux Français) ont trouvé la mort ce jour-là, quand le jeune Tunisien Nizar Nawar, qui s’est réclamé d’Al Qaïda, a fait exploser la camionnette dans laquelle il avait installé une bombe incendiaire artisanale, une citerne remplie de gaz butane.

"Dehors, c’était l’apocalypse" se souvient Mme Sauvage. "Les Allemands étaient en flamme, ils se roulaient par terre. Les gens brûlaient sur place. Il y avait des mamans avec des enfants morts. Un homme avec son bébé mort, tout noirci, dans les bras, sa femme morte à ses pieds".

la suite après cette publicité

En prenant place à la barre, elle s’est ostensiblement arrêtée devant le box des accusés, où est assis, à côte de Walid Nawar, frère du kamikaze, l’Allemand converti à l’islam Christian Ganczarski, accusé d’avoir donné le feu vert à l’attaque lors d’une conversation téléphonique quelques minutes avant l’explosion.

En allemand, traduit par un interprète, il a demandé la parole et s’est adressé à la veuve de Paul Sauvage: "Je suis vraiment désolé, madame. Je peux comprendre. J’ai un enfant handicapé. J’ai perdu ma mère pendant que j’étais en prison. Je veux dire ici que je n’ai rien à voir avec cet attentat honteux. Je ne suis pas d’accord avec ces attentats".

la suite après cette publicité

"On n’a pas le droit d’attaquer des églises ou des synagogues. Tous les savants de l’islam les désapprouvent, surtout ceux qui sont en Arabie Saoudite où j’ai été formé. Et je suis d’accord avec eux. Je ne peux réparer votre douleur, mais je la comprends", a-t-il ajouté.

A son tour Walid Nawar a pris la parole pour déclarer: "Madame, je me dois de vous regarder et de vous expliquer ma tristesse et ma désolation pour le crime et le mal causé par mon frère à ces personnes. . . Mais il faut faire la différence entre lui et moi".

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires