La junte assoit son pouvoir, le gouvernement fait allégeance
La junte qui a pris le pouvoir en Guinée par un coup d’Etat militaire, juste après le décès du chef de l’Etat Lansana Conté, a conforté son autorité en obtenant que le Premier ministre et son gouvernement lui fassent allégeance.
Mais dans le même temps, les putschistes doivent faire face à une pression croissante de la communauté internationale, comme de deux coalitions de l’opposition, qui jugent trop long le délai de deux ans pour organiser des élections.
"Retenez que nous sommes des techniciens (. . . ) et que nous sommes à votre entière disposition. Nous vous remercions encore une fois pour votre sagesse, Monsieur le président", a déclaré le Premier ministre Ahmed Tidiane Souaré au chef de la junte, le capitaine Moussa Dadis Camara.
M. Souaré répondait au capitaine Camara qui avait demandé au Premier ministre et à son gouvernement d’"aider" son régime, lors d’une rencontre à la mi-journée, au camp militaire Alfa Yaya Diallo, quartier général des putschistes.
"Hier, c’était vous, aujourd’hui, c’est nous. Nous vous avons aidés, vous devez nous aider", a déclaré M. Camara à la trentaine de membres du gouvernement convoqués par la junte et qui l’ont écouté religieusement, se levant à son arrivée et s’asseyant lorsqu’il les invitait à le faire.
"Vous pouvez revenir aux affaires (par la voie des urnes, ndlr), évitons simplement les oppositions armées qui entraîneraient notre pays dans des guerres fratricides", a poursuivi le capitaine Camara, qui s’était autoproclamé la veille "président de la République".
La prise de pouvoir par l’armée est "une transition pour aboutir à des élections libres et transparentes, au terme desquelles nous allons rejoindre les casernes", a-t-il promis.
Mais le calendrier de la junte, qui a pris le pouvoir mardi quelques heures seulement après la mort du président, est de plus en contesté. Les putschistes ont promis des élections dans seulement deux ans, fin décembre 2010, soit à la fin prévue du mandat de Lansana Conté, qui a dirigé la Guinée d’une main de fer pendant 24 ans et qui doit être inhumé vendredi.
Deux importantes coalitions de l’opposition au régime de Lansana Conté "ont prix acte", sans le condamner, du coup d’Etat militaire et demandent à la junte d’organiser des "élections libres" d’ici un an, selon un communiqué commun.
Et la communauté internationale, qui avait déjà condamné le coup de force, a haussé le ton jeudi, en rejetant à son tour le calendrier des putschistes.
Très en pointe dans ce dossier, les Etats-Unis ont exigé un "retour immédiat à l’ordre civil" et "rejettent le communiqué des militaires (putschistes) promettant des élections en décembre 2010", selon un texte de leur ambassade à Conakry.
"La Guinée a déjà considérablement progressé vers la tenue des élections législatives prévues pour mai 2009 et nous l’encourageons très fermement à respecter ce calendrier établi", ajoute l’ambassade.
Le président français Nicolas Sarkozy a lui aussi demandé des "élections libres et transparentes", à "bref délai et sous observation internationale", en Guinée, mais sans fixer de date précise.
La présidence française de l’Union européenne (UE) a pour sa part demandé l’organisation d’élections "démocratiques et transparentes" au "premier semestre 2009".
"Deux ans (pour organiser des élections), c’est trop pour la Guinée. Le processus de transition ne peut pas dépasser décembre 2009, (soit) une durée maximale d’un an", a déclaré à l’AFP Alioune Tine, président de l’une des principales ONG de défense des droits de l’Homme en Afrique, la Rencontre africaine pour la défense des droits de l’Homme (Raddho), basée à Dakar.
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