Entre la France et le Niger, la guerre des nerfs et des mots continue
À Niamey, dans la foulée de l’arrestation annoncée d’un ressortissant français présenté comme un agent de la DGSE, une manifestation a une nouvelle fois dénoncé les présumées tentatives de déstabilisation venues de Paris.
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 18 novembre 2024 Lecture : 2 minutes.
S’il existait des écoles de junte, une matière éliminatoire traiterait certainement de la stabilisation des régimes putschistes par la combinaison des dénonciations de déstabilisation et de la mobilisation sur bitume. Les unes, plus ou moins avérées, et l’autre plus ou moins spontanée. Le 16 novembre, des dizaines de manifestants nigériens ont ainsi battu le pavé de leur capitale, Niamey, pour dénoncer la volonté de forces « impérialistes » de faire tomber le pouvoir issu du coup d’État contre Mohamed Bazoum.
À l’origine de la mobilisation, une déclaration commune de plusieurs associations et groupes civiques appelant à soutenir les Forces de défense et de sécurité, qui seraient, selon elles, la cible de puissances étrangères. Lors du rassemblement, un parallèle était fréquemment établi entre le Niger et les autres pays de l’Alliance des États du Sahel (AES). En effet, le Mali et le Burkina Faso ont tissé le même genre de dénonciations de complot, respectivement mi-septembre et début novembre.
La DGSE, cible préférée des putschistes de l’AES
Le ressort ponctuel de la manifestation de Niamey était l’annonce récente, par Télé Sahel, de l’arrestation au Niger d’un Français présenté comme un agent de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), le service des renseignements français. Selon la télévision publique, le quinquagénaire serait « entré frauduleusement au Niger le 12 novembre 2024 », avant d’être « interpellé par les services de sécurité du Niger le 13 novembre ».
Le média officiel en a profité pour affirmer que l’ancienne puissance coloniale « continue à dérouler ses plans à travers son service de renseignement » pour « déstabiliser le Niger et, au-delà, l’AES ». Et d’ajouter que les opérations françaises formeraient et armeraient les terroristes et qu’auraient été démasqués « d’autres agents de la DGSE agissant sous identité d’emprunt et sous couverture non institutionnelle ».
Pour les manifestants, le combat vers la pleine souveraineté est une lutte de longue haleine contre une hydre néocoloniale à plusieurs têtes. Mardi 12 novembre, le ministre de l’Intérieur, le général Mohamed Toumba, signait un arrêté de retrait de l’autorisation d’exercer de l’ONG française Acted. Puis, le 15, l’entreprise française Orano annonçait suspendre ses « dépenses liées aux activités d’extraction » de l’uranium. Les deux événements seraient liés à la dégradation des relations entre le Niger et la France.
La lutte de « longue haleine » anti-impérialiste permet de justifier la durée indéterminée des régimes de l’AES. L’interrogation du Premier ministre malien, le 16 novembre, sur une éventuelle fin de la transition, est présentée comme une fronde. L’opinion exprimée au Burkina Faso ne s’est pas émue de la prolongation de soixante mois, en mai, d’un régime qui n’en avait réclamé que vingt-deux. Pendant la manifestation nigérienne, son organisateur, Mohamed Elkebir Souleymane, déclinait quant à lui les objectifs de la junte… « d’ici à dix ans ».
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