L’UE toujours empêtrée dans ses négociations commerciales avec l’Afrique

Les Africains rechignent toujours à signer avec l’UE de nouveaux accords commerciaux destinés à ouvrir leurs économies fragiles, d’autant plus que la crise économique risque de réduire sensiblement l’aide au développement qu’ils recevront de l’Europe.

Publié le 5 décembre 2008 Lecture : 2 minutes.

Il y a un an, dans une ambiance délétère, l’UE avait arraché des accords commerciaux intérimaires avec les pays dits ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique) qui étaient menacés de perdre leur accès préférentiel au marché européen.

Grâce à ces accords, les produits de tous les ACP (excepté riz et sucre) entrent dans l’UE sans droit de douane ni quota depuis le 1er janvier 2008. Sans accord, les ACP, distincts des PMA (Pays les moins avancés), auraient vu au contraire leurs droits de douane augmenter, risquant de perturber fortement leurs exportations.

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Depuis, la Commission européenne a multiplié les réunions pour apaiser les disputes de fin 2007 et parvenir à des accord complets et régionaux. Mais « les tensions existent encore » et peu de concret en est sorti, note San Bilal, expert au Centre européen de gestion des politiques de développement.

Les Caraïbes ont certes signé en octobre un accord de partenariat économique complet, concernant les marchandises mais aussi les services et les investissements, mais les cinq autres régions qui négocient (Afrique de l’Ouest, de l’Est, centrale et australe, et Pacifique) en sont loin.

A l’encontre de l’objectif d’intégration affiché par l’UE, la plupart des accords intérimaires (uniquement sur les marchandises) ont été conclus avec des pays individuels, ou des petits groupes, et certains veulent en plus revenir sur certaines clauses prévues.

« Pour l’Afrique de l’Ouest, la Commission veut une libéralisation de 80% des échanges sur 15 ans. Mais c’est une exigence trop forte, nous voulons 60 à 70% sur 25 ans », explique par exemple un diplomate africain.

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« Il faut que la Commission accepte des compromis », continue-t-il, craignant que les promesses européennes d’accompagner financièrement les adaptations économiques liées à l’ouverture des marchés soient en plus remises en cause par la crise économique.

« L’aide au développement va être affectée, les investissements étrangers vont être affectés, les transferts des migrants et le tourisme vont être affectés. Donc c’est une raison supplémentaire pour l’UE d’accepter un étalement » de la libéralisation, martèle-t-il.

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Les aides massives annoncées par les Européens à leurs propres économies ne laissent pas non plus indifférent.

« Les pays africains remettent en cause le principe d’une économie totalement libérale en disant +vous nous dites d’ouvrir nos marchés, mais vous quand ça va mal, vous, vous sortez des règles du marché+ », explique ainsi San Bilal.

« C’est justement à cause du contexte économique et financier auquel nous faisons face que les accords de partenariat économique sont de plus en plus importants », s’est défendu cette semaine la commissaire au Commerce Catherine Ashton.

« Ca ne rend que plus haute la valeur de l’intégration régionale », a renchéri une source européenne.

D’autre part, un autre danger menace de remettre de l’huile sur le feu de ces négociations: « A l’OMC, on commence à se poser des questions, parce que les accords intérimaires ne sont toujours pas notifiés », en raison des délais de traduction dans les 23 langues de l’UE, remarque Marc Maes, de l’ONG 11. 11. 11.

Or c’est l’OMC, en condamnant en 2000 le régime commercial préférentiel accordé par l’Europe à ses anciennes colonies, qui avait forcé l’UE à entamer ces pourparlers durant déjà depuis huit ans.

Et les pays exportateurs de bananes d’Amérique du Sud, confortés par plusieurs victoires à l’OMC contre l’UE, sont sur le qui-vive, confirme une source européenne.

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