Firdaous Oussidhoum : « Le futur urbain de l’Afrique doit passer par les villes intermédiaires »

L’Afrique est le continent où la croissance urbaine est la plus rapide (4,5%) et il devrait voir doubler le nombre de ses citadins (38%) d’ici 2030. Directrice des relations internationales de l’Union africaine des architectes (UAA), la Marocaine Firdaous Oussidhoum a participé, le 12 mai à Madrid, à la table ronde « Villes africaines, défi urbanistique et social », organisée par la Casa África. Interview.

Firdaous Oussidhoum. © Javier Barbancho/Casa África

Firdaous Oussidhoum. © Javier Barbancho/Casa África

Publié le 16 mai 2014 Lecture : 2 minutes.

Jeune Afrique : Quelles sont les pays et les villes du continent où la croissance urbaine est la plus forte ?

Firdaous Oussidhoum : Il y a quinze jours, le Nigeria a été déclaré comme le pays africain ayant la plus forte croissance économique. Il est donc logique que l’urbanisation y soit plus élevée. On peut également citer le Kenya avec sa capitale Nairobi, l’Angola avec Luanda ou encore le Ghana. C’est une question de moyens mais aussi de stabilité politique.

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De quoi s’accompagne ce phénomène ?

Chaque ville s’est développée au gré des arrivées successives et de façon souvent informelle, sans hiérarchie. La ville africaine a une nouvelle logique urbaine, différente de celle des villes des pays développés. La cohésion sociale y est d’ailleurs plus forte, les gens s’organisent. En parallèle, avec une économie de plus en plus rapide, cette expansion urbaine se fait à toute vitesse. Cela est dommage car on ne construit pas la durabilité de l’Afrique.

L’expansion des villes africaines doit être une réponse à une communauté donnée, avec ses valeurs et sa culture.

>> Lire aussi : le béton et l’humain (dossier)

Comment trouver un équilibre entre le respect de la logique urbaine africaine et la mise en place de meilleures structures ?

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Une volonté politique est nécessaire, ainsi que l’aide des professionnels, les architectes en particulier, qui doivent jouer un rôle d’intermédiaires entre population et gouvernants. Il faut pouvoir passer de l’informel au droit, en structurant les villes. Par exemple, les autorités devraient pouvoir avoir accès aux taxes. Une démarche participative et citoyenne est aussi nécessaire : quelles villes voulons-nous ? On ne peut pas déplacer des gens de leurs quartiers et les mettre dans des buildings à l’occidentale où ils perdent leurs repères. L’expansion des villes africaines doit être une réponse à une communauté donnée, avec ses valeurs et sa culture.

La croissance urbaine concerne-t-elle aussi les villes moyennes ?

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Il semble plus opportun que la population rurale aille dans les villes moyennes plutôt que directement dans les capitales. La gestion y est plus facile et la culture peut s’exprimer dans l’espace public. Le futur urbain de l’Afrique doit passer par les villes intermédiaires.

L’Afrique doit-elle s’inspirer de l’urbanisation en Amérique latine ?

Dans l’exemple sud-américain, l’utilisation des matériaux locaux plaît beaucoup à nos architectes. Malheureusement, en Afrique, il est difficile de copier ce modèle car notre continent n’est pas industrialisé. Nous avons donc lancé un projet à l’UAA pour créer un label "made in Africa". Notre but est de rassembler décideurs, ONG et secteur privé afin d’industrialiser les matériaux locaux et les rendre moins chers. Pour nous, tout le potentiel de l’Afrique réside dans sa créativité.

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Propos recueillis par Marie Villacèque, à Madrid
 

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