Afrique du Sud : Pistorius, entre contradictions et omissions
Suspendu tout le weekend, le contre-interrogatoire musclé d’Oscar Pistorius par le procureur Gerrie Nel a repris lundi au tribunal de Pretoria. Un nouveau round de questions auxquelles l’athlète accusé du meurtre de sa compagne a eu du mal à répondre sans contredire sa première version des faits.
Le claquement de la porte du WC ! Un détail peut-être, mais ô combien important aux yeux du procureur Gerrie Nel. Oscar Pistorius, en revanche, ne l’avait pas mentionné lors de sa première déposition. Le 14 avril, lors de son contre-interrogatoire, l’accusation semble ainsi avoir marqué quelques points en mettant à mal la version des faits du champion paralympique sud-africain.
La journée d’audience a démarré comme les précédentes. Oscar Pistorius avance à la barre pour expliquer une fois de plus pourquoi il s’était rendu dans sa salle de bains, armé, craignant un cambriolage après avoir entendu la fenêtre de cette pièce s’ouvrir. Mais brusquement, le procureur l’interrompt : "Est-ce que vous n’oubliez pas quelque chose de très important. La porte [du WC] a claqué."
>> Lire aussi : Pistorius a tué délibérément sa compagne, selon le procureur
Alors que l’athlète rétorque que cette porte a claqué au moment où il avançait dans le couloir de la salle de bains, Gerrie Nel le coince et lui demande pourquoi "ce bruit si important" n’était pas mentionné dans la toute première déposition lue par les avocats de Pistorius en 2013. "Il n’y a pas un seul mot sur cette porte en train de se fermer et de claquer dans votre déposition pour la remise en liberté sous caution", insiste-t-il.
"Je ne sais pas. Demandez à mes avocats", objecte Pistorius.
"Mais pourquoi ? Je ne vais pas me contenter d’un je-ne-sais-pas", enchaîne le procureur. "Je vous le dis, monsieur, c’est parce que vous changez votre version au fur et à mesure."
Pistorius a-t-il changé sa ligne de défense ?
"Votre ligne de défense a changé ?" Non, il n’a "pas visé la porte", c’est "son arme qui était pointée sur la porte". "Avez-vous tiré sur ce que vous perceviez être un attaquant ?", l’interroge encore le procureur. "Non, j’ai tiré sur la porte", répond Pistorius, refusant obstinément de dire qu’il a tiré pour tuer. "Donc votre ligne de défense a changé. Ce n’est plus la légitime défense ?", s’étonne le procureur, qui ajoute : "Même si c’était un cambrioleur, cela aurait été un accident ?"
"Oui", répond Pistorius, écarlate lorsqu’il ajoute : "Je m’en veux d’avoir pris la vie de Reeva."
Barry Roux, l’avocat du sportif, assiste impavide aux échanges et n’intervient que brièvement pour se plaindre de l’acharnement du procureur à reposer les mêmes questions.
L’audience est suspendue plusieurs fois quand Pistorius ne semble plus en état de parler, notamment quand il s’écrie qu’il a sommé le présumé cambrioleur de sortir de chez lui avant de tirer. "Tu dégages de ma putain de maison !", a-t-il glapi à la barre comme revivant cette nuit dramatique de Saint-Valentin 2013, banalement commencée par un dîner autour d’un sauté de poulet, quelques coups de fil et un couple qui s’endort fatigué, selon Pistorius.
Depuis plusieurs jours, des fans viennent le soutenir, assistant aux débats ou l’attendant devant le tribunal avec des fleurs et des ballons. Soudé, le clan Pistorius est assis au premier rang. Sa sœur Aimée, qui vient le conforter dans son box à chaque interruption d’audience, a l’air d’assister à un enterrement.
La famille Steenkamp, à laquelle Pistorius a demandé publiquement pardon la semaine dernière, occupe la même rangée.
(Avec AFP)
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