Rachid Benbrahim Andaloussi : « Faire classer Casablanca au patrimoine mondial par l’Unesco »
Lancées à Casablanca en 2009, les journées du patrimoine sont devenues au fil du temps l’un des grands rendez-vous culturels du printemps : 26 000 participants pour la dernière édition qui s’est achevée le 6 avril et qui a fait de la ville de Dakar, l’invité d’honneur. Rachid Benbrahim Andaloussi, président de l’association Casa Mémoire, organisatrice de ces journées, dresse le bilan.
Jeune Afrique : Que retenir de ces journées du patrimoine ?
Rachid Benbrahim Andaloussi : Près de 26 000 participants ont répondu présent à la 6e édition des Journées du patrimoine de Casablanca organisée par l’association Casamémoire en collaboration avec la Ville de Casablanca du 1er au 6 avril. À cette occasion, des Casablancais de naissance ou d’adoption, et de tous âges, ont pu redécouvrir la ville en famille ou entre amis à travers une riche programmation de visites guidées, de conférences et d’animations artistiques. 180 guide-médiateurs bénévoles se sont mobilisés, le temps d’un weekend, pour partager leur passion pour la ville de Casablanca avec 15 500 visiteurs dont 4300 élèves qui sont venus, lors de la journée dédiée spécialement aux scolaires, faire tamponner leur passeport du "citoyen junior" des Journées du Patrimoine de Casablanca.
Les Casablancais ont pu de vivre au rythme des nombreuses animations artistiques proposées à l’occasion (expositions, ateliers, projections de films, conférences et spectacles de rue). 10 500 spectateurs se sont ainsi donné rendez-vous en journée et en soirée pour profiter de cet événement consacrée à la culture et au patrimoine.
Durant cette édition, la ville de Dakar a été l’invitée d’honneur : expositions, projections, concerts et workshops entre l’École d’architecture de Casablanca et l’Institut d’architecture de Dakar ont été proposés pour offrir un regard croisé sur le patrimoine de ces villes jumelées.
Casablanca, ville historique, symbole de l’ouverture et de la mixité sociale, mais une ville sale et délabrée. Comment expliquez-vous ce paradoxe?
Dans son discours, daté du 11 octobre 2013, SM le Roi Mohammed VI a dit ceci : "Casablanca est la ville des gratte-ciels et des bidonvilles. C’est le centre de la finance et des affaires, mais aussi de la misère, du chômage et d’autres maux, sans parler des déchets et des ordures qui en ternissent la blancheur et entachent sa réputation". Ce court extrait d’un discours au ton sans concession en a fait frémir plus d’un qui, soudain, se sont mis au garde-à-vous. Il était temps ! Que chacun se mette au travail. Que chacun prenne ses responsabilités. Et je ne parle pas là uniquement des autorités. Le citoyen est tout aussi concerné. Il faut que les Casablancais retrouvent leur urbanité qui, il n’y a pas si longtemps, faisait leur fierté.
Il faut que les Casablancais retrouvent leur urbanité qui, il n’y a pas si longtemps, faisait leur fierté.
Et Casamémoire dans tout ça ?
Elle est partie prenante de ce débat combat. En dix-huit années d’existence, l’association n’a cessé de prêcher la bonne parole : celle d’une ville blanche. Grâce à notre inlassable action de sensibilisation, le patrimoine architectural de Casablanca est à nouveau connu et reconnu – non seulement de toutes ses élites, mais également d’une portion non négligeable de ses habitants. Nous avons empêché des dizaines de démolitions. Nous avons contribué à faire inscrire sur la liste du patrimoine national plus d’une centaine de bâtiments. À l’aune de la nouvelle donne politique, Casamémoire s’active, plus que jamais, à donner corps à son rêve premier : faire classer cette cité Patrimoine mondial par l’Unesco. C’est notre grand chantier à nous.
>> Lire aussi : quatre nouveaux sites africains inscrits au patrimoine mondial par l’Unesco
Quelle pérennité a votre action avec la faible implication des autorités publiques qui laissent le patrimoine se délabrer ?
Depuis quelques années, nous notons une réelle prise de conscience des élus municipaux et régionaux ainsi que des autorités locales de la région du Grand Casablanca qui nous soutiennent moralement et financièrement pour mener à bien notre démarche. Nous avons travaillé en étroite collaboration notamment avec l’agence urbaine de Casablanca pour définir l’étude du plan de sauvegarde du patrimoine de la ville ainsi qu’un inventaire des bâtiments remarquables.
Par ailleurs, nous sommes régulièrement sollicités par les autorités pour des consultations concernant l’arsenal juridique et fiscal à développer pour préserver le patrimoine architectural en général.
Casablanca a été inscrite le 27 novembre 2013 à la liste indicative du patrimoine mondial de l’Unesco. Une inscription qui couronne les efforts de promotion du patrimoine architectural et urbain casablancais et qui reconnait Casablanca comme un patrimoine culturel d’une valeur universelle exceptionnelle susceptible d’inscription sur la liste du patrimoine mondial. Nous travaillons actuellement avec le ministère de la Culture sur le dossier de candidature de Casablanca à la liste du patrimoine mondial. Une initiative qui permettra d’agir en commun pour promouvoir le patrimoine architectural casablancais et préserver ce témoignage historique et culturel précieux pour les générations futures.
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Propos recueillis par Nadia Lamlili
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