Afrique du Sud : capotes multicolores au pays arc-en-ciel

Comment amener les Sud-Africains à pratiquer le safe sex ? Pour emballer les jeunes qui veulent emballer, une solution : mieux emballer les capotes…

Lo’eil de Glez. © Damien Glez

Lo’eil de Glez. © Damien Glez

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Publié le 7 avril 2014 Lecture : 4 minutes.

Mis à jour le 7 avril 2014 à 15H04.

La bonne vieille capote doit "devenir cool". C’est la conviction de Joe Maila, porte-parole du ministère sud-africain de la Santé, à l’heure où la prévention en matière de maladies sexuellement transmissibles marque le pas, notamment dans ce pays particulièrement touché par le sida. Début mai débutera donc, en particulier sur les campus, une campagne de distribution gratuite de préservatifs plus attrayants que par le passé. Pour s’assurer que la capote devienne swag, les fabricants travaillent sur deux composantes du produit : la couleur et le parfum. L’emballage et le préservatif pourront donc être assortis à la couleur du caleçon. Quant aux parfums "sud-aphrodisiaques" – et peut-être les goûts"–, ils titilleront au mieux le sens olfactif dont on sait qu’il joue un rôle très important dans l’éveil du désir.

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Les Sud-africains se sont longtemps complus dans l’idée qu’on ne consomme pas une banane avec la peau.

Il faut dire que les statistiques sur le Sida sont préoccupantes au pays de Madiba. Une étude récente du Conseil de la recherche en sciences humaines (HSRC) indique que 12,2% de la population du pays étaient séropositifs en 2012, soit 6,4 millions de Sud-africains. Sur la seule année 2012, 469 000 nouveaux cas de VIH ont été enregistrés. Les enquêtes mettent justement à l’index un recul dans l’usage du préservatif. Le pays a longtemps souffert de discours politiques confus, amenant les Sud-africains à se complaire dans l’idée qu’on ne consomme pas une banane avec la peau. Aujourd’hui, le vaste programme de distribution d’antirétroviraux aurait quelque peu anesthésié la peur de mourir du sida. Et le caoutchouc serait passé de mode. Seul 36,2% des personnes interrogées déclaraient avoir utilisé un préservatif lors de leur dernier rapport sexuel, contre 45,1% en 2008.

C’est pourquoi, en Afrique du Sud ou ailleurs sur le continent, les chercheurs de tous poils libèrent leur génie créateur pour réhabiliter l’étui pénien en latex, seul instrument capable de faire valablement barrage au VIH. Au Salon international des inventions de Genève, le Sénégalais Mor Maty Seck vient de présenter un dispositif censé faciliter l’enfilage de la capote sur l’organe sexuel masculin. L’appareil est constitué "d’un manchon et d’un support circulaire sous forme d’anneau plat sur lequel s’effectue l’opération de montage du préservatif sur deux demi-colorettes en jonction dont l’une est fixée sur sa circonférence intérieure et l’autre mobile fixée à l’extrémité inférieure du manchon". Dit comme ça, pas sûr que ça soulage les cibles avouées de monsieur Seck : les handicapés de main, les non-voyants, les personnes en état d’ivresse et les excités fainéants…

L’Afrique n’est pas le seul continent concerné par la désaffection à l’égard du latex.

L’Afrique n’est pas le seul continent concerné par la désaffection à l’égard du latex. Les autorités sanitaires françaises viennent d’indiquer qu’un tiers des étudiants français n’utilisait jamais de préservatif. En Occident aussi, l’imagination se met donc en branle pour changer les comportements. Après avoir proposé aux timides et aux distraits la livraison de capotes à domicile, c’est encore sur le packaging que se sont penchés les spécialistes. L’artiste australien Kode Abdo a inventé des préservatifs à l’effigie du logo de "Superman", sans doute pour les super héros du sexe qui veulent faire planer leur(s) partenaires(s) ; des capotes "Batman" pour les amants chauves-souris qui ne font l’amour que la nuit et parfois la tête en bas ; des condoms "Street fighter" pour ceux qui considèrent les ébats amoureux comme un corps à corps guerrier ; des contraceptifs "Pokemon" pour ceux qui pensent que les femmes sont des monstres que l’on doit "attraper toutes".

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L’intention du ministère de la Santé sud-africain est de faire vibrer la corde ludique des relations sexuelles, afin que le préservatif soit utilisé à bon escient, contrairement à ces dealers sud-américains qui viennent d’expédier au Vatican quatorze capotes remplies de cocaïne. Cette corde ludique se révèle même franchement humoristique, puisqu’il est permis de faire l’amour avec humour, lequel humour est d’ailleurs un allié pertinent dans la sensibilisation sur les graves sujets de santé. La société de production canadienne Crush et l’agence publicitaire BBDO viennent ainsi de concevoir un clip dans lequel plusieurs jeunes hommes invités à une fête sont filmés, en haut de la ceinture, en train de se faire épiler le bas de la ceinture. En un peu plus d’une minute, les visages se déforment, pour notre plus grand amusement. Une manière poilante donc de faire le buzz autour d’une autre palpation, non douloureuse celle-ci, destinée à détecter les cancers du testicule.

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Damien Glez

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