Nigeria : la population en colère devant la « maison de l’horreur »

Une émeute a éclaté lundi devant la « maison de l’horreur » découverte à Ibadan, dans le sud-ouest du Nigeria. La population souhaitait enterrer dignement les cadavres qui y ont été retrouvés dans ce qui s’apparente, selon elle, à une affaire d’enlèvement de personnes à des fins de magie noire.

La population rassemblée devant la « maison de l’horreur » à Ibadan, le 24 mars 2014. © Pius Utomi Ekpei / AFP

La population rassemblée devant la « maison de l’horreur » à Ibadan, le 24 mars 2014. © Pius Utomi Ekpei / AFP

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Publié le 25 mars 2014 Lecture : 3 minutes.

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Des dizaines de jeunes et d’habitants se sont rassemblés lundi devant la "maison de l’horreur", un bâtiment d’un étage abandonné découvert deux jours plus tôt dans le quartier Soka d’Ibadan et peuplé de cadavres en décomposition, d’ossements et de personnes affamées, enchaînées, entre la vie et la mort. L’émotion populaire a finalement dégénéré en émeute, une cinquantaine d’habitants de la zone armés de bâtons et de machettes tentant d’accéder par la force à l’édifice malgré le cordon de sécurité instauré par les forces de l’ordre. Bilan : au moins 20 personnes blessées et 12 véhicules cassés.

Selon les habitants, le bâtiment en ruine aurait servi à cacher des personnes enlevées dans le but de les revendre à des fins de magie noire. Il existe un trafic de membres humains à l’échelle du pays pour les tortures et sacrifices rituels, un thème très présent dans les téléfilms populaires nigérians de Nollywood.

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Perdue au milieu d’herbes hautes, la "maison de l’horreur" est en partie cachée par les débris rouillés de plusieurs tracteurs et les carcasses de voitures abandonnées. Outre des restes humains, plusieurs personnes en état de dénutrition ont aussi été retrouvées en train d’errer dans la végétation autour de la maison, alors que 15 autres étaient enchaînées à l’intérieur, selon plusieurs articles de la presse locale.

Des restes humains à Ibadan le 24 mars 2014. © Pius Utomi Ekpei / AFP

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Odeur de mort

À l’intérieur de la maison règnait lundi une odeur de mort insoutenable et des milliers de mouches bourdonnaient, forçant les visiteurs à se couvrir le nez et la bouche. Selon les habitants, l’édifice, situé à environ un kilomètre de l’autoroute qui relie Ibadan à Lagos, servait auparavant de bureau à une entreprise de construction. Une cinquantaine de sacs de ciment sont encore entreposés à l’intérieur.

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La police n’a pas encore donné d’explications sur cette affaire, ce qui exaspère la population pressée de donner une sépulture digne aux morts. "Nous voulons sauver les nôtres, ils sont enterrés et ils demandent de l’aide… Et la police nous en empêche alors nous sommes énervés", a déclaré un des jeunes en colère.

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Des vêtements, des chaussures, des sacs à main et des ustensiles de cuisine gisaient sur le sol des huit pièces du bâtiment. La macabre découverte a été faite après l’alerte donnée par des marchands se déplaçant en motos. Ils se plaignaient de l’absence étrange et inexpliquée de plusieurs membres de leur groupe. "Cela fait longtemps que l’on a remarqué des allers-retours dans cette zone et nous avons alerté des agents de sécurité, mais ils n’ont pas réagi", a déclaré Isiaka Bello, un chef local.

Des vêtements de personnes qui ont pu être tuées à Ibadan le 24 mars 2014. © Pius Utomi Ekpei / AFP

Six suspects arrêtés

Le gouverneur de l’État d’Oyo, dont Ibadan est la capitale, Abiola Ajumobi, s’est rendu sur place lundi et a promis aux habitants que toute la lumière serait faite sur ce drame. "Ceux qui sont derrière cet acte odieux seront punis devant Dieu. Nous aussi, nous les punirons quand nous les aurons arrêtés", a-t-il déclaré. "Je vous demande à tous d’être très attentifs. Nous sommes venus vous apporter notre sympathie et pour fouiller toute la zone. Les alentours vont être passés au peigne fin", a-t-il ajouté.

"Certains suspects ont été arrêtés mais d’autres ont pris la fuite. Mais nous sommes sur leur piste", a déclaré le gouverneur, qui a précisé que la propriété allait être saisie. Selon la police, dimanche, six suspects dont cinq agents de sécurité armés de fusils, d’arcs et de flèches ont été appréhendés sur les lieux.

(Avec AFP)

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