Gabon – Faustin Boukoubi : « L’opposition manque de crédibilité »
Quand il donne son avis sur le paysage politique gabonais, le secrétaire général du Parti démocratique gabonais (au pouvoir), Faustin Boukoubi, ne mâche pas ses mots. Entretien.
Secrétaire général depuis 2008 du Parti démocratique gabonais (PDG), la formation politique qui tient les rênes du Gabon depuis 1968, Faustin Boukoubi, 59 ans, a fait son entrée au gouvernement du président Omar Bongo Ondimba au début des années 1990. Plusieurs fois ministre, il reste un cacique du parti présidentiel et un grand allié du président Ali Bongo Ondimba, fils d’Omar. Alors que se profile la perspective cruciale des élections présidentielles de 2016, il a accepté de répondre au questions de à Jeune Afrique.
Jeune Afrique : quel est le bilan du PDG depuis 2009 ?
Faustin Boukoubi : Notre bilan se mesure avant tout aux résultats obtenus aux différentes élections depuis 2009. Et il est très largement positif. Au-delà, nous concourons à la gouvernance du pays, à travers nos membres présents dans les instances républicaines. Là encore, dans la mesure où toute œuvre reste perfectible, aussi bien les indicateurs macro-économiques, sociaux, que les avancées constatées nous permettent d’affirmer que nous sommes sur la bonne voie.
Quelles conclusions avez-vous tirées de vos résultats aux dernières élections locales ?
L’éclatante victoire du Parti dans toutes les provinces du Gabon, y compris dans des localités jamais contrôlées par le PDG, ne peut que nous satisfaire. Mais des réglages internes méritent encore d’être opérés et nous nous y attelons.
Quel bilan des deux précédentes primatures et quels changements va apporter le nouveau gouvernement ?
Le développement est un processus et la gouvernance une continuité. Les précédentes équipes gouvernementales ont accompli leurs missions, la nouvelle va poursuivre l’œuvre entamée, tout en procédant aux réajustements et améliorations nécessaires.
On reproche au PDG d’avoir placé ses membres dans tous les rouages de l’État et de l’administration au plus haut niveau…
Au plus haut niveau de l’exécutif, outre le président qui y a été porté par le peuple, le Premier ministre et la plupart des membres du gouvernement sont, conformément à la pratique démocratique, issus du parti majoritaire. Quant à l’administration, l’appartenance politique n’est pas un critère de sélection et beaucoup de responsables n’émargent pas dans les registres du Parti démocratique gabonais. Du reste, certains appartiennent à l’opposition et se sont notoirement illustrés en 2009 et 2011 comme des pourfendeurs du PDG qu’ils continuent de combattre en sourdine. Personne ne consulte notre direction en vue des nominations, ce sont des prérogatives de l’exécutif. Notre rôle est d’en promouvoir les actions appréciables.
Assiste-t-on au PDG à l’affirmation des Rénovateurs au détriment des vieux barons des précédentes présidences ?
Chaque période se caractérise par une classe de dirigeants. L’essentiel, c’est d’opérer un savant dosage entre les profils de qualifications, de compétence et d’expérience, le tout reposant sur la confiance, le dévouement et la détermination.
Parmi les opposants, ils y en a qui ont une attitude plus républicaine que d’autres
Àquoi attribuez-vous les importantes défections de Jean Ping et Jacques Adiahénot ?
Les deux dignitaires de longue date de la République que vous citez reconnaissent avoir quitté le PDG depuis 2009 et ne font plus que médiatiser leur posture. Comment pouvaient-ils présager en 2009 de la situation qu’ils dénoncent à ce jour ? De deux choses l’une : soit ils faisaient preuve d’hypocrisie au temps où ils servaient Omar Bongo Ondimba et ont profité de sa disparition pour s’éclipser, ou bien ils digèrent mal leur substitution aux avants postes par d’autres cadres plus jeunes.
>> Lire aussi : "Nous restons ouverts à toute discussion constructive avec Jean Ping" (Faustin Boukoubi)
L’opposition comporte des personnalités connues dont la rancœur demeure le seul projet. Ils prétendent dénoncer des maux qu’ils se souviennent avoir eux-mêmes commis. Ils manquent ainsi de crédibilité et font plutôt de l’ombre à des jeunes cadres dans leurs rangs qui souhaiteraient apporter une offre nouvelle et un contrepoids constructif au pouvoir.
Y a-t-il une opposition plus constructive que l’autre, celle que certains de l’Union nationale dissoute qualifient d’ "l’opposition du pouvoir" ?
Parmi les opposants, ils y en a qui ont une attitude plus républicaine que d’autres, même au sein du groupe que certains d’entre vous continuez de reconnaître comme Parti, en dépit de son inexistence juridique. Les autres ont plutôt la nostalgie d’un état de non droit sur lequel ils ont régné.
Contre l’exigence de l’opposition de tenir au plus vite une Conférence nationale souveraine, qu’attend le pouvoir pour mettre en place le Conseil national de la démocratie annoncé par ABO ?
La révision du texte constitutif du Conseil national de la démocratie est en cours dans les instances compétentes.
Quels candidats de l’opposition représentent la plus grande menace pour la victoire du PDG en 2016 ? Eyeghe Ndong ?
Le Parti démocratique gabonais se préoccupe de la satisfaction des besoins du peuple et de son ancrage au sein de la population. Ce n’est pas à nous d’investir les candidats de l’opposition. Celui que vous citez a jeté l’éponge en 2009 face à la bourrasque du PDG, et même récemment à la mairie de Libreville, qu’il voulait contrôler avec seulement 48 conseillers sur 151, contre une alliance de 103 conseillers. Il peut toujours prendre le risque d’un ultime échec.
Nous restons convaincus que la santé financière est bonne.
On parle aussi du soutien de chefs d’État voisins à des personnalités d’opposition, qu’en est-il ?
Je ne suis pas compétent pour susurrer sur le comportement de chefs d’État de pays amis. Ces rumeurs ont déjà prévalu en 2009. Les intéressés se sont alors montrés plutôt dignes et responsables. Ils ont eux-mêmes des opposants qu’ils n’aimeraient certainement pas voir soutenus par des pays voisins.
La rumeur court que l’État gabonais est à court de liquidités, qu’en est-il ? Quelles sont les preuves publiées de sa santé financière ?
Au-delà des indicateurs macro-économiques, me référant aux déclarations des ministres en charge de ces questions, ainsi que celle du Premier ministre, et me fondant notamment sur la régularité du paiement des soldes, nous restons convaincus que la santé financière est bonne.
Et la biométrie, en êtes-vous satisfait ?
La biométrie, voulue par toute la classe politique, même si l’opposition se montrait la plus bruyante comme d’habitude sur la question, a été introduite avec succès dans le processus électoral. Les opposants qui se glorifient de leur victoire n’ont-ils pas été élus sur cette base ? Comme toute œuvre humaine, elle reste perfectible et nous ne manquerons pas d’y contribuer.
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Propos recueillis par Laurent de Saint Périer
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