Procès Simbikangwa : « Je n’ai pas vu de cadavres » pendant le génocide au Rwanda

Devant la cour d’assises de Paris, Pascal Simbikangwa a déclaré mercredi qu’il n’avait pas vu un seul cadavre pendant le génocide au Rwanda. Pourtant, certains témoins affirment qu’il distribuait des armes à des miliciens.

Portrait de Simbikangwa réalisé lors du premier jour de son procès. © AFP

Portrait de Simbikangwa réalisé lors du premier jour de son procès. © AFP

Publié le 27 février 2014 Lecture : 2 minutes.

Il sortait peu de sa chambre. Il n’a donc rien vu. Pascal Simbikangwa, poursuivi pour complicité de génocide, a expliqué mercredi devant la cour d’assises de Paris comment il avait pu passer à côté des massacres qui ont fait 800 000 morts au Rwanda en 1994. "J’ai dit que je n’ai pas vu de cadavres, je n’ai pas dit qu’il n’y avait pas de cadavres", a-t-il nuancé devant les juges. Question de ne pas être considéré comme un négationniste.

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Pourtant, à en croire le témoignage du général canadien Roméo Dallaire, commandant de la force de l’ONU qui échoua à prévenir ou empêcher les massacres, il y avait trois "barrières" dans un rayon de 200 mètres autour de la maison de Pascal Simbikangwa. Et c’est là qu’on filtrait et massacrait. Dès le début du génocide, "des cadavres d’hommes, de femmes, d’enfants gisaient autour des barrages", avait affirmé l’officier canadien.

"Il s’agit de moi, pas de Dallaire, peut-être il passait par des coins et des recoins", a rétorqué l’accusé au juge Olivier Leurent, qui s’étonne que, seul parmi tous, il ne se soit rendu compte de rien.

Pascal Simbikangwa a ensuite multiplié les explications. À cause de son dos (il est paraplégique) quand il sortait avec son chauffeur et ses gardes, il s’allongeait dans la voiture… Le ministère des Travaux publics était tout entier mobilisé pour ramasser les morts… Dans son quartier résidentiel de Kiyovu, on avait peu tué…

"À Kigali, quelles étaient vos occupations ?", lui a alors demandé le président. "J’écrivais, je restais dans ma chambre, parce que le salon était plein de réfugiés", jusqu’à une cinquantaine, au deuxième jour des tueries. Il a affirmé avoir sauvé des gens, notamment deux familles de voisins tutsis.

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"Devoir d’homme"

Pour l’accusé, il n’a fait là "que [son] devoir d’homme" et les rares fois où il sortait c’était pour aller au ravitaillement ou chercher "des gens qui [l’] appelaient au secours". Mais, Diogène Nyirishema et Salomon Habiyakare, gardiens de maisons d’expatriés dans les rues voisines, n’ont pas la même perception que l’accusé de la situation à Kiyovu. Ils ont décrit des scènes de peur et de violences. "On voyait des gens tirer sur [les Tutsis]" et "des véhicules venaient ramasser les morts tous les jours", a témoigné Diogène Nyirishema.

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Tous deux ont affirmé avoir été réquisitionnés par les militaires pour tenir des barrières dans leurs rues et que Pascal Simbikangwa, considéré dans le quartier comme une autorité, a distribué "deux fusils", un à chacun de leurs barrages, où on leur disait de "ne pas laisser passer les ‘inyenzi’ [les cancrelats, comme ils surnommaient les Tutsis]".

Mais sur plusieurs points, leur récit n’a pas collé. Pour l’un, Simbikangwa passait régulièrement sur les barrages du quartier, distribuant conseils et ravitaillement. Alors que l’autre a assuré qu’il ne l’avait plus revu après la distribution d’armes. Des contradictions qualifiées de "cinéma" par l’accusé.

(Avec AFP)

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