Homosexualité en Ouganda : Museveni accentue la répression, avec la présidentielle en tête ?
L’Ouganda a encore durci sa loi réprimant l’homosexualité. Lundi, le président Yoweri Museveni a signé le texte prévoyant notamment la prison à vie pour les récidivistes ou encore la dénonciation obligatoire des homosexuels. Non sans arrière-pensées.
La pression internationale n’a pas suffi. Alors que Yoweri Museveni avait un temps laissé entendre qu’il pourrait ne pas promulguer la loi réprimant encore un peu plus les homosexuels en Ouganda, il a finalement fait volte-face en signant le texte en question, lundi 24 février. "Cette loi est très populaire à la fois au Parlement et auprès de la société ougandaise", avait expliqué, le 17 février, le porte-parole du gouvernement, Ofwono Opondo.
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"Le président est sous forte pression dans son pays pour signer la loi", avait-il ajouté. En 2016 se tiendra en effet une élection présidentielle à laquelle Yoweri Museveni a semble-t-il bien l’intention de se présenter, avec le soutien de son parti, le Mouvement national de résistance (MNR). Le parti au pouvoir a ainsi annoncé, le 10 février, son intention de voir son chef briguer un cinquième mandat. "Les députés ont déclaré dans leur proposition qu’ils étaient conscients du rôle qu’a joué le président Museveni pour assurer la paix, la sécurité, la démocratie et la transformation socioéconomique, entre autres choses. Ils souhaitent l’avoir pour candidat unique en 2016, et lui promettent leur soutien total", indique le communiqué du MNR.
Horizon 2016 ?
La possibilité d’un cinquième mandat valait bien de tenir tête à une communauté internationale fortement opposée au projet de loi. "Sur le court terme, Museveni va tirer un bénéfice politique certain", prédit ainsi Ben Sheperd, du think tank Chatam House, "mais à plus long terme, la perte du soutien des bailleurs de fonds, des revenus du tourisme ou de l’investissement extérieur peut conduire à une cascade de déficits croissants, (…) qui pourraient avoir des conséquences graves (…) sur sa popularité".
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Lundi après-midi, le secrétaire d’État américain John Kerry a en effet déclaré que les États-Unis allaient réexaminer leurs relations avec l’Ouganda, notamment leurs programmes d’assistance. La Norvège et le Danemark ont pour leur part d’ores et déjà annoncé la suspension de leur aide financière à Kampala. Enfin, les Pays-Bas, premier pays au monde à avoir légalisé le mariage homosexuel en 2001, ont gelé le versement de 7 millions d’euros annuels au système judiciaire ougandais.
Ce que dit la loi
Surtout, le texte va immédiatement affecter la vie des citoyens homosexuels ougandais, qui s’apparentait déjà à un chemin de croix. Le Code pénal interdisait en effet déjà les "rapports sexuels contraires à l’ordre de la nature". Mais, la nouvelle version va plus loin, notamment en incluant désormais des catégories de personnes susceptibles d’être arrêtées pour "homosexualité aggravée", infraction passible d’une peine de réclusion à perpétuité. Les personnes pouvant être inculpées de cette infraction sont :
- les "récidivistes", qui ont un temps été menacés de la peine de mort, dans une version du projet de loi en date de 2009.
- les personnes porteuses du VIH ayant eu des rapports sexuels avec une personne du même sexe, y compris lorsqu’il s’agit de rapports sexuels protégés entre adultes consentants.
La loi promulguée le 24 février contient également d’autres "innovations" :
- Elle pénalise la "promotion" de l’homosexualité et prévoit également des peines de prison pour toute personne qui conseille ou tend la main aux homosexuel(le)s.
- Elle impose des tests de dépistage du VIH dans certaines circonstances.
- Le texte criminalise également pour la première fois l’homosexualité féminine, ignorée auparavant par la législation.
- La non-dénonciation des homosexuels devient pénalement répréhensible.
- La loi dispose théoriquement d’une compétence extraterritoriale, rendant tout citoyen ougandais vivant à l’étranger et "coupable d’homosexualité", susceptible d’être poursuivi et extradé.
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Par Mathieu OLIVIER
Le texte de la loi promulguée le 24 février
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