Algérie : la présidentielle des « premiers venus » ?
Pendant la période électorale en Algérie, « Jeune Afrique » vous propose une revue de presse des titres arabophones. Entre les bruits de couloirs, les scoops politiques et autres coups d’éclats, la vie médiatique du pays ne manque pas de piquant.
Premier tirage de la presse quotidienne algérienne, Echourouq, daté du 17 février, consacre un dossier à "la fièvre électorale". Un mois après la convocation du corps électoral le 17 janvier 2014 par le président Abdelaziz Bouteflika, 106 postulants à la candidature ont fait part de leur intention de se présenter au scrutin en déposant une lettre manuscrite auprès du ministère de l’Intérieur pour avoir droit aux formulaires de parrainage (60 000 citoyens répartis sur, au moins, 25 des 48 wilayas du pays ou 600 élus). "Un phénomène sans précédent" note Echourouq qui se réfère à la précédente présidentielle, en avril 2009, durant laquelle 13 personnes avaient postulé. Le Conseil constitutionnel n’ayant validé que six candidatures.
Le quotidien a appelé à la rescousse sociologues, juristes et politologues pour tenter d’expliquer ce phénomène. Ainsi, selon l’écrivain et chercheur Mohamed Arezki Ferad, l’engouement pour la présidentielle n’est pas un phénomène de mode mais la conséquence d’une dévalorisation de la fonction politique, dont la responsabilité incomberait, en grande partie, aux gouvernants actuels et passés. Pour Youcef Hantabli, professeur de sociologie à l’université d’Alger, ce phénomène est lié "aux désintérêt du citoyen pour la chose politique. Cela a ouvert la porte à des comportements totalement inédits chez nous, parmi lesquels la possibilité du premier venu ("men Habba oua dab", en version originale)." Quant au juriste Amar Khebaba, il estime que si "les critères de candidatures à la magistrature suprême sont définis par la loi, cette dernière en a occulté plusieurs à l’instar du cursus scolaire et universitaire ou encore de l’expérience politique." Me Khebaba relève cependant que seule une poignée de postulants pourra satisfaire à l’obligation de parrainages.
Echourouq nous apprend par ailleurs que le général à la retraite Mohand Tahar Yala s’est vu refuser une demande de formulaires de parrainage supplémentaires par le ministère de l’Intérieur. Au communiqué de presse courroucé de son staff de campagne, la direction des Libertés publiques, du ministère de l’Intérieur, a répliqué vertement que le candidat Yala avait reçu les 60 000 formulaires et qu’il en demandait 100 000 autres. "Nous lui avons proposé 1 000 qu’il a refusés."
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Quoiqu’il en soit, pour Me Samir Benmouffok, cet engouement pour la présidentielle s’explique aussi par "la simplicité des conditions posées par la Constitution" pour postuler à la candidature. "La prochaine révision du texte fondamental devrait intégrer de nouveaux critères pour postuler à la magistrature suprême". La condition, selon lui, pour que la présidentielle ne se transforme pas en "une échéance totalement folklorique".
La presse en effervescence
La presse quotidienne arabophone tire à quelques 2 millions d’exemplaires par jour, inégalement répartie entre une trentaine de titres. Trois mastodontes se distinguent avec un tirage quotidien à faire pâlir d’envie : Echourouq (750 000) El Khabar (600 000) et En Nahar (400 000), le reste des titres représentant un tirage cumulé à 250 000 exemplaires. Le contenu est inégale mais cette presse est "généralement bien informée" et prisée par les gorges profondes algériennes qui l’inondent en scoops en matière politique ou sécuritaire. C.O.
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