Niger : Faire du Sahel un jardin extraordinaire…
Une fois encore confronté à une grave crise alimentaire, le pays cherche, pour en finir avec les programmes d’urgence, à changer en profondeur les pratiques de production.
Niger : l’effet Issoufou
Le soleil n’est plus tout à fait au zénith, mais ses rayons sont encore assez brûlants pour que boeufs et chèvres cherchent à s’abriter sous les quelques arbres au feuillage clairsemé. De chaque côté de cette route de la région de Zinder, le paysage n’est que désolation tant la saison des pluies, achevée il y a déjà plus de six mois, a été mauvaise. Soudain, quelques reliefs apparaissent et, en contrebas, des jardins verdoyants, avec des régiments de salades et de choux plantés au cordeau.
Ces cultures de contre-saison – qui ne dépendent pas des pluies, mais d’une eau pompée ou récupérée et, dans le meilleur des cas, d’un système d’irrigation – sont exactement ce que Niamey veut développer pour atteindre l’autosuffisance et la sécurité alimentaires.
Mauvais scénario. On en est très loin, bien sûr. Une fois encore, les précipitations trop faibles et irrégulières de 2011 ont abouti à un déficit de production céréalière de plus de 700 000 tonnes (un cinquième des besoins nationaux). Selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), d’ici aux prochaines récoltes, en septembre, 5,4 millions de Nigériens (35 % de la population) sont menacés d’insécurité alimentaire. En particulier, 400 000 enfants risquent de souffrir de malnutrition sévère.
La situation était prévisible depuis de nombreux mois, selon le récurrent scénario sahélien. À la différence que, cette fois, elle a été anticipée. Là où un Mamadou Tandja, soucieux d’éviter une invasion d’ONG occidentales, aurait minimisé l’urgence jusqu’à confiner au déni, les nouvelles autorités ont tiré la sonnette d’alarme dès le mois d’août 2011, avant même la récolte, sitôt que la pluviométrie a auguré les problèmes à venir. Cela a permis à l’État, ainsi qu’aux partenaires et bailleurs de fonds, de se mobiliser et de s’organiser pour faire face à la situation.
Depuis, le gouvernement pare au plus pressé, avec plusieurs programmes d’urgence dotés d’une enveloppe de 100 milliards de F CFA (152,4 millions d’euros). Des ventes à prix modéré (13 000 F CFA le sac de céréales de 100 kg, contre plus de 20 000 sur le marché) ont été lancées dès la fin du mois de janvier. Disposant dans un premier temps de 12 500 t par mois, le plan doit se poursuivre jusqu’en septembre. À partir du mois de juin, il comportera en outre des distributions gratuites dans les zones les plus durement touchées.
Maraîchage. D’autres projets visent à racheter aux éleveurs les têtes de bétail les plus fragiles, qui ne pourront de toute façon pas survivre, ou encore – et c’est une façon de voir à plus long terme – à soutenir le développement des cultures de contre-saison.
Les premiers résultats sont déjà visibles sur les marchés nigériens, désormais envahis de choux, salades, tomates et pommes de terre. Au point de faire chuter les prix. Par rapport à la même période l’an dernier, ceux de certains légumes ont été divisés par cinq, voire par dix à la mi-mars, à l’inverse du prix des céréales, qui était en hausse de plus de 12,5 % en février. Une tendance qui devrait faire entrer les fruits et légumes dans les habitudes de consommation.
Le gouvernement prendra en compte les résultats de cette première campagne maraîchère pour lancer son initiative 3N (« les Nigériens nourrissent les Nigériens »), un programme quinquennal de 1 000 milliards de F CFA, dont l’un des principaux objectifs est de réduire la dépendance aux aléas climatiques en concentrant les investissements sur l’irrigation, les techniques de récupération des eaux de pluie et les intrants.
Il y a urgence. Avec le réchauffement climatique, le rythme des sécheresses, qui touchent désormais le pays presque une année sur deux, ne devrait pas ralentir.
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