Centrafrique : week-end macabre à Bangui
Au moins 11 personnes, dont un parlementaire, ont été tuées entre samedi et dimanche lors de violences accompagnées de pillages à grande échelle dans la capitale centrafricaine.
Bangui a de nouveau été endeuillée par une flambée de violences ce week-end. Du samedi 8 février au soir au dimanche 9 février, au moins 11 personnes y perdu la vie, dont un parlementaire, Jean-Emmanuel Ndjaroua.
Les premiers affrontements ont éclaté samedi soir aux abords de la mairie du 5e arrondissement, au centre-ville, avec cinq personnes tuées dans des circonstances non établies, puis trois autres dans des combats interreligieux, et une neuvième par des soldats de la force de l’Union africaine (Misca). Peter Bouckaert, de l’ONG Human Rights Watch (HRW), a également fait état du lynchage à mort d’une dixième personne – musulmane ou chrétienne, selon des sources contradictoires – près du marché central.
Selon la Ligue centrafricaine des droits de l’Homme (LCDH), dimanche après-midi, c’est un membre du parlement provisoire centrafricain, Jean-Emmanuel Ndjaroua, qui a été assassiné dans le 4e arrondissement de la capitale. La veille, la victime avait fait une intervention remarquée devant le Conseil national de transition (CNT, parlement provisoire), dans laquelle elle s’était élevée contre les violences dont sont victimes les ressortissants "cosmopolites" de sa région, autrement dit les musulmans.
"Dehors, les Rwandais!"
Dimanche matin, des soldats français et des gendarmes centrafricains avaient pris position, au milieu de ruines de commerces encore fumantes, dans le 5e arrondissement livré aux pilleurs et survolé par un hélicoptère de combat français. Selon des habitants, après la mort de cinq personnes samedi soir, une femme chrétienne de ce quartier mixte a été tuée par un musulman. Son agresseur a été capturé et tué, et son cadavre brûlé devant la mairie. Son corps calciné gisait dimanche au milieu de la route.
Un deuxième civil musulman a ensuite été tué et son meurtrier s’apprêtait à jeter le cadavre dans un brasier quand les soldats rwandais de la Misca ont ouvert le feu, a raconté Innocent, un habitant du quartier. "Ils l’ont tué", a accusé Innocent, s’exprimant au milieu d’une foule surexcitée criant "À mort les Rwandais". "Les Rwandais sont tous des musulmans! Dehors, les Rwandais!", hurlait une femme, tandis que crépitaient des rafales de kalachnikov, d’origine indéterminée.
En fin de matinée, malgré les remontrances des militaires français, des bandes de jeunes pillards continuaient de venir se servir, certains avec des brouettes ou des charrettes, se glissant entre les blindés. Selon une source militaire française, les pillages ont finalement été contenus à la mi-journée. Le commandant en chef de la Misca, le général camerounais Martin Tumenta Chomua, a menacé samedi les groupes armés de recourir à la force pour arrêter assassinats, lynchages et pillages.
Le Drian mercredi à Bangui
Dans ce climat de violences sans fin, le ministre français de la Défense Jean-Yves Le Drian est arrivé dimanche à N’Djamena pour une nouvelle tournée régionale consacrée en grande partie à la crise centrafricaine.
Il a indiqué à la presse avoir "fait le point" avec le président tchadien Idriss Déby Itno, acteur militaire et politique majeur d’Afrique centrale, "sur les différents théâtres des opérations, notamment au Mali, et la situation dramatique en Centrafrique". "Nous avons également évoqué la situation au sud de la Libye, qui est considérée comme un refuge de terroristes", a-t-il ajouté, avant se rendre au Congo.
Le président congolais Denis Sassou Nguesso est médiateur dans le conflit centrafricain. Mercredi, Jean-Yves Le Drian se rendra à Bangui pour une troisième visite depuis le début, le 5 décembre, de l’intervention française ("opération Sangaris").
(Avec AFP)
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