Bangui, en proie aux combats, attend le renfort de la force européenne
Des combats ont à nouveau éclaté mercredi à Bangui, en proie aux pillages et aux violences. Soldats français et africains attendent désormais la force militaire européenne pour pouvoir ramener le calme dans la capitale centrafricaine.
Les combats n’ont toujours pas cessé, à Bangui, tandis que la force africaine en Centrafrique (Misca) et les militaires français, qui poursuivent leurs opérations de sécurisation, attendent le renfort d’une force européenne, validée par le Conseil de sécurité de l’ONU. Signe de l’extrême tension persistant dans la ville, une dizaine de combattants Séléka ont été tués par les soldats français, mardi 28 janvier, à la sortie nord de la capitale centrafricaine. Ces derniers avaient été pris à partie par les ex-rebelles de la Séléka devant le camp militaire RDOT où ils sont cantonnés, selon une source diplomatique.
Mercredi matin, des tirs nourris d’armes automatiques, ponctués de détonations sourdes, ont éclaté dans le quartier du PK-5, le poumon commercial de la ville. Depuis quelques jours, pillards et miliciens chrétiens anti-balaka tentent de pénétrer, en vain pour l’instant, dans la centaine de commerces du quartier appartenant majoritairement à des musulmans. Selon des habitants, les tirs ont opposé, comme souvent, des anti-balaka à des combattants Séléka et des civils musulmans armés.
La Misca s’installe au cœur des quartiers
Des pillages et des violences, faisant au moins deux morts, ont eu lieu dans d’autres quartiers de la ville. Au quartier Combattant, près de l’aéroport, un civil musulman a été massacré à la machette par des miliciens anti-balaka. Des soldats français sont intervenus pour contenir des dizaines de pillards. Un jeune chrétien a également été tué, confondu avec un musulman par ses assaillants.
Dans les quartiers PK12 et PK13, deux autres points névralgiques de la ville à la sortie nord, la tension est un peu retombée. Les centaines de musulmans déplacés, qui attendaient des véhicules pour gagner le nord du pays et étaient tous les jours harcelés par les chrétiens, ont pu s’enfuir. Dans ces deux points chauds, il n’y a pratiquement plus d’habitants de cette confession.
Malgré un dispositif de sécurisation de plus en plus étoffé au fil des semaines, les soldats français et africains ne peuvent endiguer les explosions soudaines de violences dans la capitale, jour et nuit. Pour rassurer les populations, la Misca a commencé à s’installer au cœur des quartiers, avec une présence permanente dans les commissariats. "Des numéros d’appel sont laissés à la portée des populations" en cas d’incident, a indiqué l’état-major de la Misca : "chaque arrondissement de Bangui dispose d’un responsable et d’un numéro".
Mobilisation pour la Centrafrique à Addis-Abeba
L’Algérie va mettre à la disposition de la Mission internationale de soutien à la Centrafrique sous conduite africaine (Misca) des avions de transport de troupe et de matériel. C’est la principale annonce faite par le premier ministre algérien, Abdelmalek Sellal, lors de la réunion du Conseil Paix et Sécurité (CPS) des chefs d’État de l’Union africaine, tenue le 29 janvier au soir, à Addis-Abeba. En attendant la conférence des donateurs prévue le 1er février, l’Algérie apporte sa part dans le renforcement de la Misca, dont l’action sur le terrain a déjà largement contribué à réduire les exactions et la violence dans le pays. Tout cela se déroulait en présence du patron de la Misca, le général de corps d’armée congolais, Jean-Marie Michel Mokoko.
Pour leur part, le Canada et le Luxembourg ont fourni des contributions au fonds d’affectation spéciale mis en place par le secrétaire général des Nations unies. Le Japon et les États-Unis ont eux aussi annoncé leur soutien. Il faut préciser que les États-Unis, la France et l’Union européenne ont déjà apporté leur appui à la Misca, une mission prévue pour mobiliser 6 000 hommes et dotée d’un budget arrêté le 28 janvier dernier à 500 millions de dollars. Georges Dougueli, envoyé spécial à Addis-Abeba.
Des renforts insuffisants
"Nos nuits sont tranquilles depuis que les soldats burundais de la Misca sont basés dans notre secteur. Ils patrouillent à pied, dans des véhicules, nous demandent si tout se passe bien. En tout cas, les détonations nous parviennent de loin", témoignait un habitant. "Outre les Burundais, il y a les militaires français qui descendent régulièrement ici et font aussi des patrouilles. Le calme est revenu dans le 6e arrondissement", expliquait un autre Banguissois. Mais le dispositif n’est opérationnel que dans deux des huit arrondissements de la capitale pour le moment.
Pour ramener le calme et pouvoir intervenir en province, les 1 600 militaires français et les 5 500 soldats de la Misca vont recevoir le renfort d’une force européenne d’environ 500 hommes, dont le Conseil de sécurité de l’ONU a autorisé l’engagement, ce mardi. Son déploiement devrait prendre plusieurs semaines et ces renforts risquent d’être insuffisants pour stabiliser un pays dévasté par des mois de tueries interreligieuses, qui ont provoqué une crise humanitaire sans précédent avec des centaines de milliers de déplacés.
À terme, l’ONU considère qu’il faudrait déployer plus de 10 000 hommes pour sécuriser la Centrafrique, "car la situation est très, très grave et le pays immense", a expliqué l’ambassadeur de France aux Nations unies, Gérard Araud. C’est aussi l’avis de la nouvelle présidente centrafricaine de transition, Catherine Samba Panza, qui, dès son élection le 20 janvier, a réclamé plus de soldats pour arrêter les exactions et les violences qui ont contraint son prédécesseur Michel Djotodia à démissionner. Comme Paris, Mme Samba Panza veut une mission de l’ONU pour son pays, qu’elle doit conduire à des élections générales au plus tard dans un an.
(Avec AFP)
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