Arts Premiers : à Bruxelles, la Brafa se teinte d’Afrique
Jusqu’au 2 février, le grand capharnaüm commercial de la Brafa offre à voir de nombreux chefs d’oeuvres de l’histoire de l’art, notamment africaine. Tandis que les galeries réunies pour Bruneaf Winter (Brussels Non European Art Fair) dans la capitale belge présentent à la vente des objets cultuels somptueux venus du continent.
Le premier mot qui vient à l’esprit, lorsque l’on visite la Brafa (Brussels Art Fair), est celui-ci : capharnaüm. Mais ce joli mot en induit vite de nombreux autres au fur et à mesure que l’on se déplace de galerie en galerie, à pas feutrés dans l’épaisse moquette : cabinet de curiosité, caverne d’Ali Baba, musée, magasin d’antiquités… La Brafa, qui se tient à Bruxelles (Belgique) jusqu’au 2 février 2014, est un peu un mélange de tout ça. En arpentant les trois longues allées le long desquelles se répartissent les marchands, le promeneur curieux va de révélations en révélations, retenant frissons extatiques et exclamations d’horreur.
Du clair-obscur peuvent soudain surgir une statuette vaudou, un crocodile d’argent grandeur nature, un Christ en croix, une momie d’Ibis, une statue grecque antique… Aux cimaises sont suspendus des tableaux anciens, modernes ou contemporains, des planches de bande-dessinées, des dessins, des esquisses… Les plus grands noms de l’art se côtoient sur les cartels minimalistes : Picasso, Picabia, Brueghel, Arp, Alechinsky et bien d’autres encore sans qu’aucun ordre ne préside à leur apparition.
Ici, on est entre connaisseurs. Celui qui souhaite une explication, ou un prix, s’adresse au marchand. Le seul point commun entre toutes ces œuvres d’art, souvent sublimes, parfois médiocres ? Elles sont toutes à vendre. D’ailleurs le public de marchands, de collectionneurs et d’hommes d’affaires qui se sont acquittés des vingt euros permettant d’accéder à ce musée éphémère n’est pas du genre "monsieur tout le monde". La statue Nok exposée par la galerie Alain de Monbrison vaut dans les 60 000 euros. Arthur de Monbrison, qui débute dans le métier, explique : "Il y a peu de statues Nok qui sortent ces derniers temps, dit-il. Mais celle-ci vient de la collection du baron Elie de Rothschild, donc nous sommes sûrs qu’elle ne provient pas d’un pillage." Même si récemment, le quotidien Le Monde s’est intéressé de près à l’empire offshore de cet homme d’affaires qui fut également mécène. Soixante-mille euros, ceci dit, ce n’est pas grand-chose par rapport au superbe Massacre des innocents sous la neige peint par Martin Van Cleve au XVIème siècle et proposé à 1,2 millions d’euros par la galerie luxembourgeoise Lux art Consulting…
Les Africains discrets mais présents
Dans ce monde où l’on se nourrit de petits fours et où l’on se désaltère au champagne, l’Afrique n’est pas absente. Si les artistes africains contemporains restent malheureusement très discrets – on peut apercevoir ici les calligraphies amoureuses à la laque rouge de l’Algérienne Zoulika Bouabdellah, là les aquarelles sur céramique du Camerounais Barthélemy Toguo – c’est surtout l’Afrique des fétiches et des objets culturels qui se vend ici. Les pièces "d’arts premiers", présentées par les galeries Jacques Germain, Bernard Dulon ou Serge Schoffel sont généralement mises en valeur par une belle lumière, ou même une confrontation avec des peintres connus comme chez Didier Claes, où l’on peut voir une sculpture nkisi et, au mur, des tableaux d’Antoni Clavé, d’Antoni Tapiès, et d’Antonio Saura. Ceci explique peut-être cela, le marchand belgo-congolais Didier Claes est le vice-président de la Brafa et joue un rôle très actif dans la promotion de la Bruneaf (Brussels non european art fair) qui se tient parallèlement à la Brafa, aux alentours de la place du Grand Sablon (jusqu’au 26 janvier 2014 pour la version hivernale, puis en juin). La foire est bien métisse et l’argent n’a pas de couleur…
Ainsi doit-on sans doute se réjouir de voir des chefs d’oeuvre de l’art africain côtoyer dans cette gigantesque galerie commerciale les plus grands noms de l’histoire (et du marché) de l’art. Mais peut-être peut-on aussi regretter de ne guère y croiser les collectionneurs, les investisseurs ou les mécènes africains qui pourraient recueillir là – enfin, racheter… – les richesses patrimoniales dont l’Histoire a privé le continent. Un jour peut-être.
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