Maroc : un violeur ne pourra plus épouser sa victime pour échapper à la prison
Les députés marocains ont voté mercredi soir un amendement au code pénal supprimant la possibilité pour un violeur d’épouser sa victime afin d’échapper à la prison. Une victoire importante pour les droits des femmes dans le royaume.
Au Maroc, et au-delà, l’histoire tragique de la jeune Amina Filali est encore dans toutes les mémoires. Contrainte d’épouser celui qui l’avait violée, cette jeune-fille de 16 ans s’était donné la mort le 10 mars 2012. Mais la pratique qui permettait au violeur d’échapper à la prison et à la famille de la victime de sauver les apparences est désormais abolie dans la loi. Mercredi 22 janvier au soir, les députés marocains ont voté à l’unanimité des présents un amendement du code pénal supprimant un alinéa décrié de l’article 475.
Une victoire pour les défenseurs des droits de l’homme et les progressistes de tous bords qui fait suite à un feu vert du gouvernement islamiste de Abdelaziz Benkirane (Parti de la justice et du développement, PJD) et un vote positif préalable à la chambre des conseillers en mars 2013. "Aujourd’hui, Amina Filali peut enfin reposer en paix. Depuis 2012, il a fallu attendre et c’est grâce à la lutte menée par les ONG et la mobilisation de certains groupes parlementaires que nous avons pu aboutir", a réagi auprès la députée du parti Authenticité et modernité (PAM), Khadija Rouissi.
>> À lire aussi : Ubu législateur ou le problème des lois obsolètes au Maroc
Mais le combat des femmes marocaines est loin d’être terminé. Fin 2012, la ministre de la Famille, Bassima Hakkaoui, avait indiqué que six millions de femmes – sur une population totale de 34 millions d’habitants – étaient victimes de violences au Maroc, dont plus de la moitié dans le cadre conjugal.
Amnesty International s’est notamment félicité du vote des députés marocains, saluant dans un communiqué "un pas dans la bonne direction". Mais l’ONG basée à Londres a elle aussi fait valoir la nécessité d’une "stratégie globale pour protéger les femmes et les jeunes filles des violences".
"C’est un pas très important, mais qui n’est pas suffisant (…), confirme Fatima Maghnaoui, responsable d’une ONG soutenant les victimes de violences. Nous appelons à une révision complète du code pénal pour les femmes", poursuit-elle.
Un projet de loi devant permettre de sanctionner sévèrement leurs auteurs de violences envers les femmes fait actuellement l’objet de vifs débats et, face aux critiques, le gouvernement a été contraint de revoir sa copie. Et mercredi, l’ONG internationale Avaaz a affirmé avoir remis au Parlement une pétition de plus d’un million de signatures exhortant les autorités à aboutir au plus vite dans ce dossier.
>> À lire aussi : Égalité homme-femme, tabou or not tabou ?
Dix ans après l’adoption de la moudawana (code de la famille), les défenseurs des droits des femmes au Maroc peuvent s’appuyer sur la nouvelle constitution de 2011, rédigée en plein Printemps arabe, qui consacre "l’égalité des droits" et exhorte l’État à œuvrer pour la parité. Mais parmi les combats qui sont menés pour les droits des femmes figurent encore l’interdiction du mariage des mineures, permis au Maroc par le même code de la famille à la faveur de dérogations des juges.
De 30 000 en 2008, le nombre de cas est passé à plus de 35 000 en 2010 et avoisine désormais les 40 000, selon des chiffres officiels et ceux d’ONG. "Il faut mettre fin aux dérogations. On pousse les jeunes filles à arrêter leur scolarité et on les pousse par la même à la précarité", a déploré Khadija Rouissi.
(Avec AFP)
La Matinale.
Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.
Consultez notre politique de gestion des données personnelles
Les plus lus
- Au Mali, le Premier ministre Choguel Maïga limogé après ses propos critiques contr...
- CAF : entre Patrice Motsepe et New World TV, un bras de fer à plusieurs millions d...
- Lutte antiterroriste en Côte d’Ivoire : avec qui Alassane Ouattara a-t-il passé de...
- Au Nigeria, la famille du tycoon Mohammed Indimi se déchire pour quelques centaine...
- Sexe, pouvoir et vidéos : de quoi l’affaire Baltasar est-elle le nom ?